L’un des sujets centraux de ce projet de loi est de clarifier la relation entre les pouvoirs publics et les lobbyistes. Pour ce qui est des assemblées parlementaires, cette démarche n’est pas nouvelle – elle a été engagée à l’Assemblée nationale sous la précédente législature. Le véritable apport du projet de loi dit « Sapin 2 » est d’édicter des règles de nature législative, qui s’opposeront notamment à l’exécutif. Au départ, cela va donc plutôt dans le bon sens.
Je voudrais tout de même insister sur trois points qui nous préoccupent et sont repris dans nos amendements.
Tout d’abord, il s’agit évidemment de la séparation des pouvoirs, l’un des points sur lesquels la commission mixte paritaire avec le Sénat a achoppé. Le répertoire commun peut exister mais dans des conditions qui préservent au maximum l’autonomie de chacune de nos assemblées. Le groupe Les Républicains a déposé à nouveau un amendement visant à proposer une solution plus sécurisée pour tous sur le plan constitutionnel ; j’espère que le Gouvernement l’examinera avec attention.
Par ailleurs, il convient de ne pas trop nous disperser, sur ce sujet comme sur d’autres. La nouvelle rédaction du rapporteur introduit très largement tous les élus locaux dans le champ de l’article 13. Il me semble que cela va très loin – je m’étonne d’ailleurs, dans cette maison toujours prompte à avancer l’article 40, de ce que personne n’ait vu dans cette affaire un alourdissement des charges publiques, car le travail de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, la HATVP, s’en trouvera largement accru.
En outre, la spécificité du lobbying en France, par rapport à des systèmes en vigueur à l’étranger, dans les pays anglo-saxons, que vous connaissez très bien, monsieur le ministre, c’est que nous venons seulement de le découvrir. Pourquoi ? Pardon de le dire, cela ne se fait guère : parce qu’il existe une espèce de monopole de fait des anciens élèves des écoles du service public, ces anciens hauts fonctionnaires partis dans le privé, qui valorisent leur carnet d’adresses – et je ne pense pas uniquement aux inspecteurs des finances devenus banquiers d’affaires…
Ce point est au moins aussi important que le fait de demander au petit cabinet de lobbyistes qui réalise 100 000 euros de chiffre d’affaires par an de remplir un questionnaire de douze pages.
Malheureusement, monsieur le ministre, dans le texte que vous nous proposez, vous faites preuve d’une timidité intégrale puisqu’il ne contient pratiquement aucune disposition, à l’initiative du Gouvernement, susceptible d’introduire un peu plus de transparence sur ce sujet, pourtant extrêmement important et qui soulève des questions de transparence. Cela aurait pourtant permis de faire un pas dans le sens de la modernisation de l’économie, qui est un grand chantier. Hélas ! à ce stade, nous restons sur notre faim.