Déposé le 14 mars 2016 par : M. Cinieri, M. Leboeuf, M. Vitel, M. Lazaro, M. Salen, M. Furst, M. Fromion, M. Morel-A-L'Huissier, M. Abad.
Supprimer l'alinéa 12.
L'article 2 du projet de loi-cadre Biodiversité entend ajouter un principe de solidarité écologique aux principes énoncés à l'article L. 110‑1 du code de l'environnement.
Ce principe de solidarité écologique, qui introduit une solidarité entre les êtres vivants, dont l'Homme, les écosystèmes, et les milieux naturels ou aménagés, présente un caractère nébuleux propice à interprétations, le rendant juridiquement contestable et d'autant plus problématique qu'il est appelé à être pris en compte avant toute décision publique.
1. Tel qu'édicté, le principe de solidarité écologique ne répond pas aux objectifs de l'article L. 110‑1, à savoir énoncer les principes directeurs du droit de l'environnement, dotés d'une portée juridique clairement identifiable et destinés, dans une visée opérationnelle, à inspirer les législations sectorielles, qui en préciseront la portée. Ce principe de solidarité écologique apparaît incantatoire ou déclaratoire et non pas à vocation normative, de sorte qu'il n'a pas sa place dans l'article visé. D'ailleurs, contrairement à ce qu'indique l'exposé des motifs de la loi, le principe de solidarité écologique, en tant que grand principe d'interaction entre les activités humaines et la biodiversité, n'existe à ce jour dans aucune réglementation. La législation sur l'eau n'évoque que la solidarité financière ou territoriale des bassins. Quant à la solidarité écologique au sens de la législation des parcs nationaux, elle est évoquée en référence à deux espaces géographiques (le cœur du parc et ses espaces), ce qui correspond à une solidarité biologique aisément appréhendable.
2. En ce sens, le principe de solidarité écologique méconnait aussi l'exigence constitutionnelle de normativité de la loi (Cons. Const. n° 2005‑512 DC 21 avril 2005), de même que celle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi (Cons. Const. n° 99‑421 DC 6 décembre 1999).
3. De plus et surtout, si le principe de solidarité écologique a pour objet d'asseoir la nécessité de concilier développement économique et biodiversité, alors force est de constater qu'il serait dénué d'effet utile dès lors que préexiste à cet égard le principe de développement durable, figurant à la fois dans la Charte de l'environnement et à l'article L. 110‑1. Le principe de développement durable (art. 6 de la Charte) parait en outre plus équilibré dans la prise en compte des trois piliers, économique, environnemental et social, tandis que la solidarité écologique sous-tend une primauté de l'écologie sur les activités humaines et les enjeux socio-économiques.
4. Enfin, le principe de solidarité écologique est facteur d'insécurité juridique pour les porteurs de projets : d'une part, ces derniers ne sont pas en mesure de déterminer les contraintes découlant de ce principe et d'autre part, l'incertitude liée à cette notion fait peser un doute sur la validité des décisions dont ils bénéficient et qui sont supposées prendre en compte un tel principe. A cet égard, outre le risque non négligeable d'une multiplication des contentieux, cela revient à abandonner au juge le soin de définir a posteriori les contours de cette notion.
Par conséquent, il est proposé de supprimer l'introduction du principe de solidarité écologique à l'article L. 110‑1 du code de l'environnement.
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