Monsieur le ministre, vous avez donné une vision très utile et très précise de la façon dont les procédures vont être suivies et de ce que la France attend à cet égard. L'on voit bien – et c'est logique – qu'il y aura un mixte, dans l'équipe de négociation, entre représentants de la Commission et représentants du Conseil. L'on ne saurait avoir que la Commission, comme en matière d'accords commerciaux, ni seulement le Conseil, malgré l'importance politique du sujet.
Du côté français, comment opérera-t-on la synthèse ? Qui sera le chef négociateur français dans ce cénacle autour du représentant nommé par la Commission ? Vous nous annoncez que ce dernier sera le chef de négociation : est-ce décidé ou est-ce la vision française des choses ?
Dans ce dispositif et parmi ces six catégories d'accords, il y a en fait trois grands blocs : la négociation dans le cadre de l'article 50, prévoyant une sortie au plus tard deux ans après son activation ; le statut futur, qui prendra plus de temps ; la renégociation de tous les accords commerciaux. Sur ces deux derniers blocs, avez-vous réfléchi au calendrier possible ? Cette négociation va, sous ces différentes formes, s'étaler longtemps.
Même si j'ai confiance dans la capacité d'organisation de notre pays, comment va-t-on éviter, devant la masse des sujets, d'être noyé politiquement et de ne plus réfléchir à l'avenir de l'Union européenne à vingt-sept ?
Pouvez-vous aussi nous en dire un peu plus sur les lignes rouges françaises ? Certes, j'espère que nous continuerons à tenir bon sur le caractère indissociable des quatre libertés, notamment la liberté de circulation. Mais il est évident que le Royaume-Uni essaiera d'avoir le beurre et l'argent du beurre ou, comme l'on dit là-bas, d'avoir le gâteau et de le manger en même temps. Ce sera le point d'achoppement principal.
Quelle sera l'attitude de nos partenaires ? À Bratislava, l'unité affichée au mois de juin s'est maintenue sur les quatre libertés. Mais cela va-t-il durer et quelle sera la position de Berlin ? La semaine prochaine, la commission des affaires étrangères que je préside se réunira à Berlin avec ses homologues polonaise et allemande. Mon homologue allemand a signé le papier du centre de réflexion Bruegel élaboré notamment par Jean Pisani-Ferry. Avant même qu'aucune négociation ne soit engagée, un statut ad hoc y est déjà envisagé pour le Royaume-Uni, avec des dérogations substantielles à la liberté de circulation, mais aussi un droit de regard sur les activités de l'Union européenne. Or nous savons comment ce simple droit de regard finit souvent par être utilisé à des fins de réelle participation. Voilà ce que j'ai dit à mon homologue allemand, avec lequel j'ai d'ailleurs l'habitude de signer des positions communes. N'y a-t-il pas un risque que l'Allemagne dévie de ses positions de départ, en entraînant la Pologne avec elle ?