Le MEDEF n'a pas d'opposition de principe au prélèvement à la source, mais cette réforme présente selon nous d'extraordinaires difficultés opérationnelles.
J'ai été interrogé sur les échanges que nous avons eus avec la DGFiP. Tout dépend de ce que l'on appelle un « échange ». Nous avons été reçus à trois reprises, mais, sans polémiquer, car l'attitude de Bercy reste la sienne quel que soit le gouvernement en place, on s'est contenté de nous expliquer ce qui allait être fait, et comment cela allait être fait. Nous avons demandé qu'une commission plus technique aborde véritablement les sujets : elle se réunit demain pour la première fois. La concertation commence. Cela nous laisse un an et demi pour travailler, délai que nous estimons insuffisant.
Madame la Rapporteure générale, s'agissant d'un benchmark avec les organisations patronales étrangères, le problème, c'est que la Confederation of British Industry (CBI) a mis en place le prélèvement à la source il y a trente ans, et que son dispositif n'a rien à voir avec le nôtre. Là-bas, cela rejoint un peu le propos de M. Lefebvre, l'impôt sur le revenu est quasiment une CSG à trois taux : l'une des trois tranches d'imposition s'applique automatiquement selon le montant de votre salaire. Il n'y a ni « familialisation » ni « conjugalisation » de l'impôt, et les trois niches fiscales existantes ne sont pas prises en compte. En conséquence, la question de la confidentialité ne se pose pas.
Le prélèvement à la source de la CSG ne pose pas de problème puisque cette dernière est universelle et que son taux est unique, quel que soit le contrat de travail. Au contraire, le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu nous introduit dans un monde inconnu, avec la « conjugalisation », l'existence de niches fiscales, et la possibilité de faire varier les taux. Tout cela pose de nombreuses questions.
S'agissant des contreparties financières, nous ne disposons que du seul exemple de la Suisse, où les entreprises retiennent 2 % du prélèvement à la source pour frais de gestion. Je suis incapable de dire combien nous coûtera la réforme. Les coûts de mise en place seront certainement plus élevés que les coûts de gestion dans la durée. Une fois les logiciels modifiés, les choses devraient être plus simples. J'insiste toutefois sur le coût caché de management. Il s'agit d'un point fondamental, notamment dans les PME, où il faudra que le patron ou la direction des ressources humaines consacre du temps à répondre aux questions des salariés et à leur expliquer la réforme.
Le travail d'un patron, monsieur Fauré, ce n'est pas seulement d'évaluer la performance : les augmentations de salaire et l'attribution des primes et bonus se font aussi dans un contexte général. D'ailleurs, soyons honnêtes ! Aujourd'hui, surtout s'il vit sur place, un patron de PME connaît déjà un peu la situation de ses salariés. Nous avons demandé à la DGFiP le nombre de foyers au sein desquels il existe un fort écart de revenu ou de patrimoine. Nous n'avons pas la réponse, mais les patrons nous disent qu'ils ont l'impression que cela existe sur le terrain. Lorsqu'on s'apercevra qu'un salarié qui gagne le SMIC est imposé à 30 %, cela risque de poser des problèmes…