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...oue. Pour beaucoup, la mort est donc insensée – elle n’a littéralement plus de sens – voire, malheureusement, impensée. Le déni et le tabou de la mort n’ont jamais été aussi présents que dans notre société moderne. Parallèlement, grâce aux progrès de la science, la mort s’est peu à peu médicalisée. Elle intervient le plus souvent à l’hôpital, perdant ainsi son caractère familial et familier. La médecine française a fait le choix, légitime, de la performance et de la médecine qui sauve et qui guérit, mais parfois aux dépens de la médecine qui accompagne et qui soulage. Il en résulte que la médecine fait naître quelquefois des situations d’une rare complexité et qui entraînent des souffrances importantes, voire insupportables pour le patient, pour son entourage et pour la société toute entière. ...
...la loi actuelle, et combien il est utopique d’imaginer qu’une loi puisse régler l’ensemble des problèmes liés à la diversité des situations de fin de vie. Enfin, il met en garde contre le danger de franchir la barrière d’un interdit. Dans son avis no 121, le CCNE estime que la légalisation du suicide assisté n’est pas souhaitable. Il considère en effet que le maintien de l’interdiction faite aux médecins de « provoquer délibérément la mort » protège les personnes en fin de vie, et qu’il serait dangereux pour la société que des médecins puissent contribuer à « donner la mort ». Il estime par ailleurs dans son dernier rapport que l’assistance au suicide ne peut en aucun cas remédier à l’absence de soins palliatifs ou d’un accompagnement réel. Dans le cadre de la mission que vous nous avez assigné...
...ombre, d’incertitude, même réduite par le science, n’est-elle pas en définitive celle que réclame, qu’exige, au-delà du savoir, le respect de la vie et de sa fin comme énigme ou comme mystère ? Ne peut-on aussi, au nom de la dignité, assumer cette incertitude ? Et c’est pour cela qu’en légalisant le « suicide assisté », il me semble que l’on consentirait à la société, fût-elle représentée par le médecin, un droit sur l’existence même de chacun qui outrepasse largement le respect, pourtant souhaité par tous, de chaque personne. C’est aussi pour cela, mes chers collègues, que nous ne suivrons pas une telle proposition et que nous n’irons pas au-delà des dernières préconisations du rapport de MM Claeys et Leonetti.
...r le respect de l’intimité. Les pires violations de l’intimité, ce sont ces procédures judiciaires autour de malades maintenus artificiellement en vie, ce sont ces douleurs et ces interrogations jetées sur la place publique, ce sont ces vies devenues le centre de toutes les attentions, de tous les voyeurismes. Il y a aussi des violations moins visibles, mais tout aussi insupportables, quand les médecins légitimement hésitent, quand les familles et les proches se déchirent autour de patients en fin de vie dont on tente d’interpréter la volonté, faute de directives anticipées, faute de désignation d’une personne de confiance – je rappelle que seuls 2 % de nos compatriotes ont rédigé des directives anticipées. En se saisissant de ces questions, en confiant à nos collègues Jean Leonetti et Alain C...
...ant à garantir le droit à l’accès aux soins palliatifs ». Ce texte est devenu, sous ce même intitulé, la loi du 9 juin 1999. Dans certains cas cependant, les soins palliatifs ne parviennent pas à soulager la douleur du patient. La seconde avancée fut la loi Leonetti, qui consacre le droit du patient de refuser ou d’arrêter un traitement, même si cela met sa vie en danger, et l’obligation pour le médecin de respecter sa volonté. Cette loi admet donc le « laisser mourir » par l’arrêt des traitements. Mais elle continue à interdire le « faire mourir », le fait de donner la mort par une démarche active et non plus passive…
...veut dire lutte, angoisse. Faudrait-il nécessairement partir dans la détresse et la douleur ? L’agonie ne doit pas être une étape obligée avant la mort. L’objectif est au contraire de permettre au mourant de partir sans souffrir davantage. Changer la mort : tel est le tire du livre publié en 1977 par le professeur Léon Schwartzenberg et qui plaidait pour une fin de vie apaisée et digne, pour une médecine secourable. Assister ceux qui sont arrivés au bout du chemin et qui souffrent intensément, cela relève de la compassion, de l’humanité, de la fraternité. La vraie fraternité, celle qui continue jusqu’au dernier instant.
...ens quand ils font le constat d’un accès trop restreint aux soins palliatifs, de fortes inégalités territoriales, d’inégalités dans l’accès aux soins palliatifs selon les services hospitaliers, d’une offre insuffisamment développée dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, de la quasi-absence de soins palliatifs à domicile, d’une formation insuffisante des médecins et d’un cloisonnement entre les soins curatifs et palliatifs. Face à cette situation, ils proposent des précisions, qui recoupent du reste les propositions du Comité consultatif national d’éthique et que, globalement, nous partageons – je pense notamment à l’administration d’une sédation profonde et continue jusqu’au décès, qui doit devenir un acte obligatoire pour le médecin dans trois situati...
...omité national d’éthique, prend en compte la globalité de la personne humaine et préconise « la prise en charge financière et l’accompagnement humain des personnes malades et handicapées, l’accès équitable aux soins palliatifs, non seulement en fin de vie, mais chaque fois qu’un besoin de soulagement s’exprime, la mise en place des soins palliatifs à domicile, le développement de la formation des médecins et de la recherche dans le domaine de la fin de vie, l’attention portée à la place des personnes âgées dans la société et la vigilance à l’égard de leurs droits, et l’aide aux aidants familiaux et aux proches ». C’est cette dernière approche que je partage et que je soutiens. J’ai conscience que le choix de tout mettre en oeuvre pour que les personnes en fin de vie n’en soient pas réduites à so...
...que a depuis lors demandé au professeur Sicard de rédiger un rapport, puis au Comité consultatif national d’éthique d’émettre un avis et d’organiser un débat citoyen. C’est forts de ces analyses et des nombreuses auditions que Jean Leonetti et moi-même avons menées que nous souhaitons voir notre législation se recentrer sur les nouveaux droits des malades, et non plus seulement sur le devoir des médecins, dans une filiation assumée et revendiquée avec la loi de 2002. Il n’est pas, dans ce domaine, de vérités. Culture, histoire, convictions philosophiques ou religieuses font et défont les opinions collectives, mais aussi individuelles. Ce débat, je l’ai eu avec Jean Leonetti tout au long de notre mission. Il est médecin et je ne le suis pas ; il est sur les bancs de l’opposition et je ne le sui...
...ise aujourd’hui à rattraper notre retard collectif. Oui, mes chers collègues, la société nous a devancés ; son rapport à la mort nous oblige à aligner la loi sur la demande de nos concitoyens. Ce mouvement, inéluctable, est la résultante tout à la fois de bouleversements historiques et de progrès techniques. La fin des grands conflits, la disparition des grandes épidémies grâce aux progrès de la médecine ont contribué à nous éloigner de la mort. De massifiée, elle est devenue individuelle, sans être, paradoxalement, moins anonyme parfois. Parallèlement, la mort, au travers de la montée en puissance de la société de l’image, s’est en quelque sorte virtualisée. Le mouvement de baisse de la mortalité, quant à lui, s’il n’est pas récent, continue de se poursuivre. Ainsi avons-nous compté en 2013 ex...
...ive. Cela passe notamment par un plan de développement des soins palliatifs, ambitieux dans ses objectifs mais surtout par les moyens humains et financiers qui seront dévolus à sa mise en oeuvre. Le développement d’une culture palliative passe aussi par la formation, tant initiale que continue, des personnels soignants. Il suppose également, comme le rapport Sicard le souligne, un exercice de la médecine qui en appelle à une conception unifiée et continue du soin, intégrant curatif et palliatif. Cela passe enfin par une réflexion sur l’évolution de notre politique de soins, qui doit intégrer les actes d’accompagnement dans la tarification médicale. S’agissant des directives anticipées, j’ai quelques interrogations. Comment ne pas enfermer une personne dans une volonté qui peut varier au cours d...
Peut-on vraiment se mettre à la place du malade que l’on sera quand on ne l’est pas encore ? Que savons-nous de ce que nous penserons, de ce que nous ressentirons lorsque nous vivrons réellement le moment de quitter ce monde ? Ne risque-t-on pas, par ailleurs, en rendant ces directives trop contraignantes, de compliquer et d’altérer le dialogue indispensable entre le médecin, d’une part, et le malade et sa famille, d’autre part ? Plus largement, nous devons aussi nous interroger sur la toute-puissance qui serait ainsi accordée à la volonté individuelle. Nous le savons, l’éthique de l’autonomie, quand elle n’a pas de limite, peut étouffer l’éthique de la vulnérabilité, cette éthique de la vulnérabilité qui nous conduit à penser et à agir en fonction de nos fragilités...
...ls je participe, qui me demandent, par courrier, postal ou électronique, ou sur les réseaux sociaux, de porter leur voix au Parlement. Ces personnes me rappellent chaque jour le sens de mon engagement. Je tiens à les en remercier. Ce matin, en commission des affaires sociales, nous examinions la proposition de loi sur laquelle je travaille depuis deux ans, pour laquelle j’ai auditionné juristes, médecins, infirmiers, sociologues, associations de toutes obédiences. C’est vous dire à quel point je salue la tenue de ce débat aujourd’hui, à quel point je suis satisfaite de voir l’engagement no 21 du Président de la République sur la voie de recevoir enfin une traduction législative. Cependant, comme mon collègue François de Rugy et beaucoup d’entre vous, j’ai la conviction que la proposition qui no...
...pratiquées dans le secret, dans la clandestinité, dans l’illégalité, alors qu’elles sont une geste d’humanité ? Ou bien doit-on condamner l’humanité ? Même les tribunaux ne le font plus. Il faut aujourd’hui une loi qui plonge ses racines dans le meilleur de notre République ; une loi qui donne la liberté ; une loi qui permette l’égalité ; une loi qui incarne la fraternité. Personne, pas même un médecin, ne doit pouvoir nous confisquer le droit de choisir nous-mêmes les conditions de notre propre mort.
... s’agissait, conformément à l’engagement pris par François Hollande pendant la campagne électorale, de définir le droit à une assistance médicalisée en vue de terminer sa vie dans la dignité. Qu’on y soit favorable ou non, force est de reconnaître que ce rapport comporte deux avancées majeures. La première vise à garantir le respect des décisions du malade, en plaçant le patient, et non plus le médecin, au coeur du dispositif. En effet, dans l’état actuel du droit, les directives anticipées ne s’imposent pas au corps médical. Elles auront désormais un caractère contraignant : c’est la première avancée. La seconde, c’est l’apaisement des souffrances par la sédation profonde et continue jusqu’à la mort. C’est une réponse. En conscience, elle me semble positive mais insuffisante au regard des asp...
...ésidente, monsieur le Premier ministre, madame la ministre, chers collègues, le rapport, comme l’article premier de la proposition de loi à venir déclare que « toute personne a le droit à une fin de vie digne et apaisée ». Comment définir juridiquement ces notions ? Où s’arrête et où commence la dignité ? Sera-ce au juge, demain, de définir l’état de dignité d’un homme en cas de conflit entre le médecin et la famille du malade ? Quel degré de handicap ou de souffrance nous fait passer de la dignité à l’indignité ? Ce sujet est bien évidemment à haut risque. Depuis deux ans, l’exécutif multiplie les avis derrière lesquels il pourrait se retrancher : celui de l’association pour le droit à mourir dans la dignité, pro-euthanasie évidemment, et dont le président s’est félicité de votre nomination, m...
Aujourd’hui, 70 % des Français meurent à l’hôpital quand, au début des années soixante, 70 % mouraient à leur domicile. Pourtant, 80 % des médecins ne sont pas formés aux techniques de soins palliatifs. Neuf ans après son entrée en vigueur, la loi Léonetti continue d’être mal connue : la médecine l’ignore dans 90 % des cas et seuls 2,5 % des Français ont rédigé leurs directives anticipées. La priorité des pouvoirs publics devrait donc être axée sur une meilleure formation et information des médecins. François Hollande déclarait au mois de...
...ile, mais pour savoir comment s’en débarrasser au plus vite et comment la faire taire en profitant de son extrême vulnérabilité. La généralisation de la sédation, la simplification de son utilisation nous font entrer dans une logique euthanasique par une manoeuvre dangereuse, ultime étape avant de sortir l’euthanasie de sa clandestinité et de rejoindre la triste réalité de l’affaire Bonnemaison, médecin récemment acquitté après avoir pris la décision, seul, de tuer sept personnes sans même parfois l’avis de sa victime ou de la famille de celle-ci. Ce fut là un véritable droit de tuer encensé, de plus, par la presse.
De quel droit un médecin a-t-il légitimement droit de vie ou de mort sur ses patients ? Pour preuve de cette hypocrisie, la remarque des deux députés auteurs du rapport justifiant la reprise dans le texte de la décision du Conseil d’État cité plus haut. Je cite : « Nous ne pouvons que reprendre le sens de cette décision qui devrait contribuer à mettre fin à des pratiques malheureusement encore répandues de sédation avec...
...qui mérite explication, l’ « acharnement thérapeutique ». C’est une mauvaise formule : c’est d’ « acharnement médical » dont il faut parler, lequel est en effet inacceptable. Comment s’octroyer le droit de traiter, d’administrer un traitement à quelqu’un qui est en train de mourir parce que la mort gagne et que la maladie n’est plus guérissable ? Cet acharnement médical n’est pas acceptable, les médecins doivent le comprendre ! Certes, il faut bien entendu utiliser la sédation ou les traitements antalgiques afin d’éviter la douleur. Or, quelle est la différence entre eux ? J’ai essayé de comprendre… Un produit antalgique, par définition, « endort » la douleur. Je suis évidemment tout à fait d’accord pour que les médecins puissent utiliser la sédation ! Lorsque cela se fait pour empêcher que le...