Je partage l'analyse, l'enthousiasme et la lucidité du rapporteur au fond. Avec Romain Colas, nous avons formé tous les trois une belle équipe qui a su nouer avec nos collègues du Sénat et avec la société civile un dialogue exemplaire en matière de construction législative.
Nous souhaitions nous aussi que la CMP aboutisse ; nous y étions prêts. Toutefois, j'approuve entièrement les principes et les lignes politiques qui ont prévalu. Les divergences étaient trop importantes pour que nous cédions sur des points qui nous tenaient à coeur et à propos desquels nous avions rendez-vous avec l'histoire en cette fin de législature.
S'agissant du volet économique, toutefois, nous étions parvenus à un parfait accord avec le Sénat après un dialogue avec les parties prenantes – le monde agricole dans sa diversité, souvent ignorée, et le Gouvernement – qui a permis ce que j'ai appelé un « alignement des astres » assez rare. Un consensus s'est ainsi fait jour entre les responsables professionnels, les politiques et le Gouvernement pour apporter d'importantes corrections au libéralisme qui a provoqué, avec la fin des quotas laitiers et la loi de modernisation de l'économie (LME), les crises structurelles que nous connaissons aujourd'hui, notamment dans le secteur de l'élevage.
Ce consensus, né de l'urgence économique et du principe de responsabilité, s'est traduit hier en commission des Affaires économiques par l'approbation unanime de toutes les dispositions reprenant les accords de principe auxquels nous étions prêts au Sénat. Sans les énumérer en détail, je citerai l'équilibre retrouvé au sein des filières en amont comme en aval, la non-cessibilité et la non-marchandisation des droits à produire, ainsi qu'un dispositif né du débat parlementaire en commission des Affaires économiques et qui complète la loi d'avenir pour l'agriculture s'agissant de la lutte contre l'accaparement des terres, la concentration du foncier et la prédation des multinationales dans notre pays. Nous en éprouvons une certaine fierté : notre commission a été fidèle à notre pacte avec le Sénat et nous allons donc, si tout va bien, vers un vote conforme.
En ce qui concerne l'artisanat, l'essentiel a été réglé du point de vue économique par un rééquilibrage des dispositions voulues par le Gouvernement, dont les intentions nous semblaient trop libérales. Favoriser la création des entreprises ne devait pas conduire à déstabiliser le pacte solide qui nous lie concernant l'artisanat. Des solutions ont été trouvées, qui ont elles aussi suscité l'unanimité. Je sors d'une réunion que j'ai animée avec le sénateur Daniel Gremillet et qui rassemblait les chambres de commerce et les chambres de métiers et de l'artisanat en vue de trouver un compromis à propos du droit de suite, objet d'un conflit sous-jacent entre ces deux unités consulaires. Nous ne désespérons pas d'obtenir un accord sur ce point avant la fin de la navette parlementaire, ou du moins un compromis raisonnable ouvrant la voie à l'unification des chambres économiques, un objectif que nous partageons tous.
J'ai cru comprendre que le Sénat se réunirait à nouveau début novembre : cela me paraît tard compte tenu de l'urgence économique. Nous ne pouvons pas engager un nouveau cycle de négociations dans les filières du lait, de l'élevage et dans l'ensemble des filières agricoles sur les fondements qui ont provoqué les crises des deux années passées. J'en appelle donc à la responsabilité de tous. À l'Assemblée, le calendrier parlementaire a tenu compte de l'urgence. Je souhaite que, pour les mêmes raisons, la date de la discussion au Sénat soit avancée, afin que nous n'arrivions pas à la fin de l'année sans décrets apportant des solutions pratiques aux problèmes récurrents dont souffre notre économie rurale.