114 interventions trouvées.
Madame la présidente, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, débutons par des chiffres ! Espagne : 76 000 places de prison ; Royaume-uni : 96 000 ; France : 57 000. Cherchez l’erreur ! Et sur 1,4 million d’affaires, nous avons à peine cent mille personnes condamnées à de la prison ferme et purgeant effectivement leur peine, c’est-à-dire moins de 10 %. Je ne sais pas ce que vous entendez, mes chers collègues, sur le terrain, mais lorsque je croise des électeurs, des citoyens, j’entends rarement des phrases comme : « ...
...’ailleurs à l’image de la France, puisque les trois quarts de ses membres sont également opposés à ce texte. S’il y a une commission du consensus, le consensus n’a visiblement pas gagné ses rangs ! Je ferai juste trois remarques. Premièrement, le système pénal actuel est quasiment incontrôlable, en l’absence de réponse pénale claire. Faute d’assumer une réflexion sur la construction de nouvelles prisons, notre système provoque l’inflation de la délinquance. Pourquoi ? Parce qu’un délinquant sur deux ne purge pas sa peine. La France est en réalité devenue une vaste prison à ciel ouvert. Nous avons une dichotomie totale. D’un côté, le code pénal agite le spectre de sanctions extrêmement fortes : trois ans de prison, des dizaines de milliers d’euros d’amende. De l’autre côté, la réalité est qu’on...
Vous êtes en train de nous dire : « L’emprisonnement marche mal, alors il faut supprimer la prison ! Les peines plancher, ça marche mal, alors il faut supprimer les peines plancher ! » Surtout, rendons encore plus incontrôlable un système qui l’est déjà ! Que provoquera ce texte ? Aujourd’hui, il y a une obligation de prison, au moins dans les textes, même si elle reste théorique. Entre les délinquants qui ne sont pas appréhendés et ceux qui...
...s. Au lieu de supprimer les peines plancher, sur lesquelles vous n’avez d’ailleurs aucune donnée prouvant qu’elles sont inefficaces, il aurait fallu les renforcer et les étendre. Puisque l’occasion nous est donnée de réfléchir au système pénal, ma troisième remarque sera pour proposer quelque chose, car nous ne sommes pas uniquement critiques : peut-être faut-il aller vers une privatisation des prisons, si l’État est incapable d’assumer son rôle régalien.
C’est ce qui se fait aux États-unis. Confions au secteur privé la gestion des prisons, contractualisons en prévoyant des objectifs et des performances. On cite les partenariats public-privé, mais je crois qu’on peut aller plus loin.
Ce n’est pas un grand succès, dit-on sur les bancs de la majorité. Mais si on devait rechercher des succès politiques, vous ne pourriez guère en engranger depuis deux ans ! En l’occurrence, il faut peut-être laisser du temps au temps. Ce que je vois, c’est qu’il y a 57 000 places de prison en France pour 96 000 au Royaume-Uni alors que nous avons la même population. Un chiffre est un chiffre. Nous n’avons pas assez de places de prison, il faut donc en construire.
Il faut rendre plus efficace le juge des libertés et de la détention : soit on le supprime, soit on le renforce en lui donnant une vraie compétence de terrain. Enfin, il être pragmatique et efficace, au lieu de nous présenter des textes qui sont à l’inverse de ce qu’il faudrait faire. Victor Hugo disait : « Celui qui ouvre une porte d’école, ferme une prison. » Eh bien, vous réussissez le tour de force, avec la réforme des rythmes scolaires et celle-ci, d’à la fois déconstruire l’école et de démolir les prisons !
Enfin, ce texte promeut une justice permissive avec l’instauration de la contrainte pénale, nouvelle peine bien éloignée des ambitions affichées. Purgée en milieu ouvert et donc alternative à la prison, elle est caractéristique du laxisme de ce projet de loi. Une fois de plus, en contradiction avec les déclarations du Premier ministre, cette mesure concerne tout délit passible de dix ans de prison et non plus seulement, comme dans le texte initial, un délit passible de cinq ans de détention maximum. Ainsi, sont concernés des délits tels que l’IVG forcé, le harcèlement sexuel, la traite d’être ...
Et le contenu dépend quant à lui entièrement du contexte : personnalité de l’auteur, infraction, victime. Plus grave encore, le projet de loi n’établit aucun critère objectif a priori pour justifier que certains individus se verront appliquer la contrainte pénale ou bien un sursis avec mise à l’épreuve ou, encore, de la prison ferme et, ce, pour la même infraction. La loi ne donnant aucune indication objective au juge, le citoyen sera abandonné à l’arbitraire…
... que notre débat nous permettra d’y remédier, je le dis avec un état d’esprit constructif. En effet, si ce texte comprend de bonnes initiatives, il n’en demeure pas moins selon moi mal calibré. Ce projet de loi, comme ceux de Mmes Rachida Dati et Michèle Alliot-Marie, veut répondre au problème de la surpopulation carcérale, qui est notoire, celle-ci touchant massivement les courtes peines et les prisonniers en attente de leur jugement. En 2003, un rapport du comité européen de prévention de la torture, organe du Conseil de l’Europe, avait fait état de l’existence de traitements inhumains et dégradants dans les prisons françaises en raison de cette surpopulation. Jusque-là, je pense que chacun, dans cet hémicycle, est d’accord. L’évolution de la population carcérale et du nombre de places, en F...
En son temps, j’ai dénoncé cette règle absurde votée dans la première partie du quinquennat précédent – je l’ai d’ailleurs, et je l’assume, dit alors publiquement comme un certain nombre d’autres – exonérant de prison les condamnés à moins de deux ans, alors même que nous avions fait voter, à raison, les peines plancher que le présent projet entend quant à lui supprimer. C’est dire combien de jeunes sur la voie de la délinquance, aujourd’hui, savent qu’ils échapperont à la prison quels que soient leurs méfaits. Ce lâche consensus entre le judiciaire et le législatif doit cesser car il se fonde sur le postulat...
Comme le précédent projet de 2009, celui-ci obéit donc à une stricte logique de curseur comptable et ne réforme aucunement notre système pénal et carcéral. Dès 2010, j’exposais dans un livre, intitulé Le Mieux est l’ami du bien, quelques pistes pour trouver des solutions afin de vider les prisons. Dans le cadre du think tank que je préside, « Nouveaux horizons », je travaille sur ces questions avec différents acteurs dont des magistrats, des détenus, des victimes, des avocats.
J’avais alors proposé d’inciter les entreprises à embaucher d’anciens détenus à travers par exemple des réductions de charges sociales, détenus qui auraient pu commencer en prison des formations professionnelles ou un cursus universitaire. En effet, nous devons accompagner leur éducation. Il faut également faire en sorte que, pour toutes les atteintes à la personne, a fortiori, les crimes sexuels, les peines prononcées soient intégralement exécutées. J’y reviens souvent dans le cadre de plusieurs amendements : comme élément de différenciation, il convient d’utiliser dans...
Or, depuis, rien n’a bougé. La réponse de la société à la délinquance doit être ferme, dissuasive et ciblée. La prison, la privation de la liberté, madame la ministre, constitue une sanction extrêmement grave et elle n’est évidemment pas une solution pour toutes les formes de délinquance. Dans cette perspective, il me semble nécessaire de changer de paradigme, de réformer réellement notre système et de faire de la violence le critère principal de l’incarcération. L’élément déterminant à la mise en prison doit êt...
Autre question essentielle et qui fait débat : ne faut-il pas frapper le délinquant là où cela fait mal ? Je m’explique. Les délinquants en col blanc, les délinquants financiers doivent-ils dans tous les cas attendre leur jugement en prison ? Ne faut-il pas les condamner à des peines financières lourdes, susceptibles d’affecter leur patrimoine alors qu’aujourd’hui ils retrouvent souvent l’intégralité de leurs biens, de leurs avoirs, de leurs placements après leur séjour dans les quartiers VIP du système carcéral ? La prison, dans ce cas – je constate que M. le rapporteur est d’accord – doit être réservée à la violence morale, socié...
Ces sujets me semblent en effet indissociables et posent la même question, madame la garde des sceaux : la politique pénale de la France permet-elle d’offrir une réponse efficace au double échec de la société qui peine à endiguer la violence et qui ne traite la question de la prison – je le regrette – que sous un angle quantitatif et non qualitatif ? Parlant de délinquance financière et de violence, prenons l’exemple du voleur à la roulotte. Même s’il est récidiviste, la bonne réponse est-elle de l’emprisonner ? Bien sûr que non ! Il doit être éduqué, il faut le faire sortir le plus vite possible du chemin qu’il a emprunté ! Avec la contrainte pénale, votre projet vise à d...
J’ai donc déposé de nombreux amendements visant à exclure les auteurs de violence à la personne de ce mécanisme de la contrainte pénale. En outre, la prison ne permet pas seulement un éloignement temporaire ou définitif des délinquants de la société parce qu’elle risque dès lors de n’être qu’une école du crime – les grands délinquants « formant » les primodélinquants en attendant leur sortie – ou un passage obligé dans le CV judiciaire de personnes amenées à récidiver. Elle doit éduquer, priver de liberté dans des conditions dignes, punir avec des r...
Nous devons, madame la garde des sceaux, avoir le courage de refonder notre système. Nous devrions faire une distinction entre le primodélinquant violent qui doit être sanctionné, d’une part, et celui qui commet une faute et manque aux règles de la société, mais qui ne commet pas de violence, d’autre part. Celui-ci risque, en prison, d’entrer en contact avec des délinquants chevronnés et violents qui vont l’entraîner sur un mauvais chemin. Il faut aussi avoir le courage, je l’ai déjà dit, d’appliquer la peine d’expulsion du territoire à titre principal. Les étrangers sont si nombreux dans les prisons françaises ! J’avais collecté des chiffres pour mon livre Le mieux est l’ami du bien, que je cite de mémoire : ils représente...
..., avec Guillaume Larrivé, justement, de la suppression de la double peine. Mais n’est-il pas malgré tout nécessaire de trouver une solution à ce problème ? Songez à l’accord signé en 1997 entre la Belgique et le Maroc, et modifié, me semble-t-il – mais je parle sous le contrôle de Guillaume Larrivé, qui connaît bien ces questions – en 2007. Par cet accord, le Maroc a accepté de recevoir dans ses prisons des prisonniers marocains ayant commis des infractions de nature criminelle. La délivrance de visas pour les ressortissants de ce pays est à ce prix. Nous pourrions faire la même chose en France, en établissant une coopération. Cette règle aurait le mérite de vider nos prisons et de faire de la place pour tous ceux qui n’ont plus de repères, plus d’autre moyen d’expression que la violence, et pl...
J’en termine avec les constructions de prisons, qui ne doivent pas être taboues – cela a été dit excellemment hier par certains de nos collègues,…