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Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, notre assemblée est aujourd’hui saisie de la proposition de loi visant à réprimer la négation des génocides et des crimes contre l’humanité, que j’ai déposée avec plusieurs de mes collègues sur le bureau de l’Assemblée nationale il y a maintenant plus d’un an, le 14 octobre 2014. Cette proposition de loi étant universelle et non partisane, je l’ai adressée au Président de la République dès sa parution. Je me souviens en effet de son engagement en tant que candidat, auprès de Nicolas Sarkozy, entre les deux tours d...
C’est également à son initiative que le terme « génocide » fut officiellement reconnu par la convention de prévention et de punition du crime de génocide, adoptée par l’assemblée générale des Nations unies dans sa résolution du 9 décembre 1948. Mais si la reconnaissance par la France du génocide de 1915 a pu être considérée comme un achèvement pour certains, il était évident qu’il fallait aller plus loin pour éviter toute concurrence des mémoires et toute inégalité de traitement entre les victimes et leurs descendants. La République s...
Cette proposition de loi revêt une incontestable portée normative, puisqu’elle permet de mettre fin au déni de justice dont souffrent actuellement les victimes de ces crimes et leurs familles. II ne s’agit nullement de mettre en concurrence les victimes de ces crimes, mais de leur offrir une protection universelle et intemporelle contre le délit de négationnisme. En effet, nous nous devons de repenser entièrement le négationnisme, qui n’est ni plus ni moins qu’un accessoire du crime de génocide, et même son achèvement, comme l’a si bien dit mon collègue Patrick Dev...
Au regard de l’exigence de conformité à la Constitution et en respectant la décision rendue par le Conseil constitutionnel le 28 février 2012, il est proposé en premier lieu d’introduire des éléments d’extériorité, afin que la reconnaissance d’un crime de génocide ou d’un crime contre l’humanité ne dépende pas du seul législateur, comme c’était le cas en 2012. C’est ce que demande, en quelque sorte, le Conseil constitutionnel. Ces éléments d’extériorité peuvent être un traité ou un accord international auquel la France serait partie, comme le traité de Sèvres du 10 août 1920, qui prévoit en son article 230 de juger les « responsables des massa...
Un autre élément d’extériorité peut être une décision de justice rendue par une juridiction française, par une juridiction internationale établie par un traité ou un accord international régulièrement ratifié ou approuvé par la France ou par une juridiction de l’État sous l’autorité duquel les crimes ont été commis. Je remercie François Rochebloine d’avoir déposé en ce sens un amendement fort utile. Pour mémoire, le 5 février 1919, le tribunal militaire d’Istanbul a reconnu la culpabilité de certains auteurs du massacre des Arméniens commis sur le territoire de l’Empire ottoman et les a condamnés. Comme vous le savez, en droit international, la Turquie a succédé à l’Empire ottoman. Le secon...
Compte tenu de ces différents éléments, vous pouvez constater, mes chers collègues, qu’il ne s’agit en rien d’un texte de circonstance, comme certains collègues voudraient bien le faire croire, mais bien d’un texte universel et intemporel offrant à toutes les victimes de ces crimes une même protection contre le négationnisme. C’est la raison pour laquelle je vous invite tous à adopter cette proposition de loi que le groupe Les Républicains a choisi d’inscrire à l’ordre du jour de notre assemblée, dans une approche consensuelle, au-delà des clivages politiques. Permettez-moi de citer une phrase que Jaurès a prononcée ici même : « La Chambre française, constatant la respon...
Il est désormais temps de prendre nos responsabilités. Il n’est pire crime pour la démocratie que l’oubli, et j’espère que nous serons tous unis dans ce débat pour la dignité humaine et les droits de l’Homme. En cette année 2015, qui marque à la fois les vingt-cinq ans de la loi Gayssot et les cent ans du génocide des Arméniens, ne ratons pas notre rendez-vous avec les Français ! Soyons dignes, votons ce texte !
...ulés à travers le monde. Ils cherchent à convaincre l’opinion publique qu’il existe une autre vision de l’histoire ; ils veulent ainsi remodeler l’histoire pour diaboliser les victimes et réhabiliter les bourreaux. Face à ce défi, et dans le cadre juridique contraint que vous avez rappelé, monsieur le secrétaire d’État, comment pourrions-nous réprimer efficacement la négation des génocides et des crimes contre l’humanité ? J’ai bien entendu les réserves que vous avez formulées : à vous de nous aider au cours de ce débat à surmonter les difficultés constitutionnelles. Je salue l’implication personnelle de notre rapporteure, Valérie Boyer, qui cherche à faire aboutir cette proposition de loi avec une constance qui l’honore depuis des années, et qui devrait tous nous engager à nous battre à ses c...
...i mérite tout notre respect. Je peux témoigner que l’engagement de Valérie Boyer est tout à fait fondé sur le sentiment sincère de lutter pour une cause juste. Elle l’a rappelé elle-même dans l’exposé des motifs de sa proposition de loi. C’est cette conviction profonde qui l’a conduite à nous proposer ce texte : « il apparaît que la négation est l’accessoire ou le prolongement du génocide et des crimes contre l’humanité ». Je rappelle ce que l’historien Yves Ternon écrivait dans son ouvrage Du négationnisme : mémoire et tabou : « La négation est tissée avec le génocide. En même temps qu’il prépare son crime, l’auteur du génocide met au point la dissimulation de ce crime. » Ce constat doit nous pousser à agir. Je rappelle, par ailleurs, que c’était le sens des engagements pris en 2012 par les ...
...ndements pour modifier sa rédaction initiale ; nous les examinerons tout à l’heure : je ne m’y attarde donc pas. Il faut cependant rappeler qu’aujourd’hui, il n’existe pas, en droit français, une incrimination générale du délit de négationnisme en dehors de l’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, article inséré par la loi Gayssot de 1990, qui concerne les seuls crimes contre l’humanité commis pendant la Seconde guerre mondiale. Quatre génocides ont pourtant été reconnus au plan juridique par des instances internationales dépendant de l’ONU. Le premier est le génocide arménien de 1915-1916, reconnu par la commission des droits de l’Homme de l’ONU le 25 août 1985. Madame le rapporteur, vous avez cité tout à l’heure M. Roger Cukierman. À ce propos, celui-ci a dé...
...agée par ces décisions et coopère avec les instances internationales en charge de ces dossiers. Elle a par ailleurs adapté son droit pénal à l’institution de la Cour pénale internationale en juillet 2010. Pour rappel, seul le génocide arménien a fait, en France, l’objet d’une reconnaissance législative spécifique. Il ne s’agit donc nullement de mettre en concurrence les victimes de ces différents crimes, mais au contraire de leur offrir à toutes une universelle et intemporelle protection contre le délit que doit être le négationnisme. Chers collègues, nous devons bien avoir conscience qu’à force de nier les faits, le néant finit par prendre de la consistance. En cela, la proposition de notre collègue Valérie Boyer n’est pas une proposition de loi mémorielle, comme certains l’ont redouté. C’est...
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, mes chers collègues, en soumettant à nos suffrages ce matin, après la rebuffade que nous a infligée le Conseil constitutionnel, une nouvelle version de la proposition de loi réprimant la négation du crime de génocide, notre collègue et amie Valérie Boyer fait preuve d’une ténacité et d’une persévérance qu’il convient de saluer.
...Mais je sais bien, et j’ai toujours soutenu que nous n’avons pas à faire je ne sais quel classement ou je ne sais quelle évaluation comparative des génocides. Tout génocide, quel qu’il soit, quelles qu’en soient les victimes, est une défaite de l’humanité, un scandale, dont la répression doit être conduite avec la plus extrême vigueur. C’est ce qu’avaient compris les auteurs de la définition des crimes contre l’humanité contenue dans le statut du tribunal de Nuremberg, qui demeure encore aujourd’hui la base historique de la condamnation du génocide. Ne pas répondre par une sanction à la hauteur de l’offense qu’infligent à la collectivité humaine les actes génocidaires serait une faute lourde de conséquences pour la paix de la société française et, comme on le voit actuellement, pour la paix d...
Pour ma part, j’estime que la négation des génocides est un crime qu’il y a lieu de réprimer. D’ailleurs, vous me permettrez de rappeler que j’avais déposé en 1995 une proposition de loi en ce sens, qui prévoyait que la répression pénale s’attache à la négation de tous – je dis bien de tous – les génocides et crimes contre l’humanité. Ne serait-ce que pour cette seule raison, je voterai, au nom du groupe de l’Union des démocrates et indépendants, cette proposit...
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous examinons maintenant la proposition de loi visant à réprimer la négation des génocides et des crimes contre l’humanité du XXème siècle présentée par la rapporteure du texte Valérie Boyer et plusieurs de ses collègues. Les auteurs de cette proposition de loi précisent que l’actualité, notamment les persécutions contre les Chrétiens d’orient en Irak, constituent déjà un crime contre l’humanité qui impose l’adoption urgente d’une loi permettant d’en pénaliser la négation. Cette proposition de lo...
N’aurait-il pas été plus pertinent d’attendre les réserves et censures éventuelles du Conseil avant de légiférer, afin d’élaborer un texte consensuel, équilibré, répondant à l’ensemble des difficultés juridiques soulevées et permettant la mise en place d’une véritable infraction de négation des crimes de guerre et crimes contre l’humanité ? Mais puisque vous avez décidé, mes chers collègues, d’examiner cette question dès aujourd’hui, nous répondrons à votre invitation. Ce texte vise donc à étendre les faits permettant la qualification de délit de négation des crimes de génocide et des crimes contre l’humanité. Mais à la contestation des crimes de génocide et crimes contre l’humanité, les au...
...lois, était d’insérer un nouvel article 24 ter à la loi sur la liberté de la presse, article prévoyant de punir d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ceux qui auraient contesté systématiquement, nié par principe ou tenté de justifier par tous moyens de diffusion, dont tous les moyens de l’écrit et tous les moyens de communication par voie électronique, l’existence d’un ou plusieurs crimes de génocide ou crimes contre l’humanité tels que définis par le code pénal. Deux conditions cumulatives étaient également prévues pour l’application de la peine encourue : les crimes doivent avoir été reconnus, par un traité ou un accord international auquel la France est partie, par une décision de justice ; les faits incriminés doivent constituer une incitation directe ou indirecte à la viole...
Monsieur le Président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi en discussion concerne à l’évidence un sujet important, puisqu’elle vise, d’après son intitulé, à réprimer la négation des génocides et des crimes contre l’humanité du XXème siècle. Nous ne pouvons qu’être en accord avec cet objectif. Dans l’exposé des motifs, un génocide particulier est ciblé : le génocide arménien. En 1915, les Arméniens établis sur les territoires de l’Empire ottoman ont été déportés, exterminés, massacrés au nom d’une idéologie nationaliste et raciste. L’histoire l’a reconnu. Les massacres commis contre les populatio...
La question n’apparaît plus dans le traité de Lausanne du 24 juillet 1923. Celui-ci comprend des annexes proclamant l’amnistie pour toute personne qui, du fait de sa conduite pendant la guerre, pouvait être considérée comme coupable. Une amnistie sans reconnaissance d’un crime, voilà qui est pour le moins paradoxal, voire contradictoire. En droit international, cette reconnaissance est imparfaite : malgré une résolution de la sous-commission des droits de l’Homme de l’ONU, en août 1985, et une résolution du Parlement européen le 18 juin 1987, aucun tribunal international n’a condamné le génocide arménien. La représentation nationale française, au nom de la justice, d...
…car le négationnisme est le prolongement du crime lui-même. Depuis la loi du 29 janvier 2001, madame la rapporteure, vous avez déposé en 2011 une proposition de loi quasi similaire à celle que nous allons étudier aujourd’hui. Ce texte prévoyait des peines en cas de révisionnisme ou d’apologie. Largement soutenu par notre groupe, il a fait l’objet d’une censure du Conseil constitutionnel. Celui-ci a en effet considéré, dans sa décision du 28 fé...