Déposé le 25 mars 2013 par : Mme Boyer.
Supprimer cet article.
La nouvelle rédaction de l'article L. 2151‑5 du code de la santé publique adoptée en première lecture par le Sénat propose un bouleversement majeur des conditions de la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires. D'un régime d'interdiction assorti de dérogations, le texte propose un régime d'autorisation encadrée. Sans débat et sans raison, la majorité socialiste s'acharne avec la complicité du gouvernement à détruire les principes fondateurs de notre société. Le respect de l'embryon humain, au cœur du droit bioéthique français, est aujourd'hui menacé. Faut-il rappeler qu'en vertu de l'article 16 du Code civil ; « la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie » ? Comme le relève Jürgen Habermas, l'autorisation de conduire des recherches sur l'embryon transforme la perception culturelle de la vie humaine.
Lors des révisions de la loi bioéthique, en 2004 puis en 2011, le principe éthique essentiel d'interdiction de la recherche sur l'embryon avait été maintenu et réaffirmé et assorti de dérogations formant un compromis entre la reconnaissance de la dignité de l'embryon humain et la volonté de ne pas empêcher les avancées thérapeutiques rendues possibles par la recherche scientifique.
Le renversement au profit d'un principe d'autorisation est loin d'être anodin. La promotion de la recherche sur l'embryon ainsi opérée par la majorité socialiste et le gouvernement, qui s'est faite sans organisation d'états généraux de la bioéthique pourtant prescrits par la loi de 2011 comme préalable à toute modification, est d'autant plus inacceptable que l'expertise scientifique a prouvé que les cellules souches non-embryonnaires dépassent aujourd'hui les cellules souches embryonnaires.
En effet, les cellules souches adultes et de sang du cordon permettent d'ores et déjà de soigner des pathologies via la thérapie cellulaire. En ce qui concerne la modélisation de pathologies et le criblage de molécules, les cellules souches IPS ont le même potentiel que les cellules souches embryonnaires.
Dès 1991, les travaux de Marie-Louise Labat (CNRS) et de son équipe montraient la présence dans le sang d'une cellule souche capable de former différents tissus, vraisemblablement pluripotente. Récemment, en France également (Blood, septembre 2011), l'équipe du professeur Luc Douay (hôpital Saint-Antoine, université Pierre-et-Marie-Curie) obtient des globules rouges à partir de cellules souches de sang de cordon ou de moelle osseuse. Les travaux des professeurs Yamanaka et Gordon, entrepris en 2006 et couronnés par le prix Nobel le 8 octobre 2012, et rendant possibles la reprogrammation de cellules sanguines ou cutanées en cellules semblables à des cellules souches embryonnaires prouvent à quel point la recherche sur les cellules embryonnaires est désormais supplantée par les cellules non-embryonnaires ; plus de vingt lignées ont été obtenues et un institut, l'iPS Core, créé à Harvard, leur est consacré. Les pathologies concernées sont la maladie de Parkinson, le diabète, la maladie de Huntington, la trisomie, la maladie de Gaucher, la dystrophie de Duchenne, etc.
Ces progrès extraordinaires concernant les cellules souches adultes ou induites et leurs possibles applications thérapeutiques, ou encore la vitrification des ovocytes autorisée depuis le 27 janvier 2011 et qui va enfin mettre un terme à la production d'embryons humains surnuméraires, sont pourtant totalement ignorés par la proposition de Loi passéiste de la majorité socialiste. Force est de constater qu'il s'agit d'une démarche purement idéologique, se faisant au prix de lourds risques de dérives et d'instrumentalisation.
Avant même d'envisager toute modification des conditions de la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires, et a fortiori d'opérer un tel bouleversement du principe d'interdiction, il faut avant tout organiser des états généraux de la bioéthique, un débat public ouvert à tous sous la forme de forums citoyens comme le gouvernement précédent en avait organisé notamment à Marseille en 2009. Quant aux innovations de la recherche sur les gamètes, leur conservation et sur la fécondation in vitro, l'objectif doit être de permettre aux biologistes et aux gynécologues-obstétriciens d'évaluer les innovations susceptibles d'améliorer les résultats de l'assistance médicale à la procréation. L'Agence de Biomédecine doit conduire ces évaluations afin que ces innovations soient connues, reconnues et promues dans notre pays. Sans cela, légiférer sur les conditions de recherche sur l'embryon, en dehors de toute expertise sur les nouvelles techniques, n'a pas de sens.
Dans ce contexte et pour toutes les raisons ainsi exposées, il est défendu la suppression de l'article unique de la proposition de Loi tendant à modifier la loi n°2011‑814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique.
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