Intervention de Audrey Azoulay

Séance en hémicycle du 6 octobre 2016 à 9h30
Liberté indépendance et pluralisme des médias — Présentation

Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication :

Il serait par exemple inacceptable que l’action contre une infraction de presse puisse être portée devant le seul juge civil, en faisant courir un risque financier majeur aux médias, condamnés à payer des dommages et intérêts. Là encore, il y va de l’indépendance de la presse et de ses capacités d’investigation.

C’est dans la lignée de la loi du 29 juillet 1881 que s’inscrit le texte qui est à nouveau soumis à votre assemblée aujourd’hui. Il renforce les protections nécessaires à la liberté d’informer et adopte une approche nouvelle, en créant des garanties internes aux entreprises de presse.

Dès lors, il est parfaitement cohérent de revenir aussi sur la question de la protection du secret des sources, compte tenu du caractère insuffisamment protecteur de la loi du 4 janvier 2010. Permettez-moi de rappeler les nouvelles garanties introduites par ce texte, qui constituent une réelle avancée. Pour les cas limités, dans lesquels le secret des sources peut être levé à l’occasion d’une enquête judiciaire, le texte veille à définir précisément une liste d’infractions parmi les plus graves de notre code pénal. Il élargit la protection des sources aux collaborateurs de la rédaction et au directeur de la publication, afin d’englober la chaîne de production de l’information dans son intégralité. C’est, en pratique, une garantie essentielle.

Il garantit aussi la protection du journaliste contre les poursuites judiciaires pour recel de violation du secret de l’instruction ou atteinte à la protection de la vie privée. Enfin, point majeur du texte, il prévoit l’intervention préalable d’un magistrat indépendant de l’instruction en cours pour autoriser ou non une mesure d’enquête portant sur les sources d’un journaliste. Nous avons réalisé ces avancées ensemble, grâce aux travaux dans la durée de votre commission, et par votre adoption à l’unanimité de l’amendement du Gouvernement. Nous avons su trouver un équilibre qui respecte à la fois les recommandations formulées par le Conseil d’État lorsqu’il fut saisi du projet de loi en juin 2013 et la jurisprudence édictée par le Cour européenne des droits de l’homme.

Mesdames et messieurs les députés, cette législature aura oeuvré à renforcer l’indépendance des médias. C’était l’un des engagements du Président de la République, que l’action continue du Gouvernement a traduit en actes, et que votre assemblée aura inscrit dans la loi.

D’abord, par la loi du 15 novembre 2013, les garanties d’indépendance du Conseil supérieur de l’audiovisuel – CSA – ont été renforcées. La désignation de ses membres doit désormais être approuvée à la majorité des trois cinquièmes des commissions parlementaires : c’est une innovation majeure, qui impose un accord avec l’opposition parlementaire. L’indépendance de l’audiovisuel public a été restaurée par cette même loi, puisque le pouvoir de nomination des présidents de l’audiovisuel public, qui avait été confisqué par l’exécutif, a été rendu au CSA. Nous avons redonné son indépendance à l’audiovisuel public, après cette parenthèse d’un autre âge, qui allait à rebours de l’histoire.

Le rôle de l’audiovisuel public en matière de programmes et d’information est essentiel, en France comme chez nos principaux voisins européens, et nous défendons ce modèle européen, inscrit dans l’histoire de nos démocraties, d’un audiovisuel public fort et indépendant. Nous y avons oeuvré ensemble. De même, en décidant de créer une aide au bénéfice des médias de proximité et des entreprises émergentes qui créent de nouveaux médias, le Gouvernement fait le pari de l’indépendance et des nouvelles formes d’expression journalistique.

L’adoption de cette proposition de loi sur l’indépendance des médias va compléter cet édifice – un édifice qui a une grande vocation. Il est question ici de l’indépendance des journalistes, des médias privés et des médias publics, de télévision, de radio ou de presse écrite. Il est question ici de la pluralité, de la fiabilité et de la qualité de l’information. Il est question ici de la confiance de nos concitoyens et de la vitalité de notre démocratie.

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