Amendement N° 10 (Rejeté)

Protection de l'enfant

Déposé le 11 mai 2015 par : M. Ciotti, M. Mariani, M. Douillet, M. de Mazières, M. Hetzel, M. Guillet, M. Perrut, M. Gilard, Mme Fort, Mme Genevard, M. Cinieri, Mme Le Callennec, Mme Boyer.

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I. – A. – Il est institué, à compter de 2015, un prélèvement sur les recettes de l'État au bénéfice des départements.

B. – Le montant de ce prélèvement est égal aux dépenses contractées par les départements au cours de l'année précédant la répartition au titre de la mise à l'abri, de l'évaluation de la situation et d'orientation des jeunes se présentant comme mineurs isolés étrangers, déduction faite des charges déjà assumées par l'État. Il comprend également la prise en charge des mineurs isolés étrangers au sein des établissements et services relevant du 1° du I de l'article L. 312‑1 du code de l'action sociale et des familles lorsque le coût de celle-ci excède un seuil fixé par arrêté interministériel.

C. – Ce montant est réparti entre les départements en proportion des dépenses engagées à ce titre.

D. – Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent I.

II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Exposé sommaire :

Les conditions actuelles de la prise en charge des mineurs isolés étrangers par les départements n'est pas satisfaisante.

En application de la Convention internationale des droits de l'enfant, du droit européen relatif à l'asile, à l'immigration et à la traite des êtres humains et du droit national, les MIE doivent, en effet, être accueillis sur le territoire national et protégés. Depuis l'origine, l'accueil et la prise en charge des mineurs isolés étrangers ont été pour l'essentiel assurés par les conseils généraux, dans le cadre de la protection de l'enfance.

Cette pratique a été implicitement confirmée par la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance laquelle dispose que « la protection de l'enfance a également pour but de prévenir les difficultés que peuvent rencontrer les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leurs familles et d'assurer leur prise en charge » (art. L. 112‑3 du code de l'action sociale et des familles). Cette disposition a été interprétée – de manière extensive – par l'État comme justifiant la prise en charge des mineurs isolés étrangers par les conseils généraux dès leur arrivée ou leur recueil sur le territoire national.

Le nombre des MIE sur le territoire national n'a, à la suite, cessé d'augmenter, tout comme leur durée de séjour dans les structures d'accueil de l'aide sociale à l'enfance, relevant des compétences des départements. Le suivi de ce phénomène par le ministère de la Justice démontre, à cet égard, qu'il a été nettement sous-évalué, avec une estimation annuelle de plus de 4000 nouveaux entrants, compte non tenu de ceux déjà recueillis au titre de la protection de l'enfance.

Dans les Alpes-Maritimes, le coût annuel global de cette prise en charge n'a cessé d'augmenter, passant de 3,3 millions d'euros en 2011 à 6,5 millions d'euros en 2014. Le coût de la prise en charge d'un MIE à l'aide sociale à l'enfance peut ainsi atteindre plus de 90 000 € par an.

Chargés de veiller à l'intérêt supérieur des enfants recueillis sur leur territoire ou qui leur sont confiés par la Justice, les présidents de conseils généraux voient ainsi leur responsabilité directement engagée, faute de disposer :

- de capacités d'accueil suffisantes pour répondre, de manière adaptée, à l'ampleur de l'arrivée de ces mineurs isolés étrangers. Un arrêt du Conseil d'État, en date du 30 janvier dernier, a ainsi partiellement annulé une circulaire du Ministre de la Justice, Garde des Sceaux prévoyant « un dispositif d'orientation nationale visant à mieux répartir la charge de l'accueil de ces mineurs entre les différents services d'aide sociale à l'enfance » au motif que les critères retenus devaient être fixés par la loi et qu'il n'était pas tenu compte de la capacité d'accueil des départements pour leur orientation nationale par les services de l'État ;

- de moyens financiers suffisants pour procéder à un accueil matériel et un accompagnement socio-éducatif adaptés de ces mineurs isolés étrangers. En effet, la participation de l'État – qui reconnaît ipso facto sa responsabilité dans ce dossier - est strictement limitée à un forfait équivalent au financement des cinq premiers jours du recueil et de l'évaluation des MIE (250 €/jour) alors que l'essentiel de la charge financière pour les départements concerne l'accueil de longue durée de ces mineurs à l'aide sociale à l'enfance, souvent jusqu'à leur majorité, parfois au-delà dans le cadre des contrats jeunes majeurs.

- de compétences pour recueillir de manière fiable les éléments probants sur l'état civil, sur le pays d'origine, sur la situation administrative et familiale du MIE, sur son parcours de vie et sur la réalité de son isolement, volontaire, subi ou provoqué.

Seul l'État français, responsable des flux migratoires sur le territoire national, est, en effet, en capacité d'échanger, dans le respect des règles et des traités internationaux, avec le pays d'origine.

De même qu'il a reconnu sa responsabilité première dans la prise en charge du coût de l'accueil et de l'évaluation des MIE, au cours des cinq premiers jours suivant leur recueil par les départements, l'État devrait également assumer la prise en charge financière des MIE confiés par décision de justice, à l'issue de la phase d'évaluation, à l'aide sociale à l'enfance des départements. L'État ne peut se désintéresser du phénomène des mineurs isolés étrangers, qui relève directement de ses compétences régaliennes, donc d'un traitement national reposant sur la solidarité nationale.

À la suite de l'arrêt du Conseil d'État du 30 janvier 2015, précité, le Gouvernement a annoncé qu'il entendait légiférer afin de maintenir un dispositif répartissant la prise en charge des MIE entre les départements, alors même que celui-ci a pour effet de transférer sans compensation financière des compétences relevant de l'État. Comme le soulignait Mme la sénatrice Isabelle Debré, dans un rapport sur les mineurs isolés étrangers, « l'État est concerné au titre de la maîtrise des flux migratoires, la lutte contre l'immigration clandestine et les trafics d'êtres humains, la justice des mineurs. »

Dans ce contexte, plutôt que d'organiser la répartition des MIE sur tout le territoire pour tenter d'équilibrer les charges indûment et inégalement supportées par les seuls départements au titre de la protection de l'enfance, l'État, à défaut d'exercer directement cette compétence, devrait leur attribuer les moyens financiers pour y faire face.

Ainsi, le présent amendement prévoit la création d'un prélèvement sur recettes couvrant la prise en charge des mineurs isolés étrangers accueillis au sein des services de l'ASE.

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