S'il est quasi-systématique que les projets de loi de ratification d'ordonnances soient déposés dans le délai imparti dans la loi d'habilitation – ici, vingt-quatre mois à partir de la promulgation de la loi relative à la consommation du 17 mars 2014 –, faute de quoi l'ordonnance deviendrait caduque, il est plus rare que ces projets de loi soient inscrits à l'ordre du jour et examinés. Cela s'est avéré nécessaire aujourd'hui pour sécuriser le dispositif juridique et ainsi parachever un long travail.
Malgré une codification relativement récente issue de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993, l'architecture du code de la consommation était devenue inadaptée et peu accessible pour ses utilisateurs, du fait des nombreuses réformes intervenues dans le domaine du droit de la consommation et de l'important mouvement de transposition de normes européennes depuis sa création.
Par deux fois, en 2008 et en 2010, le Parlement avait habilité le Gouvernement à procéder à la refonte de ce code par voie d'ordonnance mais, pour diverses raisons, ces deux habilitations n'ont pas abouti. Une troisième fois, lors de l'examen de la loi relative à la consommation, le Parlement a donné une telle habilitation au Gouvernement, fixant un délai de vingt-quatre mois à compter de la promulgation de la loi. C'est chose faite puisque la loi a été promulguée le 17 mars 2014 et l'ordonnance a été publiée le 14 mars 2016 !
Conformément à l'habilitation parlementaire, la recodification de la partie législative a été opérée à droit constant, sous réserve de modifications rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, harmoniser l'état du droit, remédier aux éventuelles erreurs ou insuffisances de codification et abroger les dispositions devenues sans objet.
Le projet avait principalement pour objet d'aménager le plan du code et de déterminer une clé de répartition plus rationnelle entre les différents livres. Ainsi, 1 113 articles législatifs ont été redistribués dans huit nouveaux livres, qui se substituent aux cinq livres anciens. Chaque livre comprend les règles, les dispositifs de contrôle et les sanctions administratives, civiles et pénales.
Pour ajouter encore à l'ampleur de la tâche, parallèlement à ce volet législatif, était conduit le même travail au niveau réglementaire, qui a abouti au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016, le nouveau code devant entrer en vigueur au 1er juillet 2016.
Si ce travail de clarification était nécessaire et permettra certainement un meilleur accès au droit, il s'ensuivra inévitablement une période transitoire un peu compliquée pour les utilisateurs habitués à l'ancien code. Pour faciliter cette transition, le ministère a mis en ligne une table de concordance permettant de faire l'aller-retour entre l'ancienne et la nouvelle numérotation.
La seconde ordonnance qu'il nous est demandé de ratifier concerne les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d'habitation. Cette ordonnance a été prise en application de l'article 14 de la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière. Elle avait pour objectif de transposer la directive 201417UE du Parlement européen et du Conseil du 4 février 2014 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel, qui avait été élaborée au niveau européen suite à la crise des subprimes et face à la prépondérance, dans certains pays européens, d'un système de crédit hypothécaire où le crédit est accordé en référence au prix du bien et non aux capacités de remboursement de l'emprunteur.
Si cette transposition a nécessité de nombreux ajustements techniques et des consultations répétées des acteurs du marché, elle n'a pas bouleversé le droit français du crédit immobilier à usage d'habitation, qui était déjà extrêmement développé et particulièrement protecteur pour les particuliers. Du reste, nous ne sommes pas les plus concernés par les risques liés au crédit hypothécaire, ainsi que l'a confirmé le rapport élaboré par notre collègue Christophe Caresche au nom de la commission des finances, daté du 10 septembre 2014.
La directive prévoit, par exemple, la professionnalisation de l'activité d'évaluation du prix des biens immobiliers dans le cadre de l'octroi de crédits hypothécaires. Or, en France, l'impact de cette mesure restera marginal tant ce type de crédit est minoritaire. D'ailleurs, dans la résolution proposée à mon initiative et celle de quelques collègues de cette commission et adoptée par la Représentation nationale à l'unanimité le 13 juin dernier, nous avons souligné que nous voulions, dans le cadre des négociations en cours au comité de Bâle, protéger le système français de crédit immobilier, qui, contrairement à d'autres, fonctionne bien et a fait preuve d'une grande résilience face à la crise de 2008, notamment.
Deux nouveautés découlant de la directive entreront néanmoins en vigueur le 1er octobre : la fiche d'information standardisée européenne (FISE), qui permet à l'emprunteur de déterminer si le contrat de crédit proposé correspond à ses besoins et de comparer les offres entre elles ; le taux annuel effectif global (TAEG), déjà en vigueur pour le calcul des crédits à la consommation, qui remplacera notre actuel taux effectif global (TEG), l'objectif étant, ici aussi, de permettre à l'emprunteur de comparer plus facilement les différentes offres.
Le projet de loi ne se contente pas d'une ratification sèche des deux ordonnances : des modifications rédactionnelles sont proposées afin de corriger telle ou telle erreur de référence ou tirer, dans un autre code, une conséquence qui avait été initialement omise.
Le projet de loi comporte aussi une mesure nouvelle, qui relève toutefois de la légistique et qui fait suite à une recommandation du Conseil d'État. L'article 5 simplifie ainsi le dispositif de mise en oeuvre des obligations en matière de sécurité et de conformité des produits et services. En effet, l'imbrication de ces deux notions constitue une source de complexité et d'insécurité juridique, la première étant une composante de la seconde. Je vous renvoie à l'étude d'impact pour les détails.
Le travail s'est poursuivi après le dépôt du projet de loi, le 8 juin dernier, et sont apparus, ici ou là, des oublis, parfois de petites erreurs dans la codification, ce qui n'est guère étonnant compte tenu de l'ampleur du travail accompli. Je vous proposerai donc un certain nombre d'amendements visant à corriger ces quelques imprécisions et erreurs de référence, sans que, pour l'essentiel, le droit existant en soit modifié.
Reste enfin à poursuivre ce travail de recodification pour les dispositions du code de la consommation relatives à l'outre-mer.