Amendement N° 20 (Rejeté)

Prorogation de l'état d'urgence

(2 amendements identiques : 19 28 )

Déposé le 13 décembre 2016 par : M. Coronado, Mme Abeille, Mme Allain, Mme Attard, Mme Auroi, Mme Bonneton, Mme Duflot, M. Mamère, M. Noguès, M. Roumégas, Mme Sas.

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Supprimer cet article.

Exposé sommaire :

L'article 1erproroge l'état d'urgence jusqu'au 15 juillet 2017, période couvrant l'ensemble de la campagne électorale aboutissant à l'élection du Président de la République puis à celle des députés à l'Assemblée national, «afin de continuer à donner à l'autorité administrative, sur l'ensemble du territoire national, les moyens permettant de faire face à la persistance du péril imminent résultant d'atteintes graves et répétées à l'ordre public». La quatrième prorogation s'achevant le 22 décembre 2016 en application de l'article 4 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence.

Le 6 décembre, près d'un an et un mois après l'instauration de l'état d'urgence en France, la commission des lois de l'Assemblée nationale a bouclé un rapport qui pointe la dangerosité du dispositif de l'état d'urgence. Ce rapport de 141 pages sur le contrôle parlementaire de l'état d'urgence peut opportunément éclairer le débat sur le cinquième projet de loi de prorogation de l'état d'urgence.

De plus; compte tenu des nouvelles dispositions de droit commun votées par le Parlement dans le cadre de la loi n°2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale, il est d'autant plus inopportun de reconduire l'état d'urgence. En effet, plusieurs instruments juridiques, votés par le Parlement dans le cadre de la loi du 3 juin 2016 permettent aux services de sécurité et à la justice de faire face à la menace terroriste:

Le chapitre Ier du titre Ier du projet de loi a accru les prérogatives des magistrats spécialisés dans la lutte antiterroriste:

–les perquisitions de nuit dans les domiciles sont désormais autorisées en enquête préliminaire et en information judiciaire en matière terroriste (article 1er de cette loi) ;

–le parquet s'est vu reconnaître, sous le contrôle du juge des libertés et de la détention, des prérogatives quasiment équivalentes aux magistrats instructeurs, aussi bien en enquête de flagrance qu'en enquête préliminaire (article 4), leur permettant notamment d'avoir recours aux techniques de sonorisation et de captation d'images dans des lieux privés ou publics.

Les dispositions du projet de loi prévoyaient, par ailleurs, des mesures tendant à améliorer les conditions de la lutte contre le financement du terrorisme (chapitre IV du titre Ier).

Enfin, elles comportaient différentes mesures de police administrative, contenues dans le chapitre V du titre Ier, visant à renforcer les dispositifs de contrôle sur les personnes pour lesquelles existent des raisons sérieuses de penser que leur comportement est en lien avec des activités terroristes:

–le texte a modifié les articles 78-2-2 et 78-2-4 du code de procédure pénale permettant la mise en œuvre de contrôles d'identité afin d'autoriser également dans ces cas l'inspection visuelle et la fouille des bagages;

–il a créé une retenue administrative à l'article 78-3-1 du même code lorsqu'il existe, à l'égard d'une personne dont l'identité a été contrôlée ou vérifiée, des raisons de penser que son comportement est lié à des activités à caractère terroriste (article 48 de la loi);

–il a instauré un régime de contrôle administratif applicable aux personnes de retour sur le territoire national des théâtres d'opérations de groupements terroristes (article 52).

Les procédures judiciaires ouvertes, grâce aux dispositions de la loi du 3 juin 2016, permettront ainsi une lutte efficace contre la menace terroriste.

Par ailleurs, les rapporteurs du rapport d'information sur le contrôle parlementaire de l'état d'urgence aussi bien que la commission d'enquête sur les moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier 2015, partagent la conviction quela voie judiciaire est l'outil prééminent de la lutte antiterroriste.

Dans son rapport, M. Sébastien Pietrasanta note que« que toutes les auditions de notre commission se sont tenues pendant l'état d'urgence, force est de constater que les mesures prises pendant l'état d'urgence n'ont pas été évoquées par les spécialistes de la lutte contre le terrorisme comme jouant un rôle particulier dans celle-ci»

En outre, lors de l'examen du premier projet de loi de prorogation le 18 novembre 2015, M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur du texte, exprimait ainsi sa conviction: «Les mesures que nous allons décider ne dureront qu'un temps limité. Elles ne se comprennent d'ailleurs que par leur obsolescence programmée.» De même, le Conseil d'État rappelait dans son avis rendu le 6 février 2016 sur le projet de loi relatif à la deuxième prorogation que«l'état d'urgence reste un“état de crise” qui est par nature temporaire. Ses renouvellements ne sauraient par conséquent se succéder indéfiniment», conviction partagée par le Conseil constitutionnel lorsqu'il indique que les effets d'un régime de pouvoirs exceptionnels doivent"être limités dans le temps et l'espace» et que la durée de l'état d'urgence«ne saurait être excessive au regard du péril imminent[…] ayant conduit à la déclaration de l'état d'urgence»

Le Conseil d'Etat dans son avis du 8 décembre 2016, mais également dans ses avis du 2 février, du 28 avril, et du 18 juillet 2016 sur les projets de loi autorisant une deuxième, une troisième et une quatrième fois la prorogation de l'état d'urgence, rappelle également que les renouvellements de l'état d'urgence ne sauraient se succéder indéfiniment et que l'état d'urgence doit demeurer temporaire.

Or, l'état d'urgence décrété le 14 novembre 2015 s'inscrit désormais dans la durée. 14 mois, voire 20 si le Parlement vote la prorogation annoncée par l'exécutif afin de couvrir la période électorale à venir.

En outre, au-delà de la France, depuis le début des frappes aériennes contre Daech, les attaques terroristes se sont multipliées en Europe, notamment en Allemagne où la menace terroriste s'est intensifiée. Depuis juillet 2016, l'Allemagne a été visée par trois attaques terroristes. De plus, l'Allemagne s'apprête également à voterdans les prochains mois; l'élection présidentielle (12 février 2017) et les élections fédérales (en aout et en octobre 2017).

Pourtant, l'Allemagne n'a pas décrété l'état d'urgence etla législation allemande n'a pas de mécanisme similaire à l'état d'urgence.Les perquisitions administratives et les assignations à résidence ne sont pas d'actualité outre-Rhin.

De même, la Belgique a été la cible de plusieurs attaques à connotation terroriste pendant la même période. Mais l'article 187 de la Constitution belge de 1831 est clair: la Constitution ne peut être suspendue. Elle ne prévoit donc pas d'état d'urgence ou d'exception. Seule entorse, la situation de guerre ou de siège, régie par un arrêté-loi de la Première Guerre mondiale.

En somme, les menaces durables ou permanentes doivent être traitées, dans le cadre de l'État de droit, par les instruments permanents de la lutte contre le terrorisme, tels ceux issus des lois adoptées ces deux dernières années dans ce domaine.

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