Intervention de Michel Sponar

Réunion du 5 juillet 2016 à 16h15
Commission des affaires européennes

Michel Sponar, Direction générale de l'environnement de la Commission européenne :

Je travaille au sein de l'unité de la DG Environnement chargée de la politique maritime et de l'environnement marin.

La Méditerranée est à la fois, pour nous, une source d'espoir, car le développement potentiel de différentes activités est réel et sans doute nécessaire dans cette zone du sud de l'Europe, et une source d'inquiétude, puisque la fragilité des écosystèmes méditerranéens est telle que ce développement ne peut être que durable, faute de quoi il risque d'atteindre rapidement ses limites. De fait, les pressions sur l'environnement marin en Méditerranée sont nombreuses, qu'il s'agisse du tourisme ou de l'exploitation offshore d'hydrocarbures. Dans le premier cas, trop de tourisme peut tuer le tourisme ; dans le second, un accident aurait des conséquences si catastrophiques qu'il mettrait un coup d'arrêt au développement de cette exploitation.

Nous nous efforçons donc d'encadrer autant que faire se peut ces activités et de nous assurer, d'une part, que la réglementation européenne s'applique dans les pays membres de l'Union européenne riverains de la Méditerranée et, d'autre part, qu'elle « percole », grâce à des conventions, dans les pays du sud. Nous favorisons ainsi une approche intégrée, à deux niveaux : celui des pressions et des impacts et celui de l'ensemble du bassin car il est évident que les pays du nord et du sud de la Méditerranée doivent coordonner leurs efforts.

Dans cette optique, l'Union européenne a tout d'abord adopté la Directive-cadre « Stratégie pour le milieu marin » (DCSMM). Il s'agit d'un véritable outil d'intégration qui comporte onze descripteurs de pressions et d'impacts, qui vont de la pollution liée aux déchets solides au bruit, en passant par la préservation de la biodiversité, l'eutrophisation ou les contaminants… Les États membres se voient imposer l'obligation de mettre en oeuvre une politique de suivi de ces descripteurs. Ils doivent définir pour chacun d'entre eux des objectifs afin d'atteindre le bon état écologique à l'horizon 2020 et élaborer des programmes de mesures pour atteindre ces objectifs. Dans le cadre du premier cycle, ces programmes de mesures devaient être arrêtés en 2015 et transmis à la Commission cette année – je viens, du reste, de recevoir le programme français, qui comprend environ 80 mesures. Une partie de notre tâche consiste maintenant à comparer et à évaluer l'ensemble de ces programmes, ce qui est un défi considérable.

Nous menons également des actions plus concrètes. Tout d'abord, pour améliorer l'état de l'environnement marin, la Commission doit s'assurer que l'ensemble des directives sont exécutées. Je pense notamment à la directive sur les eaux résiduelles urbaines, qui impose aux villes de se doter d'un système de traitement des eaux ; nous comptons réviser et compléter cette directive à partir de 2017, car une partie des eaux résiduelles urbaines échappe aux stations d'épuration et arrive dans les océans sans traitement. D'autres textes, tels que la directive-cadre « Eau » ou la directive « Nitrates », relative à l'agriculture, sont très importants car ils permettent de réduire les rejets à la source et d'éviter ainsi que ces pollutions n'atteignent les océans.

Nous contribuons également à l'amélioration des connaissances. À cet égard, l'une des vertus de la directive-cadre sur l'environnement marin est d'avoir obligé les États membres à mettre en place une stratégie, même incomplète et imparfaite, de monitoring et de suivi de l'état des mers, de sorte que nous pouvons nous faire une idée plus précise des priorités, bassin par bassin. Par ailleurs, nous subventionnons des programmes de recherche et nous travaillons à l'élaboration d'un modèle intégré qui nous permettra d'analyser les pressions qui s'exercent sur les différentes mers européennes et de définir des mesures dont le rapport coût-efficacité est satisfaisant. Nous avons, en outre, récemment adopté un programme très important sur l'économie circulaire – domaine dans lequel la France nous a précédés. Nous travaillons ainsi d'arrache-pied à la définition d'une stratégie destinée à améliorer, au niveau européen, la recyclabilité et la durabilité des plastiques pour empêcher, in fine, qu'ils atteignent les rivières puis les océans.

J'en viens à l'action que nous menons au plan international, dans le cadre de la convention de Barcelone, qui réunit l'ensemble des États riverains de la Mer Méditerranée et à laquelle l'Union européenne et la France sont parties. Avec l'aide du Plan bleu, une stratégie a été adoptée à Athènes, il y a six mois. La Commission s'efforce de soutenir cette convention, car une telle intégration nous paraît très importante. Au reste, en tant que riveraine et de l'Atlantique et de la Méditerranée, la France a, me semble-t-il, un rôle particulier à jouer à cet égard. Elle peut être, en effet, un vecteur des bonnes pratiques développées dans le cadre de la convention OSPAR sur l'Océan atlantique et dont la convention de Barcelone pourrait s'inspirer. Mais, bien entendu, elle doit être exemplaire. À cet égard, le programme de mesures qu'elle nous a transmis est intéressant, mais quelques pollutions ont été oubliées et certains secteurs sont passés sous silence. Nous en ferons donc une évaluation plus approfondie.

Pour conclure, je veux saluer le travail de WWF qui, dans le rapport « Medtrends », a réalisé une synthèse remarquable de l'ensemble des données disponibles. Certes, nous pouvons discuter certaines de ses recommandations, mais il donne un état de la situation et il sera intéressant, pour nous, de le confronter à l'état des mers réalisé par l'Agence européenne de l'environnement. En tout état de cause, de nombreux plans et stratégies ont été élaborés ; il importe désormais qu'ils se traduisent par des mesures concrètes. Nous devons ainsi assurer un suivi effectif de l'exécution des protocoles et aider les pays du sud sur la base de notre expérience. Voilà notre obsession ; nous avons une responsabilité particulière à cet égard. On parle beaucoup d'équilibre entre croissance et écologie : il nous faut encore mieux comprendre quelles sont les limites de la croissance afin de donner des outils pratiques à ceux qui se consacrent au développement de certaines activités, de façon à limiter l'impact de celles-ci sur l'environnement et à rendre la croissance parfaitement durable.

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