Intervention de Annie Genevard

Réunion du 21 septembre 2016 à 16h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnnie Genevard, rapporteure :

Nous voilà donc parvenus à l'acte II de la loi relative au développement et à la protection de la montagne, attendu par beaucoup. Je tiens à vous faire part du plaisir que j'ai à vous présenter un texte qui est le fruit d'un travail que nous avons commencé il y a presque deux ans à la suite de l'engagement pris à Chambéry de réexaminer la loi fondatrice de 1985. Le travail que nous avons accompli, Mme Bernadette Laclais et moi-même, s'inscrit parfaitement dans l'esprit de ce qu'avaient voulu les initiateurs de cette loi.

Vous l'avez dit, Monsieur le ministre, permettez-moi d'y revenir, le présent texte est le produit d'un enchaînement heureux : lors du trentième anniversaire de l'ANEM, célébré à Chambéry, le Premier ministre a pris des engagements et nous a confié la mission que l'on sait, à Mme Bernadette Laclais et à moi-même – et je tiens à souligner tout le plaisir que nous avons eu à travailler ensemble. Puis le Premier ministre nous a donné une feuille de route et le tout a abouti au projet de loi que nous sommes sur le point d'examiner. Vous avez même pris l'engagement, Monsieur le ministre, de continuer de nous associer à la rédaction des textes d'application – une démarche profondément originale. Profondément original également est le fait que l'on ait nommé deux rapporteures, chacune d'une sensibilité différente, ce qui du reste correspond à l'esprit de la loi de 1985, j'y ai fait allusion, puisque la principale association d'élus de montagne, l'ANEM, est codirigée par un président et un secrétaire général, tous deux de sensibilité différente. J'en profite pour saluer Mme Marie-Noëlle Battistel, secrétaire générale de cette association.

Je reviens sur la « co-écriture » du texte avec le concours des membres de votre cabinet, Monsieur le ministre, dont je salue le grand professionnalisme, celui des deux rapporteures mais aussi celui des membres de l'ANEM et du CNM – représenté ici par M. Joël Giraud avec lequel il a été très agréable de travailler et que je salue.

Au cours des auditions que nous avons menées avec Mme Bernadette Laclais, dans le cadre de la rédaction de notre rapport au Premier ministre sur l'acte II de la loi montagne, nous avons pu constater l'attachement des acteurs locaux au texte de 1985 et, comme je le soulignais, nous sommes restées très fidèles à l'esprit de cette loi. Mais le contexte, qu'il soit social, environnemental ou administratif a changé et il convenait de s'y adapter. L'exemple sans doute le plus significatif est celui du numérique. Certains sujets, eux, sont restés pendants et nous devrons continuer à les examiner : ceux concernant la vie quotidienne des habitants et l'accès à un certain nombre de services, points sur lesquels nous pensons pouvoir enrichir le texte, qu'il s'agisse de l'école, de la santé, des infrastructures… La montagne cristallise en effet certaines difficultés d'accès à certains services.

Notre rapport au Premier ministre, remis au mois de juillet 2015, contient une trentaine de propositions pour un nouveau « pacte » entre la Nation et la montagne. Toutes n'ont pas pu être intégrées dans le projet puisque n'étant pas de nature législative. Néanmoins, nous tâcherons de donner une portée législative à plusieurs d'entre elles.

Pour améliorer l'efficacité de la loi montagne, le rapport prévoyait de renforcer la solidarité nationale envers les territoires de montagne et d'en moderniser la gouvernance. L'acte II entend donc intégrer ces évolutions institutionnelles nées en particulier de la décentralisation. Nous proposions, dans le rapport, de renforcer le rôle de l'État et des collectivités territoriales. Le texte va dans ce sens et nous nous en réjouissons. Il renforce en effet le rôle actif de l'État et des collectivités qui n'interviendront plus simplement comme soutien aux populations de montagne mais devront désormais mettre en oeuvre une politique nationale qui réponde aux spécificités de la montagne.

À cet égard, nous avons été frappées, au début de nos auditions, par le constat établi par nos interlocuteurs selon lequel les politiques publiques prenaient de moins en moins en compte la spécificité de la montagne. Voilà qui en dit long sur la déperdition de la notion même d'approches ciblées. Aussi l'acte II de la loi montagne semble-t-il pour le moins pertinent puisqu'il vise en particulier à rappeler que les territoires de montagne ne sont pas tout à fait comme les autres et qu'ils ont besoin d'être encouragés en matière d'innovations techniques, économiques, institutionnelles ou « sociétales ». Il s'agit donc de promouvoir les travaux de recherche et d'observation, concernant ces territoires, faute de quoi on ne pourra apporter les bonnes solutions aux problèmes posés.

Nous proposions également, dans le rapport, de renforcer le rôle des organisations propres à la gouvernance des territoires de montagne que sont le CNM et les comités de massif, avec, toujours, le souci que le dialogue entre l'échelon national et l'échelon territorial ne soit pas interrompu. Or le texte va bien dans le sens d'une meilleure articulation, en prévoyant notamment un élargissement des missions du CNM qui, désormais, s'exprimera sur tous les projets de loi et tous les décrets concernant la montagne.

Nous saluons les avancées du texte en ce qui concerne le travail des saisonniers, l'immobilier de loisir ou le tourisme. Toutefois, certaines attentes du monde de la montagne sont modérément ou faiblement prises en compte. L'agriculture occupait en effet une place très importante dans la loi de 1985 ; aussi le chapitre relatif à l'agriculture et à la forêt mériterait-il, ici, d'être développé. Nous souhaitons savoir, sur ce point, quelles sont vos propositions, Monsieur le ministre.

La loi de 1985 a été conçue pour compenser les handicaps liés à la géographie de la montagne. Progressivement, nous avons voulu valoriser ce que la montagne apportait à la Nation car elle n'apporte pas seulement à ceux qui y vivent mais à ceux qui la visitent, y séjournent, y mènent des activités de loisir, de tourisme… Comment, donc, valoriser ce qu'on appelle les aménités ? Nous ne devons pas oublier pour autant ce qui reste toujours pertinent : la compensation du handicap – en particulier pour ce qui est de l'agriculture, je pense aux surcoûts associés à la construction ou au maintien des bâtiments d'élevage, de stockage, aux outils de production et de transformation… le tout dans une approche territoriale qui garantisse le développement économique et le maintien d'une population active dans ces territoires.

Quid du label « Montagne », qui pourrait, dans une période très difficile pour certains territoires, valoriser des produits de montagne ? En matière numérique, quels sont vos engagements pour assurer un meilleur déploiement des infrastructures ? On sait qu'il est difficile de contraindre les opérateurs privés mais le sujet est particulièrement sensible. Enfin, d'autres collègues aborderont la question de la protection des zones naturelles.

En conclusion, ce texte me paraît utile et nous prendrons part à son examen, à son amélioration et à son aboutissement avec grand bonheur.

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