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Aucune ne pouvait se présenter comme victime de sa propre condition, à moins de s’effondrer ou de s’égarer dans une identité totalement disloquée. Toutes comptaient parmi les plus déshérités de la famille humaine, victimes, pour la plupart d’entre elles, de violences passées, en majorité sexuelles. Toutes affichaient un détachement de leur corps du reste de leur personne. Et c’est d’ailleurs bien le déni partagé qui permet à la prostitution...
...e définit comme abolitionniste. En 2003, le Parlement a renforcé l’interdiction de la traite des êtres humains, de la prostitution des mineurs et a introduit le délit de racolage passif. Ce dispositif n’a pas eu, il faut bien le reconnaître, les effets escomptés : la prostitution, notamment d’origine mafieuse, est plus que jamais active ; les femmes restent les principales cibles, les principales victimes que l’on montre du doigt, au lieu de leur tendre la main et de leur venir en aide. Je demande aujourd’hui la suppression de ce délit de racolage passif, qui stigmatise uniquement la prostituée, et je souhaite la mise en oeuvre de dispositifs plus dignes pour accueillir ces femmes et leur donner la possibilité et l’espoir d’une autre voie, d’une autre vie. Nous sommes aujourd’hui à un tournant, ...
...e globale avec pour objectif la sortie du système prostitutionnel. C’est en particulier le sens de l’article 3 de notre proposition de loi, qui prévoit des volets réinsertion, hébergement, action médico-sociale et gouvernance avec la création d’une instance de coordination dans chaque département. Le réveil français, c’est considérer les personnes prostituées comme non pas des coupables mais des victimes. Pour cette raison, je suis clairement favorable, comme beaucoup de mes collègues, à la suppression de délit de racolage. C’est également considérer que les clients réels ou potentiels doivent être responsabilisés. À ce titre, je suis favorable à la création d’une interdiction d’achat d’acte sexuel et, bien évidemment, à la pénalisation des clients, points sur lesquels je sens d’ailleurs un mou...
...lques jours dans le bois de Boulogne. C’est en pensant à elle que je suis fière de participer, à travers cette proposition de loi à l’abolition d’un système d’oppression qui est, beaucoup l’ont rappelé, intrinsèquement violent : le système de la prostitution. Je suis fière de défendre un texte protecteur à l’égard de personnes qui seront considérées non plus comme des délinquantes mais comme des victimes, un texte ferme à l’encontre des proxénètes et des réseaux de traite des êtres humains, un texte qui, pour la première fois, décide de responsabiliser les acheteurs. Un texte qui fait toutefois l’objet de malentendus, parfois volontairement entretenus ; parlons-en. Notre rapporteure, Maud Olivier, et Mme la ministre l’ont évoqué ce matin en rappelant quel était son objet. Nous sommes en effet t...
...r les réseaux de traite des êtres humains. Nous parlons de choses dont certains tartuffes germanopratins voudraient nous interdire de parler. À cet égard, je tiens à remercier Ségolène Neuville d’avoir évoqué, dans la tribune qu’elle a cosignée avec vingt-deux de ses consoeurs et confrères médecins et à la tribune tout à l’heure, les lésions physiques, notamment au niveau vulvo-vaginal, dont sont victimes les personnes prostituées. Je veux remercier aussi Colette Capdevielle d’avoir mentionné tout à l’heure le processus de dissociation qu’ont décrit beaucoup de personnes prostituées qui ont témoigné devant nous lors des auditions de la commission spéciale ou dans nos circonscriptions. À l’instar de François de Rugy, je viens d’une circonscription où la prostitution est un phénomène connu, ancien,...
...gique d’ensemble de ce texte qui responsabilise le client dans la mesure où celui-ci est partie prenante du système prostitutionnel. Le président de la commission spéciale citait ce matin Lucien Neuwirth ; je conclurai pour ma part mon intervention par quelques vers de Paul Eluard que Georges Pompidou avait cités : « Comprenne qui voudraMoi mon remords ce futLa malheureuse qui restaSur le pavéLa victime raisonnableÀ la robe déchiréeAu regard d’enfant perdueDécouronnée, défigurée… Une fille faite pour un bouquetEt couverteDu noir crachat des ténèbres… » Ce texte, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous fait sortir du noir crachat des ténèbres.
Avec cet article, nous en arrivons à l’autre côté de la médaille. Ayant supprimé le délit de racolage, car nous considérons les prostituées comme des victimes, nous voulons responsabiliser les clients – le mot est important. Nous considérons, et nos débats ont permis de progresser sur ce point, que, dans la majeure partie des cas, la prostitution relève de la traite d’êtres humains et que, le reste du temps, il s’agit d’une fausse liberté, car l’achat d’un acte sexuel se fait sous une contrainte d’ordre économique. Le choix qui est fait – un choix im...
Nous en arrivons à cet article dont on a beaucoup parlé – il a même excité les foules –, à telle enseigne d’ailleurs que l’on a oublié les autres avancées contenues dans le texte. Nous inversons enfin les responsabilités. Nous estimons en effet que les personnes prostituées sont pour la plupart des victimes. Nous dépénalisons donc cette pratique dans les autres articles. Nous avons bien pris conscience du fait que les vrais responsables sont les proxénètes – bien sûr –, mais aussi les clients que nous choisissons dès lors de sanctionner. Nous ne pouvons plus continuer à accepter que, sous prétexte qu’il a payé pour un corps, le client puisse en disposer à sa guise. Ce n’est pas là notre conception...
...êtres humains ou à l’esclavage. Il faisait une différence entre ces phénomènes, ce qui lui permettait d’être extrêmement réservé à l’égard de la pénalisation. Ce qui fonde la proposition que nous examinons aujourd’hui, c’est l’objectif de tarir la demande et, ce faisant, de s’attaquer aux réseaux. Or il me semble que l’on fait fausse route. Cette pénalisation n’est en rien une garantie pour les victimes de la traite et l’amalgame entre traite et prostitution risque de détourner les moyens mis en place pour lutter contre la traite. Je rappelle qu’en Suède, alors que 450 hommes étaient condamnés à une amende pour achat de sexe en 2011, seules 2 personnes étaient condamnées pour traite à des fins sexuelles, et 11 pour proxénétisme lié à la traite. Je voudrais mettre en relation ces chiffres avec...
La commission a rejeté ces amendements. Il s’agit de faire comprendre au client qu’il est responsable de ses actes : le fait de profiter de la précarité économique d’une personne est inacceptable dans notre société. Je n’arrive pas à comprendre le lien qui est fait entre pénalisation et précarisation ou clandestinité. C’est dans les conditions actuelles que les personnes prostituées sont victimes de violences, précisément parce qu’elles se cachent et que le client a tous les droits ! La prostitution, je vous le rappelle, n’est pas interdite en France et ne le sera pas avec cette loi. Les personnes qui se prostituent ne seront plus considérées comme des délinquantes, puisque nous venons de voter l’abrogation du délit de racolage. Elles seront libres, libres de négocier avec leur client s...
L’article 1er bis est issu d’un amendement de M. de Courson adopté en commission spéciale et visant à faire bénéficier les professionnels et les personnels salariés et non salariés engagés dans la prévention de la prostitution d’une formation sur ce sujet. C’est une bonne chose : de nombreuses études démontrent que les personnes prostituées ont souvent été victimes de violences sexuelles durant leur enfance ou leur adolescence. Cette disposition a donc pour objet d’améliorer la formation des travailleurs sociaux, notamment ceux qui interviennent auprès d’un public jeune. Je tiens à appeler l’attention du Gouvernement sur la nécessité de dresser le bilan de toutes les mesures adoptées au fil des lois en matière de protection des jeunes victimes d’agression...
Cet amendement vise à permettre aux personnes prostituées de se domicilier à l’adresse de leur avocat ou d’une association qui les accompagne dans leurs démarches administratives. À ce stade, seules les personnes ayant porté plainte peuvent se domicilier auprès du commissariat, comme le propose l’article 1er ter adopté par la commission. Or, les personnes prostituées qui ne sont pas victimes de la traite ou qui ne souhaitent pas porter plainte se heurtent elles aussi à des obstacles en matière de domiciliation. Il s’agit donc tout simplement de leur faciliter les démarches administratives en les rendant plus autonomes, et en leur permettant ainsi de franchir un premier pas dans leur parcours de sortie de la prostitution. J’espère que cet amendement recueillera un avis favorable.
...n lequel tout serait plus propre et plus surveillé en maison close – c’est totalement faux comme j’ai pu m’en rendre compte moi-même à La Jonquera. Il n’y a pas trente-six possibilités et le modèle suédois semble le meilleur. Bien entendu, nous pouvons tous nourrir des doutes et nous demander si la prostitution ne s’est pas aggravée via Internet, si les personnes prostituées ne sont pas davantage victimes de violences, mais ce n’est pas, en tout cas, ce que nous disent les Suédois que nous avons auditionnés. Et c’est bien parce qu’il est possible de douter que nous avons essayé d’améliorer la loi en créant un référentiel de réduction des risques et en prévoyant que des rapports seraient régulièrement remis sur les effets de cette loi. Il n’est pas interdit de faire mieux et d’aller plus loin que...
...on agréée par arrêté préfectoral. Cela étant, le présent amendement vise toutes les personnes prostituées, qu’elles soient françaises ou étrangères, et qu’elles soient engagées ou non dans un parcours de sortie de la prostitution. Je suis favorable à toute mesure qui vise à faciliter les démarches administratives de toutes ces personnes, françaises ou étrangères, engagées dans un parcours ou non, victimes d’un réseau d’exploitation sexuelle ou non. C’est pour ces raisons que la commission a accepté cet amendement.
...commentaires médiatiques de nos travaux, il a beaucoup été question de liberté : liberté des prostituées et liberté des clients. Pour ma part, j’affirme ici que le premier des droits à disposer de son corps est la liberté de ne pas se prostituer. Pour garantir cette liberté-là, l’article 1er ter s’inspire largement de l’ordonnance de protection, que nous avions initialement prévu de délivrer aux victimes de la traite. Cependant, le recentrage de la loi de 2010 sur les seules violences intrafamiliales était un choix politique, mais aussi une simplification de procédure qui permettait de confier cette ordonnance au juge aux affaires familiales. Cet article permet donc de rattraper le retard que nous avions pris ces dernières années en matière de protection des victimes de la traite, dont nous savo...
Cet amendement est dans le même esprit que le précédent, puisqu’il complète l’alinéa 4 de l’article afin que les victimes de la traite puissent déclarer comme domicile l’adresse de leur avocat ou d’une association qui aide ou qui accompagne les personnes prostituées. Cet amendement avait reçu un avis favorable en commission ; j’espère qu’il en sera de même en séance.
...ris deux mesures : la première consistait à reporter le début du délai de prescription à la majorité de la personne ayant subi un viol alors qu’elle était encore mineure, et la seconde à allonger ce délai – mais pas suffisamment. L’amendement n°40 a donc pour objet de porter le délai de prescription à vingt ans. Cette mesure a fait consensus au sein de la commission : nous avons vu trop de femmes victimes de viol qui, la trentaine ou la quarantaine venue, essayaient d’entamer des procédures qui, hélas, tombaient car les faits étaient prescrits. Par le fait qu’il vise les victimes de viols, cet amendement concerne, entre autres, les personnes prostituées qui subissent un viol ; il a donc un lien évident avec le présent texte, ce qui justifie son dépôt par des cosignataires de toutes sensibilités,...
...upation est légitime et je la partage, mais elle est sans véritable lien avec le texte dont nous débattons. Je rappelle enfin que la question du délai de prescription en matière de viol est pendante devant la Cour de cassation, qui devrait se prononcer en décembre sur le fait de savoir si ce délai court à compter de la commission effective des faits ou à compter de leur révélation psychique à la victime, en cas d’amnésie par exemple. Pour toutes ces raisons, la commission spéciale a rejeté cet amendement ; j’invite ses auteurs à le retirer, puisque nous aurons l’occasion d’aborder de nouveau cette question à l’avenir.
...ge de sensibilisation permettra aux clients de prendre conscience des conséquences de leurs actions. En effet, l’achat de services sexuels n’est pas qu’une simple transaction, mais le moteur et le rouage essentiel d’un esclavage de masse. En agissant ainsi, les clients se font les complices d’un système violent et dangereux pour la santé physique et psychologique de celles et ceux qui en sont les victimes. Grâce à cet article, les clients seront enfin informés des souffrances qu’endurent ces femmes et ces hommes, qui sont en proie au désespoir et à un sentiment d’abandon, mais également à la honte. Aussi, je ne peux que me réjouir de cette possibilité de sensibilisation qui, je l’espère, sera largement mise en oeuvre et proposée par les tribunaux de police en complément ou à la place des amendes...
Cet amendement de cohérence avec l’amendement no 28 que j’ai présenté à l’article 14 bis permet de déplacer les dispositions de cet article au présent article, afin notamment d’intégrer au rapport prévu la situation des mineurs victimes de prostitution.