Intervention de Ibrahim Aboubacar

Réunion du 27 septembre 2016 à 17h00
Délégation aux outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIbrahim Aboubacar :

Monsieur le président, les membres de la Délégation sont invités à un échange de vue d'ordre général sur ce projet de loi de programmation relatif à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.

Pour notre part, et je m'exprime en tant que responsable du groupe socialiste, nous nous inscrivons résolument dans la volonté, partagée avec le Gouvernement, d'enrichir ce texte.

Comme vous l'avez précisé, la commission des affaires économiques et celle des affaires sociales ont travaillé en ce sens. De mon côté, je me contenterai de souligner les quelques points qui me paraissent indispensables pour donner à la fois de la force et de la cohérence au texte.

Nous considérons que ce texte est une étape extrêmement importante pour le développement de l'ensemble de nos outre-mer, quel que soit leur statut juridique. Mais il doit être à la hauteur des attentes de nos compatriotes des outre-mer. En effet, depuis les évènements de 2009, ceux-ci traversent des moments difficiles. Le ressenti varie d'un territoire à un autre, en fonction des réalités et des aspirations des populations, mais cette nouvelle étape est nécessaire.

D'abord, nous devons donner de la force à ce texte.

Cela signifie que les dispositions que nous allons adopter devront permettre de mobiliser les acteurs qui seront amenés à s'engager dans ce processus, ce qui suppose que ceux-ci aient confiance dans les dispositifs que nous mettrons entre leurs mains. Pour y parvenir, plusieurs points devront être acquis.

Premièrement, à l'issue des débats, il faudra que nous y voyions clair sur les différents moyens à mettre en place. Il est question d'inviter les uns et les autres à élaborer des plans de convergence. Or ces plans de convergence doivent pouvoir s'appuyer sur des moyens, notamment de développement économique, et faire appel à l'innovation et à l'imagination. Voilà pourquoi, si nous voulons que ces plans de convergence soient innovants, nous devrons nous-mêmes, en amont, faire preuve d'innovation et d'imagination pour déterminer les moyens dont pourront disposer les acteurs pour élaborer ces plans de convergence.

Deuxièmement, les plans de convergence que nous allons mettre en place auront une durée de dix à vingt ans – selon les territoires. C'est évidemment incompatible avec des plans de développement économique qui seraient remis en cause ou modifiés tous les deux ou trois ans, avec une incertitude qui pèserait sur les outils économiques. D'une manière ou d'une autre, nous devrons faire en sorte que, lorsque ces plans de convergence auront été établis et signés, on dispose d'une certaine visibilité. Celle-ci passe par la permanence des outils qui seront appelés à venir à l'appui de ce processus de long terme. Autrement, le long terme du dispositif sera difficile à établir.

Troisièmement, il faudra obtenir l'adhésion des populations. Cela suppose que nous soyons clairs sur cet objectif d'égalité réelle, qui a suscité un très grand espoir dans nos collectivités des outre-mer. Et cela suppose qu'un certain nombre de questions soient tranchées dans les différentes catégories de collectivités.

Dans les quatre anciens départements d'outre-mer, au terme de ce processus, il faudra que nous y voyions clair sur la stratégie d'achèvement de l'égalité sociale à suivre. Car visiblement, l'égalité sociale n'y est pas achevée.

Dans le dernier département d'outre-mer, qui a été créé en 2011, c'est-à-dire Mayotte, l'objectif d'égalité réelle se construira en parallèle de l'objectif d'égalité sociale décrit dans « Mayotte 2025 ». Quelques mesures figurent dans le titre III. Au terme de notre exercice, la stratégie gouvernementale – notre stratégie, puisque c'est nous qui délibérons – pour mettre en place de l'égalité réelle dans ce territoire devra être claire.

Les autres collectivités de l'article 74 sont invitées à rentrer dans ce processus. De la même façon, il faudra que nous ayons une vision claire de la manière dont ces collectivités pourront s'y inscrire. Il faudra renforcer tout particulièrement les dispositifs afférents à ces collectivités pour que cette question de l'égalité réelle puisse s'exprimer pleinement, à leur façon et selon leurs attentes.

Ce sont là des préalables qu'il me semblait indispensable de rappeler, dans le cadre du débat général auquel notre président nous invite. Mais ce débat général ne devra pas tourner à la cacophonie. Et j'en viens à la deuxième exigence : il faut donner de la cohérence au texte.

Nous sommes invités à mettre en place des plans de convergence. J'ai dit tout à l'heure que nous devions faire preuve d'innovation et d'imagination. Mais imagination ne veut pas dire foisonnement. Nous devrons préciser clairement, à travers les dispositions que nous mettrons dans le texte, le contenu de ces plans de convergence. De la même manière, les différents dispositifs expérimentaux qui ont été évoqués n'excluent pas une certaine cohérence.

J'en viens au dispositif de suivi et de pilotage.

Le dispositif de pilotage vers lequel nous nous dirigeons passerait par le renforcement de la Commission nationale d'évaluation des politiques de l'État outre-mer (CNEPEOM). Un amendement a été déposé en ce sens pour étoffer le dispositif de pilotage de cette Commission.

Le dispositif de suivi de la CNEPEOM est annuel. Peut-être faudra-t-il réfléchir à un dispositif d'évaluation quinquennal, un peu plus musclé, pour que l'on puisse distinguer les travaux de suivi annuel des travaux de bilan qui seraient réalisés à des moments déterminés.

Enfin, au-delà de ces dispositifs de suivi, ces plans de convergence d'un genre nouveau poseront forcément la question du pilotage. En effet, autant le suivi peut être national, au sein d'une commission unique qui ferait un suivi global, autant le pilotage doit s'effectuer territoire par territoire, sur la base de contrats qui peuvent être signés par l'État, les collectivités et les établissements publics intéressés, et donc dans des formats extrêmement souples. Voilà pourquoi, à un moment ou à un autre, il faudra réexaminer le dispositif de pilotage – à moins de considérer que celui-ci sera un des éléments fondamentaux du contenu même des plans de convergence.

Tels sont les points généraux que je tenais à évoquer. J'ajoute que 262 amendements ont effectivement été déposés. Mais il n'échappe à personne que beaucoup d'entre eux ne passeront pas le barrage de l'article 40. Je pense donc qu'il serait nécessaire d'enrichir ce texte au-delà du périmètre sur lequel nous pouvons opérer en tant que parlementaires, sous couvert de l'article 40.

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