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...s pénales atteint à peine 10 000, selon l’Observatoire national de la délinquance. Cela revient à dire, mes chers collègues, et il s’agit là d’un fait à méditer, que dans notre pays seules 5 % des agressions sexuelles débouchent en définitive sur une condamnation par les tribunaux. Bien sûr, les explications à cet état de fait sont multiples, mais l’une des plus déterminantes tient aux délais de prescription de l’action publique. Ces délais, quoique déjà dérogatoires du droit commun, privent en effet encore trop de victimes de la possibilité d’obtenir justice. C’est le cas notamment lorsqu’elles ont été frappées par ce que l’on nomme une amnésie traumatique, c’est-à-dire une amnésie qui empêche la victime d’avoir conscience des faits subis. Cette pathologie ne se dissipe parfois que plusieurs décenn...
...s progrès de la police technique et scientifique et du suivi médical des enfants victimes d’agression, il peut être possible de prouver des faits trente ans après qu’ils ont été commis. Ces nouveaux délais que nous proposons changent tout pour les victimes. Deuxième argument, le caractère circonscrit de ce texte, qui commanderait de le rejeter au profit d’une réforme plus générale du droit de la prescription, que l’on attend depuis la publication il y a plus de sept ans du rapport présenté par les sénateurs Hyest et Portelli, une réforme dont on ne connaît à ce jour ni les contours ni le calendrier. C’est pourtant la force de cette proposition de loi que d’apporter à un problème précis et identifié, une réponse à la fois simple, concrète et immédiate, qui constitue non pas une révolution mais une sim...
...ntribuons à écrire respecte notre Constitution et les valeurs de notre République, mais ces considérations ne doivent pas nous faire oublier les réalités humaines que notre droit accompagne. Les débats autour de ce texte ont soulevé quelques réticences de la part de certains collègues, des réticences légitimes d’un point de vue technique ou politique. En effet, les délais et les conditions de la prescription ont été plusieurs fois modifiés, que ce soit par le législateur ou par des arrêts de la Cour de cassation. Oui, il sera peut-être nécessaire de remettre à plat l’ensemble des délais de prescription et de les rendre plus clairs, que ce soit pour le magistrat ou la victime, et c’est la raison pour laquelle nous saluons la création d’une mission d’information transpartisane que conduiront Alain Tou...
Pourrait-on refuser ce texte sous prétexte qu’une victime d’agression sexuelle serait soumise aux mêmes délais de prescription qu’une victime de crime de guerre ? L’allongement du délai de prescription qui nous est proposé n’a pas pour but d’accentuer le caractère délictueux de l’agression sexuelle. Il n’a pas pour but non plus de reconnaître la même gravité à l’agression sexuelle et au crime de guerre, comme certains débats techniques peuvent parfois le laisser entendre. Il a pour but de reconnaître le traumatisme des ...
...disent, l’amnésie post-trauma est longue, particulièrement quand les violences ont lieu dans l’enfance, et les chiffres sont accablants : la majorité des agressions sexuelles concernent des enfants, soit près de 150 000 cas par an, la plupart du temps dans le cadre familial. Ces éléments font de l’agression sexuelle et du viol des infractions particulières, qui demandent légitimement un délai de prescription suffisamment long. Les victimes ont besoin d’être reconnues comme telles. Aujourd’hui, certaines d’entre elles peuvent être entendues en qualité de simple témoin. Si elles peuvent témoigner dans une procédure à l’encontre de leur agresseur engageant une autre victime, elles ne peuvent faire valoir leur droit légitime à réparation. Vous comprendrez comme moi que cela est difficile pour ces personn...
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les problèmes de prescription sont des problèmes difficiles. Faut-il ou ne faut-il pas admettre le principe de la prescription ? Rien ne va de soi en la matière car, finalement, admettre la prescription, c’est admettre l’impunité pour un certain nombre de crimes et de délits. La France a toujours admis le principe de la prescription. C’est un droit à l’oubli, non un droit à l’impunité. Ce droit à l’oubli vient en général sa...
Je ne le pense pas et je vais vous expliquer pourquoi. Plus l’on multiplie les lois sur la prescription, moins on peut assurer la sécurité juridique. Chacun a le droit de savoir exactement ce qu’il encourt quand il commet une infraction et, lorsque vous changez les systèmes de prescription, lorsque vous additionnez les lois, plus personne ne sait exactement ce que vous encourez et pendant combien de temps vous êtes susceptible d’être poursuivi.
Telle est la réalité des choses. Il y a un principe absolu, c’est le droit à la sécurité juridique. La loi a prévu tout un système en matière de prescription. Il y a imprescriptibilité pour les crimes contre l’humanité et de génocide. Le code militaire prévoit également un certain nombre d’imprescriptibilités, notamment en cas de désertion. Il y a imprescriptibilité pour le crime le plus odieux, le plus affreux que l’on puisse imaginer, le crime contre l’humanité, qui est l’enfant de la Shoah, celui qui a permis de poursuivre tous les criminels nazis...
...uit ans, c’est une éternité, et cela revient à abaisser la notion de crime contre l’humanité. Cette proposition de loi, même si je la comprends, même si, dans le contexte de l’émotion, la question peut être posée, affaiblit en réalité notre système d’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité, et c’est la raison pour laquelle je propose qu’une vaste réflexion soit menée sur l’ensemble de la prescription, ce que le président de la commission des lois, M. Urvoas, nous a demandé à Georges Fenech et à moi-même de faire. Je crois qu’il faut repenser totalement la question de la prescription, fusionner nos deux systèmes et allonger globalement la période pendant laquelle on pourra poursuivre. Si nous ne clarifions pas les choses, nous réduirons, que nous le voulions ou non, la possibilité pour le cit...
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cette proposition de loi présentée par le groupe UDI pose la question juridique délicate de la prescription de l’action publique. Cette extinction de l’action publique est normalement acquise au terme d’un an en matière contraventionnelle, de trois ans en matière délictuelle et de dix ans en matière criminelle. Cependant, la loi fixe des délais plus longs ou plus courts pour certains crimes ou délits. Le point de départ du délai de prescription, qui est traditionnellement fixé au lendemain du jour de ...
En effet, il n’est pas certain qu’un refus d’instruire pour cause de prescription soit moins traumatisant qu’un non-lieu prononcé faute de preuves suffisantes. Du point de vue de la victime, il n’y a pas a priori une option meilleure qu’une autre. Les victimes de L’École en bateau qui se sont vu opposer la prescription parlent, quant à elles, de double peine. Elles auraient incontestablement préféré voir leur dossier instruit. Du reste, il faut savoir faire confiance à notre j...
…même si nous considérons que le droit de la prescription mériterait une réforme globale pour être préservé des revirements législatifs successifs.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, chers collègues, nous écrivons la loi pour assurer une protection réelle, efficace et durable à tous nos concitoyens. Certes, il faut revoir le droit des prescriptions, et il est très urgent de le faire, mais pas sous le coup de l’empressement. Gardons-nous de paver l’enfer de nos bonnes intentions. Promettre d’improbables réparations n’équivaut pas à sécuriser les victimes : c’est un leurre irresponsable et dangereux. Le groupe UDI nous propose de rallonger la prescription de tous les crimes et délits sexuels commis lorsque la victime, homme ou femme – je ti...
...iste, considère que tout crime ou délit sexuel doit, par sa nature, être imprescriptible. Or, rien ne démontre en quoi un crime ou un délit sexuel est plus exceptionnel qu’un assassinat, au point d’équivaloir à un crime contre l’humanité, seul crime imprescriptible en droit français du fait même de son caractère exceptionnel. La deuxième logique, moins-disante, prétend établir un nouveau délai de prescription augmenté de dix ans par rapport à l’état du droit. Cette rallonge arbitraire s’exempte d’explications quant au sens de ces dix années. Pourquoi ne pas augmenter le délai de quinze ans ou de vingt ans, dans ce cas ? La troisième logique, qui est la mienne en tant que responsable de ce texte pour le groupe socialiste, est la suivante : nous devons refonder le droit de la prescription pénale.
Ce point fait l’unanimité. Mais nous devons le faire à l’issue d’un processus législatif global, responsable et complet. Ce texte, mal ficelé dès le départ et mal reficelé à l’arrivée, ne répond que mal ou très mal aux enjeux contemporains du droit de la prescription. De fait, il fait courir deux risques majeurs aux victimes. Le premier consiste à leur faire croire que cette loi réglera leur drame et réparera toutes les injustices enfouies. J’entends ce besoin de justice, de reconnaissance et de réparation des victimes, mais aussi des associations qui les accompagnent si bien. Ce désir de justice est d’autant plus inextinguible que la prise de conscience du ...
En effet, si nous votons ce texte, il n’y aura désormais plus aucun lien entre la gravité de l’infraction, les peines encourues et la durée de prescription de l’action publique. Ce non-respect du principe de proportionnalité fait encourir le risque d’une censure, d’autant que l’augmentation des délais de prescription ne concerne dans le texte que les victimes mineures, créant réellement une rupture d’égalité. De plus, comment accepter qu’un assassinat, puni de la réclusion criminelle à perpétuité, soit prescrit au bout de dix ans, quand la consultat...
Certes, le droit de la prescription est devenu complexe et confus, au point de frôler l’incohérence, avec six lois dérogatoires. En 2007, trois sénateurs – deux du groupe UMP et un socialiste –, ont déposé un rapport qui dénonçait cette incohérence et faisait apparaître la nécessité de refondre globalement le droit de la prescription. Aux victimes, à toutes les victimes, nous devons une solution raisonnable et sûre, non pas des fau...
Mes chers collègues, vous ne pouvez pas souhaiter une remise à plat, aggraver un droit arrivé tout à fait au bout de sa logique et voter une proposition de loi qui montre tragiquement ses limites. Vous devez choisir de repousser cette proposition de loi pour redonner une chance réelle au droit de prescription et apporter in fine une réponse adaptée aux attentes très légitimes de toutes les victimes.
Madame Capdevielle, il est un peu décalé, me semble-t-il, de mettre aujourd’hui en balance la question – bien réelle et sur laquelle il faudra travailler – du droit général des prescriptions en matière pénale et un sujet que tout le monde, à commencer par vous-même, reconnaît comme étant important, à cause du nombre de victimes qu’il implique et de drames qu’il suppose : la capacité de la justice à rendre justice aux victimes d’agressions sexuelles. Le travail parlementaire autour de ce texte a commencé au Sénat, où il a réuni de très nombreux sénateurs, y compris des sénateurs soc...