Eh oui, monsieur le président, et c'est aussi à ce titre que ces rapports m'intéressent !
Pour rebondir sur la dernière question de mon collègue, je rappelle que les départements sont vraiment seuls à financer ces mesures d'accompagnement spécifique, ce qui pose d'énormes difficultés. Les disparités de reste à charge dans les départements sont édifiantes. Quand je compare les coûts de prise en charge dans le Jura avec votre annexe sur la répartition géographique des ouvertures de mesures en 2015, monsieur Maistre, je m'interroge. Soit les personnes vulnérables sont concentrées dans certains départements, soit elles sont traitées différemment selon les zones géographiques. Il me semble que la seconde explication est la bonne.
Quant à votre annexe 5 sur la répartition géographique des moyens alloués aux tribunaux d'instance en matière tutélaire, elle m'a fait très peur. Le ratio de charge des juges – nombre d'ordonnances émises et d'affaires traitées rapporté aux postes équivalent temps plein de juges d'instance affectés aux tutelles – est de 3 127 dans le Jura. Quand on sait que le ratio de la Lozère est de 12 250, c'est-à-dire quatre fois plus élevé… Vous devez avoir quelques explications sur ces fameuses disparités territoriales. Vos annexes 4 et 5 m'ont vraiment traumatisée !
Comme vous l'avez fort bien dit tout à l'heure, monsieur Maistre, nous sommes confrontés à une politique publique qui n'est absolument pas aboutie. Étant d'un naturel optimiste, je dirais qu'elle est en devenir : les bases ont été posées mais nous n'avons toujours pas construit la maison ; nous avons de très belles fondations mais pas de murs.
Avec ses préconisations, M. le Défenseur des droits a bien touché la difficulté du doigt : les publics concernés sont très variés. Je ne vais pas revenir sur la Belgique, mais il faut admettre que nous avons en France un problème de place. Les départements sont confrontés à des restrictions budgétaires importantes. Résultat : ils n'ouvrent pas de nouvelles structures puisqu'ils n'ont pas les moyens de les financer. Pour certaines familles, c'est le parcours du combattant pour trouver une solution d'accueil. Dans d'autres cas, les enfants de personnes vieillissantes ne savent plus que faire dans l'attente d'une mesure de protection. Inquiètes de voir s'accumuler les factures de maison de retraite, les familles se tournent vers leur député car elles ne savent pas à qui s'adresser. Le député a beau écrire à l'association concernée dans le département, il n'obtient pas de réponse.
Monsieur le Défenseur des droits, je vous entends parler du droit de vote, du droit à obtenir des papiers et des titres d'identité. Pour ma part, je vois tellement de familles et de personnes majeures vulnérables qui sont à l'abandon que je me dis que nous ne devons pas refaire la même erreur, mais traiter d'abord les urgences avant de passer à ces sujets qui vous semblent essentiels.
Pour terminer, je voudrais vous poser une question : le délégué interministériel est-il vraiment une solution adaptée ? Il faut arbitrer entre deux ministères – affaires sociales et justice – entre lesquels il y aura toujours une tension. Au quotidien, on touche aux affaires sociales mais la décision relève du ministère de la justice. Ne faudrait-il pas une formation « affaires sociales » sein du ministère de la justice pour répondre à ces questions ? Nous en sommes si loin que ma suggestion n'est peut-être pas adaptée.