Intervention de Marek Eštok

Réunion du 6 juillet 2016 à 8h30
Commission des affaires européennes

Marek Eštok, ambassadeur de Slovaquie :

L'ensemble de vos questions montre bien l'ampleur des défis qui attendent la présidence slovaque, et qui ne pourront être relevés du jour au lendemain. Les questions et les enjeux sont nombreux, mais pour l'heure, il nous faut aussi nous concentrer sur le sommet de Bratislava du 17 septembre. Ce sommet doit être un espace de discussion libre pour les chefs d'État et de gouvernement, afin d'apporter des réponses aux questions sur l'avenir de l'Europe et des institutions européennes.

Sur la crise migratoire, vous avez compris notre attachement au cadre institué par l'Accord de Schengen, mais nous ne voulons pas pousser notre position nationale au détriment des positions des autres États. La discussion continuera sur la base des propositions formulées par la Commission européenne lors de la présidence précédente des Pays-Bas.

Contrairement à une conception parfois répandue dans les médias, la Slovaquie est très sensible à ce problème, et a de sa propre initiative accueilli plus de deux cents Chrétiens d'Orient venus d'Irak. Nous avons un accord bilatéral avec l'Autriche pour la décharger de plusieurs centaines de demandeurs d'asile. Nous avons en effet proposé des centres d'hébergement en Slovaquie, où ces demandeurs attendent le traitement de leur dossier en Autriche ou en Suède. Il y a peu de demandes d'asile pour rester en Slovaquie, sans doute car notre système n'est pas aussi bien doté que celui d'autres pays.

En ce qui concerne les accords entre l'Union européenne et la Turquie, il faut dire clairement que les résultats sont pour l'instant mitigés, même si ces accords ont quand même permis de fermer la route balkanique de l'arrivée des migrants. Cela implique que les obligations soient respectées des deux côtés, notamment pour les visas.

La question des travailleurs détachés est très sensible pour plusieurs nouveaux membres de l'Union. La proposition présentée par la Commission européenne divise, comme le montre le « carton jaune » présenté par onze pays, dont la Slovaquie. Il y a bien sûr des différences entre les salaires et le niveau de protection sociale et il s'agira de trouver de bons compromis entre les pays de l'Union. Nous avons bien compris la déclaration du Premier ministre français, et nous allons continuer la négociation. Je vous rejoins sur l'idée que cette question a joué un rôle important dans le débat lors de la campagne du référendum britannique. Mais il faut aussi avoir à l'esprit que les conditions économiques sont différentes pour les pays de l'Europe orientale, cette réalité ne doit pas être oubliée. Pour l'instant, le compromis n'a pas encore été atteint.

Concernant les accords transatlantiques, c'est la Commission européenne qui négocie avec les partenaires, non la présidence. Toutefois, notre priorité politique sera de maintenir des positions acceptables pour chaque pays de l'Union. Si certains pays ne sont pas à l'aise avec certains articles des traités, cela devra être pris en compte. La Slovaquie par exemple est en désaccord avec certains points des deux traités. La présidence slovaque ne sera pas dans l'optique de conclure ces traités à tout prix, d'autant que des questions plus urgentes se posent aujourd'hui. Nous voulons des traités équilibrés, et nous serons attachés à travailler pour des relations transatlantiques équilibrées également dans le domaine de la défense, après la réunion de l'OTAN à Varsovie.

La Slovaquie, et en particulier le parti social-démocrate dans la coalition actuellement au pouvoir, attachent beaucoup d'importance à la dimension sociale de l'Union européenne. Nous ne sommes pas favorables aux sanctions contre des pays qui font tous les efforts possibles pour faire redémarrer leur économie. Il y a évidemment des règles à respecter, mais si les progrès sont visibles pour résorber les déficits, nous estimons qu'il faut soutenir ces pays et les investissements qui y ont été déjà réalisés.

Sur le sujet de la francophonie, il y a effectivement trois lycées francophones en Slovaquie. La coopération économique est très poussée avec la France, qui est le cinquième partenaire commercial de la Slovaquie, avec plus de cinq milliards d'euros investis en Slovaquie, et plus de quatre cents sociétés françaises sur notre territoire.

Le partenariat oriental est évidemment une question importante pour la Slovaquie, notamment car son approvisionnement en gaz et en pétrole est essentiellement originaire de Russie et passe par les gazoducs et oléoducs de l'Ukraine. Maintenir une Ukraine stable et démocratique est une priorité absolue pour nous, et nous soutenons les initiatives du Président Hollande et de la chancelière Merkel dans le format du « groupe de Normandie » pour trouver une solution. La présidence soutiendra toutes les initiatives pour remplir les critères de l'Accord de Minsk.

La Slovaquie appartient aux onze pays qui ont signé l'acte en faveur de la taxation des transactions financières, nous sommes d'accord pour faire évoluer les choses sur ce sujet pendant notre présidence.

Il n'y a pas de majorité par un seul parti en Slovaquie. Le gouvernement est une coalition issue d'élections proportionnelles depuis les débuts du régime représentatif, avec l'exception des années de communisme. Les compromis ne sont pas toujours aisés à trouver entre les partis au gouvernement, mais les priorités pour la présidence de l'Union font l'objet d'un consensus.

Après la fermeture des passages par les Balkans, la route de la Méditerranée est maintenant plus vulnérable, et nous sommes prêts à envoyer plus de cent cinquante policiers slovaques pour assurer le rôle de garde-frontières, en plus du soutien financier apporté à la Grèce. Nous sommes également prêts à aider l'Italie.

Nos deux ambitions principales sont de renforcer la solidité de l'Union et de rendre confiance aux citoyens. La Slovaquie a pleinement profité de l'entrée dans l'Union européenne et nous voulons être dans le noyau dur de l'intégration européenne. La Slovaquie est un petit pays de cinq millions d'habitants à l'économie très ouverte, l'Union est notre seule protection pour affronter la mondialisation.

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