Déposé le 24 mai 2016 par : M. Dosière, M. Caresche.
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° La section VII du chapitre premier du titre II de la première partie du livre premier est complétée par un H ainsi rédigé :
« H : Déclaration des achats
« Art. 289 E.- Aux fins de se prémunir contre le risque d'être impliqués dans un circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée, les assujettis déclarent par voie électronique les achats de biens ou de prestations de services réalisés auprès d'un autre assujetti dans les 24 heures de leur inscription en comptabilité au sens de l'article 286 ou de leur enregistrement dans les contrôles documentés mentionnés au 1° du VII de l'article 289. La déclaration mentionne pour chaque opération, d'une part, le numéro d'identification visé à l'article 286ter par lequel le vendeur est identifié et, d'autre part, la base d'imposition de la livraison de biens ou de la prestation de services telle que visée au a du 1 de l'article 266 et à l'article 267. » ;
2° Le 3 de l'article 272 et le 4bis de l'article 283 sont complétés par une phrase ainsi rédigée :
« Cette disposition n'est pas applicable si la déclaration des achats prévue à l'article 289 E a été déposée dans les conditions qu'il prescrit, sauf à ce que l'acquéreur se soit prêté à des manœuvres frauduleuses constitutives du délit d'escroquerie comme auteur ou comme complice. » ;
3° Le 2 du B de la section I du chapitre II du livre II est complété par un article 1729 Cbis ainsi rédigé :
« Art. 1729 Cbis. - Le défaut de production dans le délai prescrit d'une déclaration d'achat mentionnée à l'article 289 E entraîne l'application d'une amende égale à 5 % de la différence entre le montant à déclarer et la première limite mentionnée au I de l'article 302septies A. L'amende est applicable aussi lorsque la somme des achats à déclarer excède cette limite pour un même vendeur au terme d'une période de trois mois. L'amende n'est pas applicable si l'achat porte sur des prestations de services, ainsi que sur des biens dont la livraison n'est pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ou pour laquelle la taxe est due par l'acquéreur, le destinataire ou le preneur en application de l'article 283. L'amende est plafonnée par année à 0,1 % de la somme des achats pour laquelle elle est applicable lorsque l'assujetti a mis en œuvre un dispositif de transmission des informations requises dans des conditions de fiabilité définies par décret en Conseil d'État et elle n'est pas appliquée lorsque par ailleurs il est établi que la taxe mentionnée dans la facture d'achat a été régulièrement versée au Trésor par le fournisseur. » ;
4° Le premier alinéa du 4 de l'article 1788 A est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce taux est ramené à 1 % lorsque l'opération en cause est une acquisition intracommunautaire mentionnée au I de l'article 256bis »
II. - L'article L. 252 B du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Après le I, il est inséré un Ibis ainsi rédigé :
« I bis. - Lorsque le procès-verbal mentionné à l'article L. 80 F fait apparaître les deux faits suivants :
« 1° La taxe sur la valeur ajoutée afférente à une livraison de biens dont le montant excède la première limite mentionnée au I de l'article 302 septies A du code général des impôts est devenue exigible dans les conditions prévues au a du 2 de l'article 269 du code précité sans que soit échue l'obligation déclarative prévue à l'article 287 du même code ;
« 2° Le montant obtenu par application des taux prévus aux articles 278 à 281 nonies du même code, selon la nature des opérations, à la base du chiffre d'affaires ou des recettes brutes hors taxes réalisés au titre de chaque période pour laquelle aucune obligation déclarative n'est échue, jusqu'à la date du procès-verbal précité et sous déduction du total de taxe déductible dans les conditions prévues aux articles 271 à 273septies C du même code, excède le montant de taxe sur la valeur ajoutée compris dans les factures émises durant les douze mois précédant la livraison visée au 1° ;
« et que les circonstances sont susceptibles de menacer le recouvrement de la taxe, le comptable peut dans la limite du premier montant visé au 2° procéder à la saisie à tiers débiteur de la créance dont le redevable est détenteur auprès du destinataire de la livraison à raison de celle-ci. La saisie est notifiée à l'un et à l'autre avec mention des délais et voies de recours. Elle emporte l'effet prévu à l'article L. 523‑1 du code des procédures civiles d'exécution à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée. Le comptable ne peut en demander le paiement avant que soit échue l'obligation déclarative visée au 1°. » ;
2° Au premier alinéa du II, après la référence : « I », sont insérés les mots : « ou de la saisie à tiers débiteur mentionnée au Ibis » ;
3° Le III est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il en va de même pour la saisie à tiers débiteur mentionnée au I bis du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle vise. »
III - Le présent article est applicable aux opérations réalisées à compter du 1er octobre 2016, à l'exception des 3° à 4° du I pour lesquels cette date est fixée au 1er janvier 2017.
Cet amendement a pour objet de rendre impossible la fraude à la TVA dite « carrousel » qui représente un risque majeur d'alimentation des activités criminelles, et dont l'éradication apporterait pour les opérateurs réguliers une sécurité juridique essentielle à la modernisation de la vie économique. À cet effet, il institue, pour les seuls assujettis réalisant des achats importants (d'un montant supérieur à 783 000 euros) qui ne sont que des grandes entreprises, une obligation de déclaration électronique en temps réel de ces achats aisément intégrable dans leur système de gestion comptable.
Ces informations, limitées au montant de l'opération et au numéro d'enregistrement du fournisseur, permettraient à la Direction nationale des enquêtes fiscales, après recoupement avec la base de données économiques dont elle dispose, d'identifier les opérations douteuses et d'avertir le service local des impôts compétent qui exercera son droit d'enquête dans des délais permettant de faire obstacle au détournement de la TVA facturée en amont par les fournisseurs irréguliers.
La neutralisation de ces intermédiaires (désignés sous le terme de « taxis ») qui disparaissent avec le produit de la TVA encaissée avant même que la transaction ne soit connue des services fiscaux est d'autant plus nécessaire qu'une disposition de la loi « pour l'économie bleue » va, selon les déclarations du secrétaire d'État au budget, amplifier considérablement les risques de ce type de fraude à la TVA.
En contrepartie, le dépôt de cette télédéclaration donnerait aux grandes entreprises concernées l'assurance de ne pas voir remis en cause ultérieurement leurs droits à déduction de la TVA. Par ailleurs, pour toutes les entreprises, ce dispositif permet d'alléger le régime de pénalités qui avait été institué voici trente ans pour dissuader ces opérations frauduleuses mais qui n'a abouti qu'à sanctionner de manière excessive des négligences procédurales sans enjeu.
La solution proposée répond donc aux craintes du ministère du budget et permettra, pour l'avenir, de récupérer des pertes de recettes de TVA qui sont actuellement évaluées à plus de 5 milliards d'euros par an.
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