Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de commission, monsieur le rapporteur, madame et messieurs les rapporteurs pour avis, je suis heureux de m’exprimer, après ma collègue Maina Sage, au nom du groupe UDI, sur cette loi porteuse de tant de promesses, d’espoirs, voire de rêves.
Cette loi vise l’égalité réelle, qu’on nous dit être désormais une priorité de la nation ; ces mots sont lourds et ce n’est pas rien de l’affirmer, même si les mots se vident de leur sens à notre époque. Ce texte fera-t-il partie des ruines de la République incantatoire – que se partagent la droite et la gauche – ou marquera-t-il au contraire le point de départ d’un véritable chemin vers moins d’écarts de développement entre les populations de l’Hexagone et les populations ultramarines ? La question vaut dans le domaine économique, qui est important, mais aussi et surtout dans ceux de l’éducation et de la santé, où ces écarts sont massifs. Comment, au XXIe siècle, les Français d’outre-mer peuvent-ils se trouver dans une situation pareille ? Cela nous interpelle à propos du regard et de l’action pour l’outre-mer de la part des différents gouvernements qui se sont succédé au cours des trois dernières décennies, au-delà de leur sensibilité politique.
Pour ce qui concerne plus particulièrement les collectivités relevant de l’article 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie, le texte de loi n’évoque pas l’État qui élabore, mais l’État qui « propose […] un plan de convergence ». La terminologie n’est peut-être pas aussi adaptée qu’elle devrait l’être et j’espère, madame la ministre, monsieur le rapporteur, que des suggestions seront faites au cours des débats pour y remédier.
S’agissant des collectivités françaises du Pacifique, beaucoup de choses dépendent de nous. On ne peut pas à la fois demander l’émancipation, l’affirmation de notre singularité dans la République et l’octroi de compétences de plus en plus importantes – sans compter, pour la Nouvelle-Calédonie, un processus de décolonisation négociée au sein de la République, au travers de l’accord de Nouméa –, et au bout du compte se plaindre de ne pas avoir réussi à rattraper certains retards alors que nous avons les compétences en main. Certes, nous ne disposons pas toujours des moyens nécessaires, locaux ou nationaux, pour rendre certaines de ces compétences effectives. Néanmoins, en tout état de cause, nous sommes aujourd’hui, dans bien des domaines, en situation de responsabilité et il nous appartient, en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie, d’exercer ces compétences du mieux possible : nous devons aussi faire notre chemin pour que l’égalité devienne une vraie réalité pour nos concitoyens.
L’État a évidemment vocation à continuer de nous aider et de nous accompagner, notamment dans le cadre de la nouvelle générations des contrats de développement, qui, pour la Nouvelle-Calédonie, doivent être passés avec le pays, les provinces et les communes d’ici la fin de l’année, pour la période 2017-2021.
Je voudrais toutefois attirer l’attention de l’Assemblée sur plusieurs sujets que j’avais déjà évoqués en commission ; je tiens, à ce propos, à remercier mes amis et collègues qui ont bien voulu soutenir les amendements que j’avais déposés. Ces sujets relèvent encore chez nous – je parle aussi pour le compte de la Polynésie – de l’État stricto sensu, et le chemin vers l’égalité réelle dans ces domaines nécessiterait de l’énergie et de la volonté.
Ainsi en va-t-il du prix de l’électricité : en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, nous payons deux fois plus cher que dans les DOM ou en France métropolitaine, ce n’est pas rien. En France métropolitaine ou dans les DOM, la dépense en électricité représente environ 7 % des revenus d’un ménage moyen ; chez nous, 12 %. L’écart est significatif pour le portefeuille des ménages. Un amendement a été adopté pour corriger cette situation : je souhaiterais qu’à l’instar de ce qui a été fait pour Wallis-et-Futuna, nous puissions, à l’horizon 2020, bénéficier d’un prix de l’électricité identique.
Je voudrais également évoquer les tarifs bancaires. Avec 3 % de créances douteuses dans les établissements financiers pour une moyenne de 7 % dans les outre-mer, nous sommes les meilleurs payeurs de la République. Nous sommes pourtant les plus maltraités puisque nos tarifs bancaires sont deux à dix fois supérieurs à ceux en vigueur en métropole et dans les DOM. Quelque chose ne va pas dans ce système. Il en va de même pour les taux d’intérêt : en Nouvelle-Calédonie, les taux pour un prêt immobilier sont 50 % plus chers ; pour les découverts des entreprises, 200 à 300 % plus chers. Pourquoi est-on pénalisé lorsqu’on paie régulièrement ce que l’on doit aux établissements financiers ? Là aussi, l’égalité réelle mériterait de se concrétiser.
Pourquoi les collectivités françaises du Pacifique sont-elles systématiquement exclues des enquêtes statistiques ? Ne faisons-nous donc pas partie de la France ? La grande enquête statistique sur les violences faites aux femmes concerne l’ensemble de l’Hexagone et quelques départements d’outre-mer mais non les collectivités françaises du Pacifique. La dernière enquête dont nous disposons est celle que l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, avait réalisée en 2003. De même, l’enquête sur la vie chère, réalisée par l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE, et rendue en avril 2016, couvre l’ensemble de l’Hexagone et les DOM ; les collectivités françaises du Pacifique n’y figurent pas. La dernière enquête dont nous disposons date de 2010. Là aussi, un amendement a été adopté, j’en remercie la commission.
Je voudrais maintenant évoquer la Banque publique d’investissement, BPIFRANCE. En effet, financer des entreprises et l’économie d’un pays est un enjeu important. En 2012, le Premier ministre de l’époque s’était engagé à ce que les produits de BPIFRANCE soient mis en place en Nouvelle-Calédonie rapidement et efficacement ; quatre ans après, c’est le cas pour seulement deux d’entre eux, soit un résultat fort limité… Nous souhaitons que, comme dans les DOM, l’ensemble des produits de BPIFRANCE soient disponibles en Nouvelle-Calédonie. BPIFRANCE finance aujourd’hui 20 % des besoins des entreprises françaises ; nous en avons besoin en Nouvelle-Calédonie, a fortiori à ce moment de notre histoire, où, comme chacun sait, la croissance est atone, étant donné les cours du nickel.