Amendement N° CL463 (Retiré)

Transparence lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique

Déposé le 23 mai 2016 par : Mme Berger, Mme Batho.

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Pour les délits prévus aux articles 433-1, 435-3, 435-4, 435-9, 435-10, 445-1, 445-1-1, 445-2, et 445-2-1 du code pénal ainsi qu'au huitième alinéa de l'article 434-9 et au deuxième alinéa de l'article 434-9-1 du même code, le procureur de la République peut recourirà la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité conformément aux articles 495-7 et suivants du code de procédure pénale à l'égard de toute personne, lorsque celle-ci reconnaît les faits qui lui sont reprochés.

Lorsque la personne mise en cause donne son accord aux engagements proposés, le procureur de la République saisit par requête le président du tribunal de grande instance aux fins d'homologation dans les conditions prévues à l'article 495-9 du Code de procédure pénale.

Des engagements de compensation d'intérêt public sont joints à la requête. Elle contient un exposé précis des faits, circonscrits dans l'espace et dans le temps, ainsi que la qualification juridique susceptible de leur être appliqués.

Lors d'une audience publique, le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui constate l'acceptation par la personne mise en cause des termes des engagements de compensation d'intérêt public.

Il les homologue par ordonnancemotivée par les constatations, d'une part, que la personne, en présence de son avocat, reconnaît les faits qui lui sont reprochés et accepte la ou les mesures proposées par le procureur de la République, d'autre part, que cette ou ces mesures sont manifestement justifiées au regard des circonstances de l'infraction, le cas échéant de sa complexité  et de la personnalité de son auteur.

A compter du jour de l'homologation des engagements, la personne dispose d'un délai de dix jours pour exercer son droit de rétractation.

L'ordonnance d'homologation recouvre  les effets d'un jugement de condamnation. L'ordonnance d'homologation et les engagements sont publiés sur le site internet du service à compétence nationale chargé de la prévention et la détection de la corruption, mentionné à l'article 1er de la présente loi, accompagnés d'un communiqué de presse du procureur de la République. Dans tous les cas, elle peut faire l'objet d'un appel de la part du condamné, conformément aux dispositions des articles 498, 500, 502 et 505 du Code de procédure pénale. Le ministère public peut faire appel, notamment à titre incident, dans les mêmes conditions. A défaut, elle a les effets d'un jugement passé en force de chose jugée.

L'exécution des obligations fixées dans les engagements de compensation d'intérêt public éteint l'action publique. Le constat de l'extinction de l'action publique est notifié par le procureur de la République à la personne mise en cause ainsi qu'à la victime. Elle ne fait pas obstacle au droit de la victime de poursuivre la réparation de son préjudice devant la juridiction civile.

Si le juge refuse d'homologuer les engagements de compensation d'intérêt public, ou si la personne morale décide d'exercer son droit de rétractation ou si, dans le délai convenu dans les engagements, la personne morale ne justifie pas de l'exécution intégrale des obligations fixées à sa charge, le procureur de la République retrouve alors la possibilité de mettre en mouvement l'action publique.

La prescription de l'action publique est suspendue durant le délai fixé dans les engagements de compensation d'intérêt public.

Le procureur peut convenir avec la personne des engagements de compensation d'intérêt public imposant la ou les obligations suivantes :

1° Verser une somme d'argent au Trésor public dont le montant est calculé de manière proportionnée aux avantages tirés des manquements constatés, dans la limite de 30 % du chiffre d'affaires moyen annuel calculé sur les trois derniers chiffres d'affaires annuels connus à la date du constat de ces manquements ;

2° Se soumettre, pour une durée maximale de cinq ans et sous le contrôle du service à compétence nationale chargé de la prévention et de l'aide à la détection de la corruption mentionné à l'article 1er de la présente loi, à un programme de mise en conformité destiné à s'assurer de l'existence et de la mise en œuvre en son sein des mesures et procédures listées au I de l'article 7 de la loi n°     du    relative à la transparence et à la modernisation de la vie économique.

Les frais occasionnés par le recours par le Service à des experts, personnes ou autorités qualifiés, pour l'assister dans la réalisation d'analyse juridique, financière, fiscale et comptable nécessaire à sa mission de contrôle sont supportés par la personne mise en cause dans la limite d'un plafond fixé dans les engagements de la compensation.

Exposé sommaire :

Le projet de loi que nous examinons doit nous permettre de donner plus d'efficience à notre système répressif pour lutter contre la fraude des entreprises.

L'inadéquation de notre système juridique pour en pratique réprimer la corruption transnationale ouvre par ailleurs une brèche dans notre souveraineté.

L'application extraterritoriale de leur droit par les États-Unis à nos entreprises trouve justement un fondement sinon légal en tout cas politique dans les manques de notre système répressif.

Par conséquent, nous proposons par le présent amendement de remédier à l'inefficience systémique de notre procédure pénale en spécifiant les conditions dans lesquelles la Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) trouve application dans le domaine des infractions concernées par la présente loi.

Le présent amendement introduit ainsi un mécanisme qui repose, en amont, sur une reconnaissance explicite du principe de leur responsabilité pénale par les agents économiques concernés.

Ce mécanisme de CRPC désormais éprouvé dans notre Code de procédure pénale donne un rôle plus actif aux auteurs de fraude. Surtout, la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité présente l'intérêt stratégique de la célérité, tout en ménageant une transparence à l'audience d'homologation, la place des parties civiles et leur droit à recours.

Pour reprendre les termes de Monsieur le Procureur François Molins au Dalloz, la CRPC « parce qu'elle permet d'aboutir à des sanctions plus sévères, se distingue (…) par une place beaucoup plus importante donnée à la défense et par une  intervention plus approfondie du magistrat du siège chargé d'homologuer ou de refuser d'homologuer les peines proposées par le ministère public et acceptées par le prévenu. Ces nouvelles procédures conduisent à centrer le débat judiciaire sur la peine acceptée et à permettre le prononcé de peines mieux adaptées et plus efficaces, car acceptées par l'auteur du délit, et à faire espérer un certain désengorgement des juridictions correctionnelles » (F. Molins, Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, Dalloz 2014).

Mentionner spécifiquement cette possibilité de procédure résout par ailleurs explicitement l'ambiguïté résidant dans le Code de procédure pénale, qui écarte l'application de cette CRPC aux procédures régies par des « lois spéciales ».

En somme, avec la CRPC sur ces sujets, nous exprimerons une volonté forte et pragmatique de lutter contre la corruption. C'est redonner sa substance à notre compétence souveraine sur le sujet et nos engagements internationaux, notamment vis-à-vis de l'OCDE et en particulier la Convention sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales de 1997.

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