Intervention de Sébastien Denaja

Séance en hémicycle du 28 septembre 2016 à 21h30
Transparence lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique — Article 10

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Denaja, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

Cet amendement propose de faire de certaines condamnations pour atteinte à la probité des cas d’incompatibilité avec des candidatures à des élections. En commission, nous avions eu un long débat sur ce sujet. En fait, ce que vous voulez créer, c’est une sorte de quitus pénal, afin de rendre inéligible toute personne ayant fait l’objet d’une condamnation pour atteinte à la probité.

Naturellement, nous partageons tous votre intention, madame Guittet, et nous comprenons la démarche, mais il y a quelques obstacles juridiques. Ainsi, ces dispositions, si elles étaient adoptées, ne concerneraient que les élus locaux, et non les députés et les sénateurs parce qu’il faudrait pour cela une loi organique.

Comme je l’avais souligné lors des débats de la première lecture en commission, alors que vous avez, comme nous tous, le souci de rétablir la confiance entre les élus et les citoyens, nous donnerions une curieuse image si les députés adoptaient des dispositions qui ne s’appliquent pas à eux, qui ne sont pas valables pour les prochaines élections législatives. Il est dommage d’ailleurs que les tenants de cette modification ne l’aient pas proposée au moment opportun, c’est-à-dire il y a quelques mois, lorsque cet hémicycle débattait des textes relatifs aux élections présidentielles et législatives.

J’appelle donc votre attention sur le fait que votre amendement serait applicable non pas aux parlementaires, mais simplement aux élus locaux, c’est-à-dire pour 2020. En effet, nous ne sommes pas en train de débattre d’un texte organique. Or, pour modifier le statut électoral des députés, il faut un texte organique.

Ensuite, il y a selon la commission des lois un risque de censure à considérer, l’instauration d’une sanction automatique d’inéligibilité violant le principe constitutionnel d’individualisation des peines. Enfin, le casier B2 n’est pas accessible à la demande des intéressés.

C’est pour toutes ces raisons que la commission est défavorable à cet amendement.

La confiance entre les élus et les citoyens, ce sont aussi les lois de 2013, que j’ai évoquées dans la discussion générale, qui permettent de la rétablir ! C’est la création de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, celle du Parquet national financier, qui, on le voit, agit avec célérité dans des affaires retentissantes !

Le rétablissement de la confiance entre les élus et les citoyens, c’est aussi le vote en première lecture, confirmé à ma grande surprise par le Sénat, parce que la droite ici s’y était opposée, de l’amendement que je vous avais proposé rendant la peine complémentaire d’inéligibilité obligatoire pour les élus condamnés pour des atteintes à la probité. Toute la droite ici s’y était opposée, mais cela a été voté conforme au Sénat et ce sera dans le texte final !

Le présent projet de loi permet donc déjà beaucoup d’avancées. À titre personnel je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée, mais, pour des raisons purement juridiques, la commission des lois émet un avis défavorable.

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