Déposé le 3 octobre 2016 par : M. Molac, M. de Rugy, M. Alauzet, M. Cavard, M. François-Michel Lambert, Mme Massonneau.
Rédiger ainsi cet article :
« Le décret du 2 thermidor an II (20 juillet 1794) est abrogé. »
Cet amendement propose l'abrogation du décret du 2 Thermidor An II (20 juillet 1794), sur l'emploi de la langue française.
L'abrogation de ce texte anachronique, comme l'arrêté consulaire du 24 Prairial an XI, bien que considéré comme suspendu par les historiens, est souhaitable car toujours considéré comme valide par l'appareil judiciaire (courrier du procureur de la République au maire de Rennes, 5 avril 2011) ainsi que par le ministère de la justice lui-même (courrier de M. Michel Mercier à M. Jean-Jacques Urvoas, 7 juillet 2011, et plus récemment circulaire du 23 juillet 2014 relative à l'état civil), ces derniers se basant sur celui-ci pour justifier des mesures d'interdiction de documents administratifs bilingues, tels que des livrets de famille français-breton qu'une cinquantaine de communes voulaient délivrer.
Il est choquant que l'administration centrale recoure à notre époque à ce type de texte instaurant la « Terreur linguistique ».
En effet, si l'article premier de la loi « Toubon » du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française, indique, sur le fondement de l'article 2 de la Constitution, que la langue française est la langue des services publics, son article 21 précise dans le même temps que « les mesures garantissant l'emploi de la langue française s'appliquent sans préjudice de la législation et de la réglementation relatives aux langues régionales de France et ne s'opposent pas à leur usage ».
Le Conseil constitutionnel a lui-même précisé, dans sa décision n° 94 345 DC du 29 juillet 1994, que la loi n'avait pas « pour objet de prohiber l'usage de traductions lorsque l'utilisation de la langue française est assurée ». La traduction et l'usage d'autres langues sont ainsi possibles, dès lors que sont garanties l'inscription, la prononciation et la diffusion en français des informations dont il est indispensable qu'elles soient comprises sans ambiguïté par tous.
Il est dès lors fort étonnant que des textes vieux de plus de deux siècles, considérés comme suspendus, s'imposent à la lecture de notre actuelle Constitution et d'une loi promulguée il y a une vingtaine d'année, d'autant plus que la traduction de la langue française sur les passeports est permise.
Ainsi, plutôt que d'atténuer la portée de ce décret dans une intention louable mais qui aurait pour but de légitimer un texte qui ne devrait plus avoir de portée juridique, notamment ses articles 3 et 4 instaurant une peine de prison de six mois et une destitution des fonctionnaires contrevenant au décret, il est proposé de l'abroger purement et simplement. Cela permettra ainsi de mettre fin à une insécurité juridique pour la publication volontaire de documents officiels et d'état civils en version bilingue, pourtant reconnue comme possible en 2016 par le Conseil constitutionnel, étant entendu que seule la version en langue française aurait valeur officielle et que la traduction en langue régionale ferait simplement office d'usage.
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