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Madame la présidente, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, débutons par des chiffres ! Espagne : 76 000 places de prison ; Royaume-uni : 96 000 ; France : 57 000. Cherchez l’erreur ! Et sur 1,4 million d’affaires, nous avons à peine cent mille personnes condamnées à de la prison ferme et purgeant effectivement leur peine, c’est-à-dire moins de 10 %. Je ne sais pas ce que vous entendez, mes chers collègues, sur le terrain, mais lorsque je croise des électeurs, des citoyens, j’entends rarement des phrases comme : « Libérez les délinquants ! La police est trop dure avec eux ! La justice est trop dure avec eux ! Le sentiment de sécurité est beaucoup trop fo...
Ce projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines a, semble-t-il, la nécessaire ambition de lutter contre la récidive et la surpopulation carcérale, qui constitue un problème majeur de notre pays. Or, en réalité, ce projet de loi, sous le faux prétexte de poursuivre l’objectif d’insertion ou de réinsertion du condamné, conduit à une justice qui n’entend pratiquement plus juger les faits commis, mais bien davantage l’individu qui les commet.
...e donc en totale inadéquation avec son contenu. Nous en trouvons l’illustration parfaite dans la reformulation du titre du projet par la commission des lois. La majorité se serait-t-elle aperçue de l’incohérence entre le contenu et l’ambition de son propre texte ? Au-delà de la forme, l’incohérence du texte est manifeste sur plusieurs points. D’abord, l’objectif d’insertion ou de réinsertion des condamnés prôné par cette majorité n’est pas crédible. Libérer prématurément les détenus, comme le prévoit la « libération sous contraintes » ou le développement des libérations conditionnelles, n’a jamais été un facteur de réinsertion. L’essentiel se joue sur le suivi des personnes libérées. Or le texte ne prévoit aucune innovation réelle s’agissant du sursis avec mise à l’épreuve, ni aucune disposition...
En son temps, j’ai dénoncé cette règle absurde votée dans la première partie du quinquennat précédent – je l’ai d’ailleurs, et je l’assume, dit alors publiquement comme un certain nombre d’autres – exonérant de prison les condamnés à moins de deux ans, alors même que nous avions fait voter, à raison, les peines plancher que le présent projet entend quant à lui supprimer. C’est dire combien de jeunes sur la voie de la délinquance, aujourd’hui, savent qu’ils échapperont à la prison quels que soient leurs méfaits. Ce lâche consensus entre le judiciaire et le législatif doit cesser car il se fonde sur le postulat selon lequel...
Vous ne cherchez pas non plus dans votre texte à rendre la prison plus utile : alors que vous proposez pompeusement d’inscrire dans le code pénal que l’un des deux objectifs de la peine de prison est de « favoriser l’amendement, l’insertion ou la réinsertion du condamné », votre texte – Frédéric Lefebvre l’a rappelé – ne prévoit malheureusement rien pour faire de la détention un temps utile à la réinsertion. Il s’agit pourtant là d’un sujet sur lequel nous aurions été nombreux à vous suivre ! En réalité, plutôt que de réformer la prison, vous mettez tout en oeuvre pour qu’elle soit évitée. D’abord avec l’ajournement du procès, prévu à l’article 4 de votre texte...
...imes, faute de moyens. C’est inacceptable ! Ensuite, en prévoyant des aménagements de peine plus laxistes pour les récidivistes. Alors qu’il existe déjà dans notre droit de nombreuses possibilités d’aménagement ou de réduction des peines, le rapporteur a fait adopter en commission des amendements qui allègent le régime des récidivistes en la matière : ils seront désormais traités comme des primo condamnés ! Par ailleurs, en supprimant la révocation automatique des sursis simples pour les récidivistes, vous faites une fois encore le choix de l’impunité, au détriment de la sanction, qui s’en trouve affaiblie.
...même logique qui guide votre invention de la « contrainte pénale », dont le but est d’éviter la prison à tout prix. Son extension, lors de l’examen du texte en commission, à l’ensemble des délits, qui a semble-t-il choqué jusqu’au Président de la République, mais pas vous, madame la garde des sceaux, est tout simplement scandaleuse. Il faut que les Français sachent que, concrètement, une personne condamnée par exemple pour agression sexuelle aggravée pourra ainsi échapper à la prison.
...s collègues, bien que l’objet annoncé par le titre de votre projet de loi soit de lutter contre la récidive, nous ne pouvons que déplorer que ce dernier serve surtout à désengorger les prisons. Vous continuez malheureusement à affirmer une contrevérité à laquelle on ne peut adhérer, à savoir que c’est la prison qui est facteur de récidive. En plaçant sur le même plan l’objectif de sanctionner le condamné et celui de favoriser son amendement, son insertion ou sa réinsertion, ce texte se trompe de cible. On comprend que le Gouvernement se refuse à sanctionner par la prison, dès lors que son intention n’est pas de punir, mais de rééduquer le délinquant. Ce n’est pas un hasard si selon tous les sondages, 75 % des Français sont hostiles à votre réforme. Ce seront eux les premières victimes de votre i...
...ez prétendument en guerre contre les automatismes. Soulignons que les crédits de réductions de peines automatiques n’étant pas supprimés pour autant, votre mécanisme d’examen automatique aura lieu non pas aux deux tiers, mais à la moitié de la peine prononcée. Pardonnez-nous d’avoir à rappeler la réalité : 40 % des prisonniers qui bénéficient d’une libération conditionnelle et 45 % des personnes condamnées à une peine alternative à la prison récidivent. Le rapporteur du projet de loi, Dominique Raimbourg, a eu cette formule stupéfiante : « l’objectif n’est pas de vider les prisons, mais cela sera l’une des conséquences ». Voilà toute l’ambiguïté de cette réforme pénale qui entend régler le problème de la surpopulation carcérale en faisant de la prison, non plus la règle, mais l’exception. La ré...
La réalité c’est que votre réforme délétère et anti-carcérale s’inscrit aux antipodes des attentes des Français, et que vous portez une lourde responsabilité dans le message d’impunité envoyé aux récidivistes et dans la hausse de la délinquance. La réalité c’est que votre réforme prépare non pas la réinsertion des condamnés mais leur impunité. C’est la raison pour laquelle nous partageons les inquiétudes de nos concitoyens et sommes résolument opposés à ce texte.
...e texte est déséquilibré et risqué sur le plan du droit et de la Constitution. En définitive, nous le voyons bien à la résonance qu’il a parmi ceux qui s’intéressent à ces questions certes un peu difficiles, ce texte n’est pas en mesure de donner confiance à l’opinion publique. Cette dernière comprend qu’il donnera la possibilité à des juges de décider que des délinquants ou des criminels parfois condamnés pour des faits très graves, passibles de peines allant jusqu’à dix, voire vingt ans de prison avec le jeu de la récidive, resteront dehors et subiront une contrainte pénale en substitution des peines d’enfermement aujourd’hui requises dans la plupart des cas. Je ne dis pas que c’est votre souhait, mais c’est une possibilité donnée aux juges. Comment imaginer que cela rassure les Français ?
Ensuite, la suppression des révocations automatiques des sursis renforce ce principe d’individualisation des peines. Jusqu’à présent, les sursis étaient révoqués automatiquement du fait du prononcé d’une peine d’emprisonnement ferme sanctionnant un nouveau délit commis dans le délai de cinq ans après le prononcé du sursis. Cette automaticité pouvait se déclencher sans que la personne condamnée, voire sans que la juridiction de jugement en ait connaissance. Désormais, avec l’article 6 du projet de loi, la juridiction prononçant une peine de réclusion ou d’emprisonnement sans sursis aura la faculté, si elle l’estime nécessaire, de prononcer par décision spéciale la révocation totale ou partielle de chacun des sursis en cours. La réforme introduit également une nouvelle forme d’ajournem...
De même, elle a donné au juge d’application des peines la faculté d’aménager la peine de personnes plusieurs fois condamnées à des peines prononcées ou restant à subir dont la durée totale serait supérieure à un an mais inférieure à deux ans. Ces modifications vont dans le bon sens, même s’il nous semblait plus judicieux de porter à deux ans le seuil d’octroi des aménagements de peine pour tous les détenus, dans la mesure où les courtes peines de prison sont inefficaces pour prévenir la récidive. Par ailleurs, le pr...
...s prisons sont surpeuplées : elles comptent 68 859 détenus pour 57 680 places. Hier encore, je me rendais à la maison d’arrêt de Villepinte, dans mon département, en Seine-Saint-Denis. Mille détenus y sont incarcérés pour seulement 570 places ! Les fonctionnaires de l’administration pénitentiaire y dénonçaient, là comme partout ailleurs, des conditions de détention inadaptées à la réinsertion des condamnés et qui causent des difficultés considérables aux surveillants dans leur travail quotidien. Les chiffres de la récidive s’envolent : la part des condamnés en récidive a plus que doublé ces dix dernières années. Les multiples lois d’affichage prises par la précédente majorité n’y ont rien fait. L’exploitation des faits divers et l’instrumentalisation de la souffrance des victimes ont justifié une...
...ent aussi ce texte car elle se retrouve dans l’appel à la mobilisation générale qu’il contient. En effet, seule une mobilisation générale de tous les acteurs de la chaîne pénale, y compris les collectivités territoriales, peut permettre une lutte plus efficace contre la récidive. Nous avons donc choisi d’associer les services de police et de gendarmerie en leur donnant les moyens de contrôler les condamnés effectuant leur peine à l’extérieur. Ce projet de loi n’oublie pas non plus les victimes. Il leur confère de nouveaux droits, mais sans instrumentaliser leur souffrance. Nous avons là une véritable réforme de la justice pénale, une réforme qui ne joue pas sur les peurs. Son objectif est clair : il suffit d’huiler le mécanisme judiciaire. L’efficacité d’une réforme pénale ne se juge pas aux eff...
...sés à votre réforme, les membres du groupe UDI ne sont pas partisans du tout-carcéral. Nous sommes bien conscients que l’emprisonnement n’est pas la seule et unique réponse à la hausse de la délinquance et de la récidive, et qu’elle ne peut être la solution à tous les maux de notre société. Nous sommes bien conscients que dans certains cas, les aménagements de peine sont plus adaptés au profil du condamné et plus propres à favoriser sa réinsertion. Faut-il rappeler que nous avons travaillé lors de la législature précédente au développement des aménagements de peines et aux alternatives à l’emprisonnement ? Nous pouvons vous rejoindre sur certains principes auxquels nous tenons. Nous sommes ainsi d’accord avec l’affirmation du principe de l’individualisation des peines, la nécessité d’assurer aux ...
... à deux obstacles majeurs : la charge des juridictions, puisque deux audiences devront se tenir sur un même dossier, et les moyens des services chargés de ces investigations. En raison de sa complexité et des difficultés qu’elle comporte, cette procédure ne sera vraisemblablement jamais utilisée. La procédure d’examen obligatoire par le juge d’application des peines de la situation des personnes condamnées à une peine de moins de cinq ans, quand elles ont déjà exécuté les deux tiers de leur peine, est également contestable. À la différence de la libération conditionnelle, qui exige du condamné qu’il remplisse certaines conditions et qu’il manifeste « des efforts sérieux de réadaptation sociale », le détenu est absent de la procédure de libération sous contrainte. La procédure ne prévoit pas la po...
... l’administration pénitentiaire, est allée dans le même sens. La seconde loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, dite LOPPSI 2, nie le principe d’individualisation des peines en appliquant désormais les peines plancher aux primo-délinquants et non plus aux seuls récidivistes. Cette situation de surpopulation carcérale rend difficile l’accueil des prévenus, le suivi des condamnés, le travail de l’administration pénitentiaire et constitue un facteur important, sans être le seul, d’augmentation de la réitération et de la récidive. Lors de la visite que nous avons effectuée hier avec Cécile Duflot, les personnels de la maison d’arrêt de Villepinte ont employé ces mêmes mots. Mise en service en 1993, prévue à l’origine pour 588 places, Villepinte accueille aujourd’hui près d...
...on d’arrêt, presque 100 euros en maison centrale. Entre 1999 et 2014, le poids de l’administration pénitentiaire est passé de 28 % à 42 % dans le budget total de la justice. La prison coûte plus cher que les peines alternatives, qui sont plus efficaces pour éviter la récidive. Un placement en centre de semi-liberté coûte environ 60 euros et un placement à l’extérieur, avec une prise en charge du condamné par une association d’aide à la réinsertion, à environ 30 euros. Enfin, le coût d’une journée sous surveillance électronique est de l’ordre de 10 euros. Il fallait donc agir, et c’est le sens des propositions de Mme la garde des sceaux. Que contient le présent texte qui justifierait tant d’amendements de l’opposition et une telle déferlante d’attaques où se mêlent mensonges, approximations et in...