La philosophie de ces dispositions est d'éviter l'accaparement des terres et d'améliorer ce qui a été distendu par les lois de modernisation votées au cours des législatures précédentes. Au cours des dix dernières années, le contrôle des structures a été relâché et le suivi des dossiers a été fait avec une certaine désinvolture.
Nous avons constaté que des brèches importantes permettent non seulement un agrandissement exagéré sur nos territoires, mais également l'arrivée de capitaux extérieurs, et le contrôle par des sociétés multinationales. C'est un phénomène mondial, dont la France est relativement protégée hors des zones à très haute valeur ajoutée et des zones frontalières. Mais ce phénomène est suffisamment préoccupant pour que nous cherchions à améliorer la loi. C'est une initiative du Parlement qui avait été portée dans la loi d'avenir pour l'agriculture, et que nous avons reprise dans ce projet de loi.
Nous avions défendu ici, en première lecture, la spécialisation des sociétés qui portent du foncier, et prévu des restrictions sur l'entrée dans une société agricole : on ne peut y entrer par opportunité ou pour éviter le contrôle des structures, il faut y entrer pour une période significative – nous avions prévu dix ans.
Les dispositions ont évolué, les intentions que nous avions portées mais que le Gouvernement avait demandé de rejeter en séance sont revenues au Sénat, qui a bâti un dispositif complet. Dans ce cadre, les SAFER peuvent désormais intervenir sur des majorités ou des minorités de blocage dans toutes les sociétés. Par ailleurs, toutes les transactions foncières vont orienter le portage du foncier vers des sociétés préemptables et contrôlables par les SAFER. Nous en revenons donc à l'intention initiale de l'Assemblée nationale. Dès lors, il est inutile d'imposer des contraintes exagérées à celui qui entre dans une société. La période de dix ans proposée par Mme Michèle Bonneton n'est plus justifiée, puisque cette société sera contrôlable par un autre biais.
Dans un esprit d'accord avec le Sénat, nous avons considéré que la période de cinq ans était raisonnable, suffisamment dissuasive contre les tentatives de manipulation. En cas de manipulation avérée, nous avons une corde de rappel grâce au pouvoir de préemption.
Sur ces questions de droit des sociétés et de propriété, le Conseil constitutionnel est toujours extrêmement vigilant. Il ne s'agit donc pas d'être plus ou moins volontariste, mais d'aller le plus loin possible, c'est-à-dire d'être réaliste. Avis défavorable à l'amendement de Mme Michèle Bonneton, afin de préserver l'accord avec le Sénat.