La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures trente.
Monsieur le président, monsieur le président et rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, mesdames et messieurs les députés, nous voici arrivés au terme du parcours législatif de cette proposition de loi, visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias. Nous reprenons l’examen de ce texte en lecture définitive, après l’échec de la commission mixte paritaire du 14 juin dernier, et après le refus exprimé par le Sénat de délibérer en nouvelle lecture, au moyen de l’adoption d’une question préalable, la semaine dernière.
En commission mixte paritaire, il est vite apparu que les positions exprimées par le Sénat, s’agissant notamment de la protection du secret des sources des journalistes, ne pouvaient s’accorder avec celles de votre assemblée, malgré l’unanimité de bon augure avec laquelle l’Assemblée nationale avait adopté l’amendement du Gouvernement sur ce sujet.
En nouvelle lecture, le Sénat a préféré esquiver le débat au moyen d’une motion de procédure, tant en commission qu’en séance publique. Le rapprochement des points de vue n’aura donc pas été possible au-delà de la première lecture. Je regrette que cette proposition de loi n’ait pas donné lieu au même travail en commun que le projet de loi relatif à la création à l’architecture et au patrimoine.
Pourtant, le travail engagé en première lecture sur ce texte avait été riche et fructueux, avant qu’il ne soit qualifié, très récemment, de « texte de circonstance » par le Sénat. Ce texte a introduit, sur bien des sujets, d’utiles dispositions : l’obligation, pour chaque média, d’adopter une charte et de la transmettre aux journalistes ; l’insertion de protections pour les lanceurs d’alertes – que le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique de mon collègue Michel Sapin vient d’ailleurs de compléter et d’amplifier ; la conditionnalité et la transparence des aides publiques aux entreprises de presse ; le rétablissement de la publicité des cessions de fonds de commerce dans les journaux d’annonces légales ; enfin, la protection du secret des sources des journalistes, que votre assemblée a intégrée à ce texte dès le début de ses travaux.
Aujourd’hui, votre assemblée est donc appelée à se prononcer en dernière lecture. Je tiens à vous remercier, cher Patrick Bloche, vous qui êtes l’auteur de cette proposition de loi, pour votre travail et votre engagement constant.
Dans nos sociétés, la profusion des modes de diffusion de l’information rend celle-ci omniprésente. Garantir sa qualité constitue donc un enjeu majeur. Or cela passe nécessairement par l’indépendance des journalistes face, notamment, aux pressions économiques. La remise en cause de cette indépendance contribuerait à accroître la défiance de certains de nos concitoyens à l’égard des médias. Or il est aujourd’hui nécessaire de consolider et de retisser ce lien de confiance. C’est un enjeu majeur pour notre démocratie. C’est aussi un enjeu pour les entreprises de médias elles-mêmes, car c’est bien la fiabilité et la qualité de l’information qu’elles diffusent, fondées sur l’exercice professionnel du journalisme, qui doivent les distinguer et les légitimer dans ce flot.
Lors des dernières Journées européennes du patrimoine, placées sous le signe de la citoyenneté, le ministère de la culture et de la communication avait fait le choix de proposer à ses visiteurs de redécouvrir les grands textes fondateurs de notre République et, parmi eux, la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse. À cette occasion, il fut possible d’entendre cet extrait du grand discours d’Eugène Pelletan, président de la commission sénatoriale sur la liberté de la presse, mis en image en 1981 lorsque la loi fêtait ses cent ans : « Un gouvernement faible fait taire la presse ; un gouvernement fort la laisse parler. C’est la meilleure preuve qu’il puisse donner de sa force et de la sagesse de la nation. » Je crois que ces mots n’ont rien perdu de leur force, ni de leur actualité.
Près d’un siècle et demi après sa promulgation, et même si des adaptations aux nouveaux défis de notre siècle peuvent être nécessaires, la loi de 1881 continue de donner un cadre à notre législation en matière de presse, au moyen d’une riche jurisprudence. C’est pour cela que nous nous opposons aux dispositions adoptées par le Sénat en commission, lors de l’examen du projet de loi « Égalité et citoyenneté », car il est essentiel de ne pas déstabiliser l’ordonnancement et l’équilibre d’ensemble de cette loi fondatrice.
Il serait par exemple inacceptable que l’action contre une infraction de presse puisse être portée devant le seul juge civil, en faisant courir un risque financier majeur aux médias, condamnés à payer des dommages et intérêts. Là encore, il y va de l’indépendance de la presse et de ses capacités d’investigation.
C’est dans la lignée de la loi du 29 juillet 1881 que s’inscrit le texte qui est à nouveau soumis à votre assemblée aujourd’hui. Il renforce les protections nécessaires à la liberté d’informer et adopte une approche nouvelle, en créant des garanties internes aux entreprises de presse.
Dès lors, il est parfaitement cohérent de revenir aussi sur la question de la protection du secret des sources, compte tenu du caractère insuffisamment protecteur de la loi du 4 janvier 2010. Permettez-moi de rappeler les nouvelles garanties introduites par ce texte, qui constituent une réelle avancée. Pour les cas limités, dans lesquels le secret des sources peut être levé à l’occasion d’une enquête judiciaire, le texte veille à définir précisément une liste d’infractions parmi les plus graves de notre code pénal. Il élargit la protection des sources aux collaborateurs de la rédaction et au directeur de la publication, afin d’englober la chaîne de production de l’information dans son intégralité. C’est, en pratique, une garantie essentielle.
Il garantit aussi la protection du journaliste contre les poursuites judiciaires pour recel de violation du secret de l’instruction ou atteinte à la protection de la vie privée. Enfin, point majeur du texte, il prévoit l’intervention préalable d’un magistrat indépendant de l’instruction en cours pour autoriser ou non une mesure d’enquête portant sur les sources d’un journaliste. Nous avons réalisé ces avancées ensemble, grâce aux travaux dans la durée de votre commission, et par votre adoption à l’unanimité de l’amendement du Gouvernement. Nous avons su trouver un équilibre qui respecte à la fois les recommandations formulées par le Conseil d’État lorsqu’il fut saisi du projet de loi en juin 2013 et la jurisprudence édictée par le Cour européenne des droits de l’homme.
Mesdames et messieurs les députés, cette législature aura oeuvré à renforcer l’indépendance des médias. C’était l’un des engagements du Président de la République, que l’action continue du Gouvernement a traduit en actes, et que votre assemblée aura inscrit dans la loi.
D’abord, par la loi du 15 novembre 2013, les garanties d’indépendance du Conseil supérieur de l’audiovisuel – CSA – ont été renforcées. La désignation de ses membres doit désormais être approuvée à la majorité des trois cinquièmes des commissions parlementaires : c’est une innovation majeure, qui impose un accord avec l’opposition parlementaire. L’indépendance de l’audiovisuel public a été restaurée par cette même loi, puisque le pouvoir de nomination des présidents de l’audiovisuel public, qui avait été confisqué par l’exécutif, a été rendu au CSA. Nous avons redonné son indépendance à l’audiovisuel public, après cette parenthèse d’un autre âge, qui allait à rebours de l’histoire.
Le rôle de l’audiovisuel public en matière de programmes et d’information est essentiel, en France comme chez nos principaux voisins européens, et nous défendons ce modèle européen, inscrit dans l’histoire de nos démocraties, d’un audiovisuel public fort et indépendant. Nous y avons oeuvré ensemble. De même, en décidant de créer une aide au bénéfice des médias de proximité et des entreprises émergentes qui créent de nouveaux médias, le Gouvernement fait le pari de l’indépendance et des nouvelles formes d’expression journalistique.
L’adoption de cette proposition de loi sur l’indépendance des médias va compléter cet édifice – un édifice qui a une grande vocation. Il est question ici de l’indépendance des journalistes, des médias privés et des médias publics, de télévision, de radio ou de presse écrite. Il est question ici de la pluralité, de la fiabilité et de la qualité de l’information. Il est question ici de la confiance de nos concitoyens et de la vitalité de notre démocratie.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à M. Patrick Bloche, président et rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Monsieur le Président, madame la ministre de la culture et de la communication, mes chers collègues, le Sénat ayant adopté une motion tendant à opposer la question préalable à la proposition de loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias, que le groupe socialiste, écologiste et républicain a déposée au début de l’année, nous voici saisis, en lecture définitive, du texte que l’Assemblée nationale a adopté en nouvelle lecture, le 18 juillet dernier.
Cette lecture définitive est l’aboutissement d’un parcours législatif qui, bien que réalisé dans le cadre de la procédure accélérée, aura duré sept mois. Ce délai suffit à montrer que le grief formulé par certains de nos collègues sénateurs à l’encontre du calendrier d’examen de cette proposition de loi est pour le moins infondé.
Tout aussi surprenant est le reproche adressé aux députés par la rapporteure de la Haute assemblée d’avoir opposé un « refus quasi-systématique » aux apports du Sénat. Je rappellerai que c’est sur proposition du Sénat qu’ont notamment été introduits l’article 1erbis A, l’article 7 bis, ou encore l’article 10 ter.
Qu’il me soit également permis, en guise de préalable, de rappeler que si la présente proposition de loi n’a pas pour objet de lutter contre la concentration des médias, elle prend clairement en compte les difficultés économiques d’un secteur en pleine transition, dont la conséquence sociale la plus directe est la précarisation croissante des journalistes. L’article 11 quater étend ainsi aux supports de presse, dont la périodicité est comprise entre un et trois mois, le dispositif qui a été prévu par la loi du 17 avril 2015, rapportée par notre collègue Michel Françaix, et qui, connu sous le nom d’ « amendement Charb », propose aux contribuables souscrivant au capital d’entreprises de presse une réduction d’impôt sur le revenu au taux de 30 % – ce taux pouvant être porté à 50 % lorsque la société a le statut d’entreprise solidaire de presse d’information.
L’article 11 quinquies élargit en outre le champ de ce dispositif de réduction d’impôt aux versements faits au profit de « sociétés d’amis » ou de « sociétés de lecteurs » qui investissent dans des titres d’information politique et générale. Et l’article 11 sexies relève les plafonds de versements éligibles à la réduction d’impôt. Tout en incitant les particuliers à prendre des participations au capital des entreprises de presse, toutes ces dispositions contribuent à la structuration de l’actionnariat de ces entreprises, donc à la consolidation de leur situation économique et financière.
Enfin, si cette proposition de loi ne comporte pas, à proprement parler, de nouveau dispositif anti-concentration, c’est tout simplement parce que ce n’est pas son objet. Comme son intitulé l’indique, ce texte vise à renforcer l’indépendance des journalistes à l’égard des intérêts des actionnaires et des annonceurs, dans un contexte où les médias font l’objet d’une défiance grandissante de la part de nos concitoyens. Je vous rappelle qu’en février dernier, le baromètre réalisé par TNS Sofres pour le journal La Croix a révélé que seuls 27 % de nos concitoyens estiment que les journalistes sont indépendants des pressions politiques et de l’argent.
Ce poison du soupçon, la majorité s’est attelée à le combattre dès le début de la présente législature. La loi du 15 novembre 2013 relative à l’indépendance de l’audiovisuel public a ainsi retiré à l’exécutif la nomination des présidents des sociétés nationales de programme : ces derniers sont désormais nommés par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, qui a lui-même été érigé en autorité publique indépendante. Parmi les sept membres que compte le CSA, un seul – son président – est nommé par le Président de la République, les six autres sont choisis par les présidents des Assemblées après avoir reçu l’avis conforme des commissions des affaires culturelles des deux chambres à la majorité des trois cinquièmes, donc après accord entre la majorité et l’opposition. Beaucoup a ainsi été fait pour professionnaliser le CSA et pour en renforcer l’indépendance par rapport au pouvoir politique.
Dans la suite logique de cette loi, la présente proposition entend introduire dans tous les médias de solides garanties de liberté et d’indépendance de nature à leur donner les moyens de renouer avec la confiance des lecteurs, des auditeurs et des téléspectateurs. Cela passe d’abord par l’extension, à l’ensemble des journalistes, du droit d’opposition, qui n’est aujourd’hui reconnu qu’aux seuls journalistes de l’audiovisuel public. Notre assemblée a décidé de fonder ce droit d’opposition sur la notion de « conviction professionnelle » formée dans le respect de la charte déontologique de l’entreprise de presse, qui devra être rédigée conjointement par la direction et les représentants des journalistes, dans le cadre de véritables négociations, sans que ne soit évidemment remise en cause la ligne éditoriale des entreprises de presse. Je peux vous l’assurer, la négociation de chartes déontologiques dans toutes les entreprises de presse avant le 1er juillet 2017 est, en soi, une vraie révolution.
Par ailleurs, le comité d’entreprise sera destinataire d’une information annuelle sur le respect du droit d’opposition par l’entreprise. Le CSA devra veiller, dans le cadre d’un contrôle a posteriori – j’insiste sur ce point car il ne saurait être juge des contenus –, à ce que les conventions qu’il conclut avec les éditeurs de services garantissent le respect du droit d’opposition. La violation du droit d’opposition des journalistes sera sanctionnée par la suspension, totale ou partielle, des aides publiques aux entreprises de presse. Ces sanctions s’appliqueront également en cas de violation des obligations de transparence des entreprises de presse, qui sont renforcées par l’article 11.
Le renforcement de la liberté et de l’indépendance des médias passe non seulement par la généralisation du droit d’opposition des journalistes, mais aussi par celle des comités relatifs à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes qui y concourent, dont la crédibilité sera désormais assise par la définition de règles d’indépendance exigeantes et par la possibilité ouverte à toute personne de les consulter pour avis. En outre, la mission confiée au CSA de garantir l’honnêteté, l’indépendance et le pluralisme se voit confortée : l’organisme devra veiller à ce que les conventions qu’il conclut avec les éditeurs de services intègrent les mesures destinées à garantir le respect de ces principes dont la violation, sur plusieurs exercices, le privera de la possibilité de recourir à la procédure de reconduction simplifiée des autorisations d’émettre.
Enfin, le renforcement de la liberté et de l’indépendance des médias passe aussi par celui de la protection du secret des sources des journalistes. Sur ce point, je tiens à insister sur les avancées considérables qu’apporte l’article 1er ter par rapport au droit actuel issu de la loi Dati de 2010. Premièrement, le champ des bénéficiaires de la protection du secret des sources est étendu aux directeurs de la publication ou de la rédaction et aux collaborateurs de la rédaction, donc aux pigistes. Deuxièmement, la définition des atteintes indirectes au secret des sources est sensiblement étendue. Troisièmement, le dispositif voté neutralise les moyens de pression indirects sur les journalistes en offrant une immunité pénale aux journalistes qui se rendent coupables de certains délits, lorsque la diffusion au public des informations que la commission de ces délits a permis d’obtenir constitue « un but légitime dans une société démocratique ».
Quatrièmement, les motifs susceptibles de justifier une atteinte au secret des sources des journalistes sont plus strictement encadrés. En l’état actuel du droit, ces motifs sont définis de manière très large, puisqu’une telle atteinte est autorisée « si un impératif prépondérant d’intérêt public le justifie ». L’imprécision de cette notion affaiblit considérablement la qualité de la protection du secret des sources. L’article 1er ter, que nous allons définitivement adopter, précise opportunément les motifs pour lesquels il pourrait être légitimement porté atteinte au secret des sources, tout en précisant que cette atteinte ne pourra être mise en oeuvre « qu’à titre exceptionnel » et qu’elle devra être « strictement nécessaire et proportionnée au but légitime poursuivi » – c’est un point essentiel.
Enfin, des garanties procédurales nouvelles sont introduites lors de la mise en oeuvre de mesures d’enquête ou d’instruction susceptibles de porter atteinte au secret des sources. Sont ainsi prévus : l’intervention du juge des libertés et de la détention, magistrat indépendant, qui se voit reconnaître la compétence pour autoriser tout acte d’enquête mais aussi d’instruction susceptible de porter atteinte au secret des sources ; la notification d’un droit au silence avant le début de toute audition ou de tout interrogatoire de tout journaliste, directeur de la publication ou de la rédaction ou collaborateur de la rédaction ; enfin, l’alourdissement des sanctions pénales applicables à certaines infractions en cas d’atteinte directe ou indirecte au secret des sources des journalistes.
L’article 1er ter a été adopté à l’unanimité ici même en première lecture, le 8 mars dernier. Je ne peux pas croire que, dans le contexte actuel, ce consensus ait pu être rompu par l’adoption, en nouvelle lecture, le 18 juillet dernier, d’un amendement destiné à intégrer la prévention et la répression du délit de révélation ou de divulgation de l’identité des membres de nos forces spéciales parmi les atteintes au secret des sources qui sont susceptibles d’être justifiées. À la suite de l’attentat perpétré contre Charlie Hebdo en janvier 2015, la France est passée, en 2016, du trente-huitième au quarante-cinquième rang du classement mondial de la presse de Reporters sans frontières, qui n’est pas un palmarès des politiques publiques, mais qui rend simplement compte de la situation des journalistes dans un pays. Je forme le voeu que, grâce aux effets de la présente proposition de loi, notre pays retrouve rapidement une meilleure place dans ce classement. Je vous invite donc, mes chers collègues, à confirmer, en lecture définitive, comme l’a fait hier la commission des affaires culturelles et de l’éducation, le vote que nous avons émis en nouvelle lecture.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Dans la discussion générale, la parole est à M. Michel Pouzol, premier orateur inscrit.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous retrouvons ce texte en lecture définitive, après que la commission mixte paritaire n’a pu aboutir, en raison des positions trop éloignées de nos deux chambres. Le Sénat, en nouvelle lecture, a adopté une motion de question préalable en séance publique, le jeudi 29 septembre dernier. Par conséquent, notre assemblée examine aujourd’hui le texte dans la version issue de sa dernière lecture – cela a déjà été dit.
Je tiens à rappeler, d’abord, que cette loi est d’initiative parlementaire, ce qui démontre encore une fois, s’il en était besoin, que notre commission et, plus largement, les parlementaires ont à coeur de moraliser le secteur de l’audiovisuel mais aussi de renforcer les moyens de son indépendance, oeuvre à laquelle nous nous sommes consacrés collectivement depuis le début de cette législature. Ainsi, depuis que la gauche est au pouvoir, nous avons réalisé des réformes structurantes en matière d’indépendance : avoir redonné au CSA le pouvoir de nommer les présidents de l’audiovisuel public en est sans doute le meilleur exemple – vous avez eu raison de le rappeler, madame la ministre. La proposition de loi sur laquelle nous devrons nous prononcer dans quelques minutes s’inscrit ainsi dans la droite ligne du travail mené par notre commission depuis le début de la législature, mais il faut aussi constater que le contexte particulier de ces derniers mois requiert l’intervention du législateur.
En effet, chacun l’a constaté, la concentration en marche dans les médias depuis deux ans montre que la problématique de l’indépendance est aujourd’hui un enjeu majeur pour tous. À cet égard, l’esprit et la substance du texte se retrouvent tout entiers dans son titre : indépendance et pluralisme. La nécessité de légiférer part d’un constat terrible : les grands médias appartiennent à des grands groupes financiers et, de fait, les journalistes peuvent, dans l’exercice de leur profession, être soumis à des pressions, des influences, des censures, ce qui porte atteinte au principe d’impartialité, qui est la pierre angulaire de l’information du public. Il est, dès lors, de notre devoir de protéger les journalistes du risque de changement de ligne éditoriale, d’actionnaires, ou de rachat. Pour ce faire, l’article 1er étend à tous les journalistes, quels que soient les médias dans lesquels ils travaillent, le droit d’opposition. Aucun journaliste ne pourra désormais être contraint d’accepter « un acte contraire à son intime conviction professionnelle ».
Le deuxième élément fort de ce texte est la protection des médias contre les pressions économiques. L’article 2 confie au CSA le soin de veiller à ce qu’aucune atteinte ne soit portée aux principes d’indépendance et de pluralisme de l’information. Grâce à cet article, nous ne serons plus démunis devant les pressions éventuelles émanant d’annonceurs sur la programmation d’un reportage ou d’un documentaire comme, cela a pu être le cas par le passé à plusieurs reprises.
Je souhaite également saluer la création des comités relatifs à l’honnêteté, l’indépendance et le pluralisme de l’information et des programmes. Vous l’avez rappelé en première lecture, monsieur le rapporteur, ce type d’organisme a émergé au cours de ces dernières années, d’abord au Monde puis à France Télévision, avant que les questions de déontologie soulevées par les terribles attentats de 2015 n’encouragent leur création au sein des chaînes d’information continue. Au cours des auditions que j’ai eu le plaisir de mener dans le cadre du projet de loi de finances 2017, à propos du chapitre relatif à l’avance à l’audiovisuel public, j’ai pu constater que cette mesure jouissait d’un retentissement très favorable au sein des chaînes privées comme publiques qui, avant même la promulgation de la loi, organisent la constitution de ces comités et semblent avoir saisi le bénéfice de cet outil de régulation interne.
Enfin, ce texte contient également une disposition particulièrement importante, dont l’initiative revient encore une fois aux parlementaires : la désormais fameuse protection du secret des sources des journalistes, dont M. le rapporteur s’est fait largement l’écho. La détermination parlementaire à voir enfin aboutir ces dispositions est totale et absolue. Je remercie particulièrement mes collègues du groupe socialiste, écologiste et républicain, au premier rang desquels Marie-Anne Chapdelaine, bien entendu, mais aussi ceux, siégeant sur d’autres bancs de notre assemblée comme Marie-George Buffet, Isabelle Attard et Noël Mamère, qui m’ont rejoint dans ce combat tenace.
La profession journalistique tient particulièrement à ce sujet. La loi Dati, qui allait dans ce sens, restait très floue quant au périmètre d’application de cette protection des sources. Lorsque nous étions dans l’opposition, nous avions affirmé avec force qu’il était nécessaire de clarifier ces dispositions, afin de permettre aux journalistes, qui sont un des piliers de notre démocratie, d’effectuer leur travail en toute intégrité, en particulier en matière d’investigation. En nouvelle lecture, nous avons abouti à un compromis acceptable et avons voté à l’unanimité des amendements conformes aux dispositions de la version adoptée par la commission des affaires culturelles en 2013, en y ajoutant la protection de l’anonymat de nos agents de renseignements travaillant sur le sol étranger ou national, ce qui, en cette période de troubles, nous a semblé fondamental.
Pour cette dernière raison, comme pour toutes celles que nous avons évoquées précédemment, et à la suite des explications de Mme la ministre et de notre rapporteur, Patrick Bloche, je vous invite, mes chers collègues, à adopter en lecture définitive cette proposition de loi innovante, qui renforce notre démocratie et la liberté de chacun en matière d’information.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur et président de la commission, mes chers collègues, l’examen de la proposition de loi de notre rapporteur et président visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias touche donc aujourd’hui à sa fin, aux termes d’un examen qui a révélé des désaccords, tant sur les différents bancs de notre hémicycle qu’entre les deux chambres. Sans vouloir refaire le débat, ou le match, comme vous l’avez dit hier lors de la réunion de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, je rappellerai brièvement les points d’achoppements qui ont conduit notre groupe à s’interroger sur les objectifs et la formulation de cette proposition de loi et à soulever un certain nombre de problèmes juridiques.
D’abord, à l’article 1er, nous reconnaissons quelques évolutions bienvenues : d’abord à l’initiative de notre groupe, l’introduction des chartes de déontologie, ensuite sous la plume du Gouvernement, qui a eu le bon sens d’introduire une possibilité de recours aux déclarations et usages professionnels relatifs à la profession de journaliste en cas de litige dans une rédaction qui ne se serait pas encore dotée d’une charte, sous la plume du rapporteur, enfin, qui a souhaité pacifier le débat sur la notion d’intime conviction professionnelle en supprimant l’adjectif « intime ».
Toutefois, vous l’aurez bien compris, la notion de conviction professionnelle, même formée dans le respect de la charte déontologique, nous paraît demeurer une notion subjective. Si elle venait à être dévoyée par certains, elle pourrait fragiliser le fonctionnement des rédactions. Soyons clairs : il s’agit non pas de faire un procès d’intention aux journalistes, mais de refuser d’inscrire dans la loi des outils dont on perçoit le dysfonctionnement futur avant même de les voter.
Car, contrairement à la clause de conscience qui se fonde sur des faits vérifiables par le juge, à savoir un changement d’orientation du journal ou un changement pouvant porter atteinte aux intérêts moraux du salarié, la « conviction professionnelle » reste une expression floue. Si elle est floue, elle est aussi potentiellement litigieuse et risque d’entrer en contradiction avec la principale contrainte inhérente au métier de journaliste, à savoir le respect d’une ligne éditoriale. Or je rappellerai rapidement, mes chers collègues, qu’en échange de sa capacité à imposer une ligne, le directeur est responsable de sa publication. Le droit d’opposition consacré par l’article 1er fait peser sur le directeur de publication la responsabilité d’actes qu’il n’a plus totalement la capacité de maîtriser.
Cette question ne peut être balayée d’un revers de main au motif que l’expression« conviction professionnelle » figure dans la loi de 2009. Elle s’applique dans ce cadre à l’audiovisuel public pour des raisons bien précises qui ont trait à la nature de son actionnariat.
Le droit d’opposition créé à l’article 1er continue de soulever des difficultés à l’article 2, qui confie au CSA la mission de garantir l’honnêteté, l’indépendance et le pluralisme des programmes, en veillant notamment à ce que les conventions signées avec les chaînes garantissent le nouveau droit d’opposition des journalistes. Si le CSA constate des manquements à ces principes sur plusieurs exercices, il pourra prononcer des sanctions portant directement sur l’autorisation de diffusion que le régulateur délivre aux chaînes, conformément à l’article 28-1 de la loi de 1986. Mes chers collègues, il convient donc de ne pas voter cet article 2 à la légère.
Or sa rédaction continue de nous interroger. La réécriture de cet article par le rapporteur n’a pas levé tous les doutes quant à la nature du contrôle du CSA sur les relations entre les journalistes et leur direction ou leurs actionnaires. Certes, le CSA ne pourra pas traiter par voie de recommandation générale de la surveillance du droit d’opposition des journalistes et des éventuelles immixtions des actionnaires et annonceurs dans la ligne éditoriale de l’entreprise, ce qui constitue une avancée. Toutefois, le fait de maintenir dans les conventions des stipulations relatives au contrôle par le CSA du droit d’opposition des journalistes n’est pas satisfaisant. Ce n’est pas au CSA de réguler ce principe d’opposition qui relève uniquement de la compétence du juge du travail : monsieur le rapporteur, il faut insister sur ce point qui figure dans l’un de vos rapports !
Ensuite, la proposition de loi est dramatiquement avare de précisions. Elle fait du régulateur le juge du pluralisme et de l’honnêteté des contenus, sans spécifier les critères à l’aune desquels il conviendra d’évaluer ces principes et qui devraient figurer dans la convention. En réalité, le texte laisse au CSA le soin de définir lui-même la façon dont il entend apprécier le pluralisme, l’honnêteté et l’indépendance des programmes, ce qui n’est pas acceptable.
Monsieur le rapporteur, nous le savons, vous considérez que les nouveaux critères de nomination des membres du CSA en font désormais une autorité enfin indépendante. Faut-il pour autant la laisser face à une page blanche sur le contenu des conventions ? Cette critique est valable également pour l’article 7, qui confie au CSA le soin de définir les statuts du comité d’éthique. Nous pensons que cette proposition de loi donne des pouvoirs disproportionnés au CSA, comme nous avons déjà eu l’occasion de le souligner au cours des débats.
Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains votera contre cette proposition de loi. Il se laisse aussi la liberté de saisir le Conseil constitutionnel.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons ce matin pour la dernière fois poursuivait initialement un objectif noble et partagé par tous : la liberté, l’indépendance et le pluralisme de l’information. Hubert Beuve-Méry avait l’habitude de dire : « La radio annonce l’événement, la télévision le montre, la presse l’explique ». Cet adage montrait bien que notre compréhension de l’actualité est intrinsèquement liée aux médias.
Malheureusement, si l’intention première était louable, la conclusion du texte nous laisse perplexe. Nous n’en doutons pas, en démocratie, l’indépendance des rédactions doit être sanctuarisée, tout comme l’indépendance des journalistes. Pourtant, cette proposition de loi n’est pas satisfaisante, parce qu’elle a été rédigée dans la précipitation : il n’y a eu ni étude d’impact, ni vérification du caractère opérationnel des dispositions adoptées. Nous doutons même que certaines d’entre elles soient en phase avec la réalité du fonctionnement des entreprises de médias et de l’organisation des rédactions.
Certes, la frontière entre information et intérêt des dirigeants ainsi que les mouvements de concentration dans les médias nous amènent à nous interroger. Néanmoins, les rédactions des grands groupes français s’organisent et se sont déjà mobilisées afin que les organes de presse demeurent indépendants de leurs actionnaires respectifs.
La généralisation du droit d’opposition du journaliste sur la base de sa conviction professionnelle et les chartes de déontologie, loin de faciliter le travail des journalistes, alourdiront des procédures déjà complexes. De même, la généralisation des saisines des comités d’éthique, lourdement rebaptisés « comités relatifs à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes », risque de conduire à la multiplication de contestations en tout genre. En réalité, en voulant ajouter de nouvelles obligations, cette proposition de loi alimente la défiance généralisée à l’égard des médias.
Notre principal sujet de perplexité reste l’extension des pouvoirs du Conseil supérieur de l’audiovisuel, puisque ses missions comprendront dorénavant un contrôle exercé a priori sur la déontologie et l’indépendance des médias. Nous considérons, en effet, que le nouveau droit de regard dont disposera l’autorité administrative indépendante ressemble fort à de l’ingérence. Face à ce texte qui érige le CSA en nouveau garant de l’honnêteté, de l’indépendance et du pluralisme de l’information et des programmes, sachez que le groupe de l’Union des démocrates et indépendants reste particulièrement sceptique.
En définitive, notre seule satisfaction au cours des débats a été la consécration de la protection des sources, même si nous aurions préféré que l’Assemblée adopte en nouvelle lecture les amendements présentés par le Gouvernement. Prévue dans un projet de loi en 2013, la protection du secret des sources des journalistes n’avait en effet jamais été inscrite à l’ordre du jour malgré l’accord unanime de notre commission. Nous saluons aujourd’hui l’inscription dans la loi, de manière plus claire et plus limitative, des conditions permettant de porter atteinte à ce secret, car il nous paraît important que cette protection soit améliorée afin d’assurer une prévention suffisamment efficace et prévisible contre les atteintes injustifiées. Nous espérons à présent que les restrictions apportées à tout acte d’enquête portant atteinte au secret des sources permettront toujours d’assurer la nécessaire conciliation entre la liberté d’expression, la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la nation et la protection des personnes.
Mes chers collègues, vous conviendrez qu’en dehors de cet ajout bienvenu, cette proposition de loi témoigne d’une conception désuète de la mission de régulation et qu’elle passe à côté des vrais sujets que sont l’adaptation au monde numérique et la précarisation du métier de journaliste. Seule l’introduction de la protection du secret des sources des journalistes nous conduit aujourd’hui à ne pas voter contre ce texte.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, beaucoup sur ces bancs et au sein de l’exécutif déplorent la lenteur du processus législatif. Félicitons-nous donc ici du travail parlementaire qui a permis, sept mois seulement après son dépôt, la discussion aujourd’hui en lecture définitive de la proposition de loi visant à « renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias » – on ne se lasse pas de prononcer ces mots.
Nous avons souvent soulevé les points qui nous ont opposés au Sénat. D’autres ici l’ont fait ou le font : je n’y reviens pas. Ce texte de Bruno Le Roux et Patrick Bloche s’inscrit dans la tradition républicaine de notre pays, à laquelle les radicaux de gauche sont particulièrement attachés. Clemenceau, longtemps directeur du journal L’Aurore, publia, le 13 janvier 1898, le célèbre « J’accuse ! » d’Emile Zola, lequel écrivit par ailleurs : « C’est de la connaissance seule de la vérité que pourra naître un état social meilleur ».
Car la presse, qualifiée de « quatrième pouvoir » dès 1797 par le député et philosophe irlandais Edmund Burke, joue indéniablement un rôle fondamental dans la République. Nous, parlementaires, avons donc l’impérieux devoir de protéger le travail des journalistes, qui doivent pouvoir exercer librement leur métier dans une totale sécurité. Je voudrais ici rendre hommage à ceux qui oeuvrent au sein de cette profession avec un courage exemplaire, parfois au péril de leur vie. Je pense bien sûr à l’équipe de Charlie Hebdo, décimée le 7 janvier 2015, mais aussi au journal Libération et à BFM, qui ont fait l’objet d’agressions de la part d’un homme armé le 18 novembre 2013.
Le texte qui occupe nos débats aujourd’hui va dans le sens de notre histoire. Il prend en considération l’évolution de la presse et englobe l’ensemble des médias. L’introduction de la notion de « conviction personnelle », oui, est salutaire. En outre l’article 1er consacre, pour l’ensemble des journalistes de la presse audiovisuelle, écrite ou en ligne « le droit de refuser toute pression et de refuser de divulguer leurs sources ». L’article 1er permet, de plus, de réaliser un progrès : l’obligation, pour les entreprises ou sociétés éditrices de presse ou audiovisuelles, d’établir une charte déontologique.
Ne boudons pas notre plaisir : la présente proposition de loi comporte de nombreuses avancées notoires. Elle consacre ainsi l’indépendance des journalistes, notamment en matière de protection du secret des sources, protection qui s’étend désormais aux collaborateurs occasionnels. Autre avancée : l’article 11 bis permet de suspendre tout ou partie des aides publiques, directes ou indirectes, dont une entreprise éditrice bénéficie en cas de violation, par celle-ci, du secret des sources ou de la charte de déontologie.
Par ailleurs, le mode de désignation des membres du CSA me paraît juste et les prérogatives de celui-ci justement étendues. L’article 2 dispose ainsi que l’instance « s’assure que les intérêts économiques des actionnaires des éditeurs de services de communication audiovisuelle et de leurs annonceurs ne portent aucune atteinte à ces principes ». En effet, la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias dépendent en grande partie des enjeux économiques qu’ils représentent. L’article 2 établit une frontière étanche entre la ligne éditoriale du média et les préoccupations de ses annonceurs ou de ses actionnaires.
L’article 7 institue, quant à lui, auprès des médias audiovisuels, un comité relatif à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information, qui pourra s’autosaisir ou être consulté pour avis non seulement par la direction de la société et par le médiateur lorsqu’il existe, mais aussi par tout un chacun. Enfin, il était essentiel, dans notre société mondialisée, de protéger l’indépendance de nos médias par rapport aux capitaux étrangers.
Je souhaite saluer le travail de la commission des affaires culturelles et de mes collègues ainsi que la persévérance de Mme la ministre et de M. le rapporteur, que je tiens à remercier. Compte tenu de toutes ces avancées, le groupe RRDP salue un progrès réel en faveur de l’indépendance des médias, de leur liberté et de leur pluralisme, progrès qu’il soutiendra avec enthousiasme, car, comme le soulignait Alexis de Tocqueville, « la presse est, par excellence, l’instrument démocratique de la liberté ».
Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous voici donc arrivés à l’heure de l’adoption définitive de la proposition de loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias. Légiférer pour l’indépendance et le pluralisme des médias, donc pour le droit à l’information de nos compatriotes, voilà une ambition à laquelle nous souscrivons pleinement.
La liberté de la presse est un des fondements de la vie démocratique de notre pays. Il s’agit de la défendre en toute occasion, et la loi en est le moyen essentiel, aux côtés de la mobilisation citoyenne. Je le disais en commission : en écoutant jeudi dernier, avec d’autres collègues, lors de l’inauguration de l’imprimerie de Dammartin, les belles et fortes paroles de son directeur, Michel Catalano, ou du Président de la République, je pensais à notre responsabilité de législateur pour garantir cette liberté. En effet, à chaque fois que cette dernière s’est trouvée menacée ou entravée, c’est notre République et ses valeurs fondatrices qui ont été attaquées.
Cette liberté de la presse ne peut exister sans le travail libre des journalistes. Or la liberté des journalistes est malmenée de par le monde. En commission, un intervenant de l’opposition nous a expliqué qu’en la matière, il n’y avait pas de problème chez nous. Pourtant, ne sommes-nous pas concernés directement quand, au sein même de l’Union européenne, dont notre pays est membre, ou à la porte de celle-ci, on continue de censurer et d’emprisonner des journalistes parce qu’ils font tout simplement leur métier ?
Depuis la loi de 1881 sur la liberté de la presse, l’Assemblée nationale a écrit bien des pages pour la conforter et l’élargir. Au cours de cette législature ont ainsi été adoptées la loi relative à l’indépendance de l’audiovisuel public et la loi portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse, même si les réserves que nous avions formulées sur certains articles se sont aujourd’hui, hélas, avérées justifiées – je pense à l’avenir de l’AFP.
Avec l’adoption de la proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui, des avancées importantes pour l’indépendance des médias vont être actées. Je m’en réjouis. J’ai du mal à comprendre l’attitude de nos collègues, au Sénat ou ici même, qui rejettent ce texte et s’opposent ainsi à une avancée des libertés. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : l’indépendance des médias, des rédactions, la protection des sources des journalistes sont partie prenante de nos libertés fondamentales. En adoptant cette proposition de loi, nous y contribuons fortement en reconnaissant aux journalistes et aux rédactions leur liberté de conviction professionnelle.
Cette proposition de loi prévoit également que, dans les médias qui n’en sont pas encore dotés, les éditeurs et les journalistes doivent adopter, après négociation, des chartes définissant les règles de déontologie sur lesquelles ils s’engagent vis-à-vis de leur public. Des syndicats s’interrogent cependant quant au risque d’une déontologie à géométrie variable pour la profession.
Dans cette proposition de loi, nous prenons en compte la fragilité économique du secteur et les conditions de travail difficiles des salariés. On ne peut que s’en féliciter ! Mais dans un pays comme le nôtre, attaché à l’exception culturelle et au fait que les oeuvres de l’esprit ne peuvent être des marchandises comme les autres, nous ne sommes pas encore arrivés au bout des dispositions à prendre pour agir efficacement contre l’hyperconcentration des médias. Il ne s’agit pas de brider les investissements nécessaires à la vie et au développement de la presse et des médias, mais de garantir que ces investissements ne nuisent pas à l’existence d’un véritable pluralisme éditorial, d’un contenu informatif et émancipateur. Notre amendement traitant de cette question a été repoussé, mais permettez-moi d’insister : la réflexion de notre assemblée dans ce domaine ne doit pas s’arrêter. L’actualité nous offre trop d’exemples de regroupements ne permettant pas de donner un nouveau souffle à des médias en difficultés, mais se soldant au contraire par une uniformisation des contenus.
Enfin, je voudrais aussi insister sur la question de la protection du secret des sources des journalistes. Nous nous sommes réjouis qu’en 2013, un projet de loi sur ce sujet, amendé par la commission des affaires culturelles, soit susceptible d’être inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Cette inscription n’arrivant pas, une proposition de loi transpartisane a été déposée en juillet dernier pour rappeler l’urgence de cette question, répondant ainsi à la volonté exprimée par l’intersyndicale des journalistes.
La protection des sources a enfin trouvé toute sa place dans la proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui : c’est un acte d’une très grande portée. Le 18 juillet, en effet, notre assemblée a adopté un amendement du Gouvernement prévoyant d’harmoniser le droit en fixant à sept ans le seuil d’emprisonnement servant à mesurer la gravité des délits dont la prévention ou la répression peut justifier que le secret des sources soit levé. Vous nous aviez indiqué, madame la ministre, que cela permettrait de « mieux prévenir ou réprimer les atteintes aux intérêts de la nation ». Permettez-moi de préciser que cette notion d’atteinte aux intérêts de la nation, initialement présente dans le projet gouvernemental de 2013, avait justement été supprimée par la commission des affaires culturelles : la proposition de loi adoptée en première lecture n’avait pas repris cette notion diversement interprétable.
Mais au-delà de cette remarque, nous mesurons l’avancée que nous avons permise, même si notre commission a dû faire preuve d’une grande détermination pour arriver à ce résultat. Je veux ici souligner le rôle majeur joué par son président pour parvenir à l’adoption de ce beau texte aujourd’hui.
Madame la ministre, monsieur le rapporteur, après avoir exprimé ces quelques remarques, c’est avec satisfaction et fierté que les députés du Front de gauche voteront cette proposition de loi, qui permet à notre pays de franchir un nouveau pas pour l’indépendance et le pluralisme des médias et la liberté des journalistes.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Je veux d’abord me réjouir de la qualité de cette discussion générale : les enjeux majeurs du texte ont été bien pris en compte par l’ensemble de votre assemblée. Je remercie les orateurs qui viennent de s’exprimer pour leur soutien. Pour achever de vous convaincre, si c’est encore nécessaire, permettez-moi d’apporter quelques précisions sur certains points évoqués lors de cette discussion.
Le droit d’opposition des journalistes, qui existe dans le droit conventionnel depuis 1983, a été inscrit dans la législation en 2009. La notion de conviction professionnelle n’est pas floue, puisqu’elle s’appuiera sur des chartes de déontologie qui seront négociées dans les entreprises. N’oublions pas qu’à défaut de charte, au 1er juillet 2017, les textes et usages en vigueur dans la profession pourront être évoqués devant le juge. Votre assemblée a eu la sagesse d’adosser la conviction professionnelle aux chartes adoptées dans chaque entreprise.
À ce sujet, madame Duby-Muller, vous avez refusé l’analogie avec les pratiques de l’audiovisuel public en raison de son actionnariat. Il me semble que notre conception de l’actionnariat public dans le secteur audiovisuel varie selon la législature et le titulaire du pouvoir exécutif ! En tout état de cause, les pressions susceptibles d’être exercées ne sont pas seulement politiques, mais aussi économiques. Cette proposition de loi traite justement de la pression que peuvent exercer les annonceurs et les actionnaires en général.
Vous avez également évoqué, madame Duby-Muller, le risque d’un contrôle a priori par le CSA. Je ne partage pas vos craintes. En effet, le texte renvoie aux conventions conclues entre les éditeurs de services de communication audiovisuelle et le CSA, qui intégreront des mesures à mettre en oeuvre pour garantir le respect des dispositions de la présente proposition de loi. Il s’agit d’un mode de régulation traditionnel que le CSA exerce depuis trente ans et dont personne aujourd’hui ne remet en cause la pertinence. Les modifications apportées par votre commission à l’article 2 ont levé, si c’était nécessaire, toute ambiguïté sur ce point : le CSA interviendra bien ex post, pour vérifier le respect des engagements pris.
S’agissant enfin de la protection des sources des journalistes, je me réjouis du consensus qui est le vôtre. Vous avez bien voulu adopter, en nouvelle lecture, un amendement du Gouvernement qui protège notamment l’identité des membres de nos forces spéciales. Nous disposons désormais d’un dispositif extrêmement protecteur, qui constitue un progrès tout à fait notable pour le travail des journalistes et leur nécessaire capacité d’investigation. Je rappelle très rapidement les mesures que comprend l’article 1er ter : la définition du champ des infractions et des collaborateurs protégés, la protection des journalistes contre certaines poursuites quand le but poursuivi est légitime, l’intervention d’un magistrat indépendant de l’instruction lorsqu’il est envisagé de porter atteinte au secret des sources. Cette nouvelle disposition législative constitue vraiment une avancée majeure pour notre démocratie.
Mon propos sera bref, puisque Mme la ministre a apporté des réponses de fond à la discussion générale. De nombreux collègues ici présents ont participé à ce processus législatif, depuis le début de l’année concernant cette proposition de loi, et même dès 2013 s’agissant du projet de loi renforçant la protection du secret des sources des journalistes, comme l’ont rappelé plusieurs orateurs.
C’est une vraie satisfaction que trois groupes ici représentés se soient engagés à voter en faveur de cette proposition de loi : le groupe socialiste, écologiste et républicain, par la voix de Michel Pouzol, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, par la voix de Marie-George Buffet, et le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, par la voix de Gilda Hobert. Je tiens également à souligner le vote positif d’Isabelle Attard en commission hier. Je note que le groupe de l’Union des démocrates et indépendants a déclaré, par la voix de Sonia Lagarde, qu’il ne voterait pas contre cette proposition de loi. Je prends acte du vote négatif du groupe Les Républicains. C’est donc à une large majorité que cette proposition de loi sera adoptée dans quelques instants.
Permettez-moi enfin, en votre nom et sans emphase, de dédier ce texte à tous les journalistes qui risquent leur vie ou la perdent pour que vive, à travers le monde, la liberté de la presse.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi, telle qu’elle résulte du texte voté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.
La proposition de loi est adoptée.
La séance, suspendue à dix heures vingt-cinq, est reprise à dix heures trente.
L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, ratifiant l’ordonnance no 2015-1682 du 17 décembre 2015 portant simplification de certains régimes d’autorisation préalable et de déclaration des entreprises et des professionnels et modifiant le code du sport (nos 3736, 4063).
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation – cher Patrick Bloche –, monsieur le rapporteur – cher Pascal Deguilhem –, mesdames et messieurs les députés, certains d’entre vous pourraient s’étonner de me voir aujourd’hui à cette tribune défendre devant vous un projet de loi de ratification d’une ordonnance du 17 décembre 2015 portant simplification de certains régimes d’autorisation préalable et de déclaration des entreprises et des professionnels, prise sur le fondement d’une habilitation accordée par la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises.
Certes, la simplification administrative est souvent présentée comme un parcours d’obstacles, sinon comme un véritable exploit sportif, si l’on en croit certains ! Mais au-delà de ce clin d’oeil, c’est bien la présence de certaines dispositions additionnelles relatives à la lutte contre le dopage qui justifie d’abord ma présence devant vous aujourd’hui, tout comme le fait que le texte a été soumis à l’examen de l’excellente commission des affaires culturelles et de l’éducation, sous l’oeil expert de votre rapporteur, Pascal Deguilhem, que je veux saluer de nouveau.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, je voudrais rappeler en quelques mots les objectifs et le contenu de l’ordonnance du 17 décembre 2015, qu’il s’agit de ratifier.
Comme vous le savez, le Président de la République a souhaité, dans le cadre du choc de simplification, revenir sur le précepte ancien selon lequel le silence gardé par l’administration au terme de deux mois valait rejet de la demande, à charge pour l’usager de contester cette décision implicite devant la juridiction administrative s’il l’estimait utile.
La loi du 12 novembre 2013 habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens a donc inversé le postulat, et posé que l’inertie éventuelle de l’administration devait profiter à l’administré. Cette affirmation était assortie de quelques tempéraments, notamment dans les cas – précisés par décret en Conseil d’État – où une acceptation implicite « ne serait pas compatible avec le respect des engagements internationaux et européens de la France, la protection de la sécurité nationale, la protection des libertés et des principes à valeur constitutionnelle et la sauvegarde de l’ordre public ».
Un travail d’inventaire a donc été mené par le Gouvernement pour pouvoir limiter le nombre d’exceptions à ce qui était strictement nécessaire au vu de ces motifs supérieurs. Ce peignage a également révélé que certaines procédures d’autorisation préalable n’étaient pas strictement nécessaires et pourraient être utilement converties en procédures de déclaration préalable, ce qui est une autre façon de donner la priorité à l’usager ou au citoyen et de ne pas créer de situations absurdes ou préjudiciables lorsque les services sont confrontés à un afflux de sollicitations.
Tel est l’objet de cette ordonnance du 17 décembre dernier. Elle prévoit la transformation de plusieurs régimes d’autorisation préalable en régime déclaratifs, ainsi que d’autres adaptations procédurales dans des domaines divers : les professions agricoles, le secteur des transports, le secteur funéraire, les débits de boisson ou encore le champ culturel et touristique.
Je n’entrerai pas plus dans le détail, mais vous me permettrez simplement de dire un mot sur celle qui concerne le régime de déclaration ou d’autorisation des manifestations sportives.
Ceux d’entre vous qui exercent – plus pour très longtemps compte tenu de la loi sur le cumul des mandats – des responsabilités électives locales savent combien il était difficile de s’y retrouver dans la diversité des procédures applicables à ces manifestations, selon qu’elles se déroulent ou non sur la voie publique, qu’elles impliquent ou non des véhicules à moteur, qu’elles font ou non l’objet d’un classement ou d’un chronométrage, et je pourrais ainsi encore prolonger cette taxinomie bien au-delà ! Nous avons donc entrepris de simplifier le paysage, dans le respect évidemment des impératifs de sécurité et des compétences des collectivités gestionnaires du domaine public.
L’article 8 de l’ordonnance supprime ainsi l’obligation la plus générale de déclaration, celle qui s’appliquait indifféremment à toutes les manifestations sportives qui n’étaient ni organisées, ni autorisées par une fédération. En revanche, la possibilité pour le préfet d’interdire de telles manifestations est réaffirmée au cas où la tenue de l’une d’entre elles présenterait des risques d’atteinte à la dignité, à l’intégrité physique ou à la santé des participants. À cet égard, les matchs du XV Parlementaire feront peut-être l’objet de cette interdiction...
Sourires.
D’autres mesures relèvent de la voie réglementaire. Un décret du 24 juin dernier concerne les manifestations de sports de combat. Il remplace le régime d’autorisation préalable par une déclaration et exonère les manifestations inscrites au calendrier d’une fédération délégataire. En contrepartie, le champ est élargi, au-delà de la boxe, à toutes les disciplines autorisant la fin du combat par KO et le préfet se voit reconnaître clairement un pouvoir d’interdiction s’il y a lieu.
Concernant les autres manifestations sportives, notamment sur la voie publique comme les courses cyclistes, nous avons travaillé avec mon collègue Bernard Cazeneuve à un autre projet de décret, en concertation avec les fédérations concernées. Ce texte doit être publié d’ici à la fin de l’année. Il s’inscrit dans le même esprit d’allégement des procédures formelles, tout en permettant à l’autorité publique d’intervenir plus directement pour interdire ou pour prescrire des exigences particulières si la situation le justifie.
J’en viens maintenant à un aperçu des dispositions supplémentaires qui viennent s’ajouter à l’article 1er de ratification. L’article 2 vise à corriger une conséquence indirecte de la suppression de certaines procédures de déclaration ou d’autorisation sur le champ d’intervention de l’Agence française de lutte contre le dopage. En effet, l’AFLD pouvait intervenir en particulier « pendant les manifestations sportives soumises à une procédure de déclaration ou d’autorisation prévue par le présent code » selon les termes de son article L. 232-5. L’allégement de ces procédures entraînait ainsi mécaniquement une restriction de son champ d’action. Il était donc nécessaire de rétablir le périmètre précédent par une nouvelle rédaction.
Je laisserai au rapporteur le soin de présenter en détail l’article 2 bis, qui résulte d’un amendement qu’il a présenté en commission. J’indique d’ores et déjà – et cela ne le surprendra pas – que le Gouvernement émettra un avis très favorable à cette mesure qui répond à une demande exprimée par l’agence mondiale antidopage peu après la publication de l’ordonnance du 30 septembre 2015 de transposition du nouveau code mondial. Il nous restait en effet ces deux dispositions pour être pleinement conforme au code mondial antidopage, c’est chose faite à présent et je tiens à remercier le rapporteur pour son excellent travail.
L’article 3 ne concerne pas le champ du sport, mais les pouvoirs de l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Il s’agit également de la rectification d’une conséquence indirecte de la suppression d’un régime d’autorisation préalable du commissaire aux comptes de certains établissements bancaires ou d’assurance qui relèvent de son champ.
Voilà, mesdames et messieurs les députés, ce que je tenais à vous dire concernant le projet de loi de ratification de cette ordonnance que le Gouvernement soutient tout naturellement.
Pour conclure, je voudrais dire que le Gouvernement s’enorgueillit d’avoir, pendant cette législature, privilégié tout ce qui concerne la lutte pour l’éthique dans le sport : que ce soit la retranscription du troisième code mondial antidopage que nous achevons aujourd’hui, que ce soit la lutte contre les manipulations des compétitions sportives, que ce soit la lutte contre la fraude technologique récemment apparue, la France a toujours été à la tête de ces combats. C’est une fierté que le Parlement peut et doit partager avec le Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à M. Pascal Deguilhem, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, je dois vous avouer que, comme vous, monsieur le secrétaire d’État, j’ai été quelque peu surpris qu’un projet de loi qui ratifie une ordonnance contenant pour l’essentiel des dispositions relatives aux secteurs agricole, financier et funéraire, ou encore à l’activité des débits de boissons et des acteurs des transports, ait été renvoyé à la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Toutefois, on le comprend mieux quand on s’aperçoit, en lisant l’ordonnance du 17 décembre 2015 dont la ratification est proposée, que celle-ci comporte également un certain nombre de dispositions relatives aux manifestations sportives.
De caractère essentiellement technique, ce projet de loi qui nous invite à ratifier cette ordonnance, tout en corrigeant deux malfaçons de cette dernière, est l’occasion pour notre commission d’apporter sa contribution à l’oeuvre de simplification qu’ont entreprise le Gouvernement et les parlementaires, qui y sont très attachés.
Cette action s’est notamment traduite par l’habilitation donnée à l’exécutif, par l’article 10 de la loi du 20 décembre 2014, pour prendre par ordonnance « toute mesure relevant du domaine de la loi aux fins de supprimer ou de simplifier les régimes d’autorisation préalable et de déclaration… », vous venez de le rappeler, monsieur le secrétaire d’État.
Ce lourd travail de suppression ou de simplification des régimes d’autorisation, voire de remplacement de ces derniers par des régimes déclaratifs, a été entrepris dans le prolongement de la consécration du principe selon lequel le silence gardé par l’administration vaut accord.
En effet, depuis le souhait émis par le Président de la République, la règle prévaut selon laquelle « le silence gardé pendant deux mois par l’administration sur une demande vaut décision d’acceptation », tandis que, jusqu’alors, tel n’était pas le cas.
Il s’agit là d’une véritable révolution administrative, qui ne constitue cependant en rien – pour répondre à la préoccupation qui s’exprime toujours lorsque l’on revisite les régimes d’autorisation – une forme de dérégulation. En effet, toutes les administrations qui ont engagé cette démarche de recensement des régimes d’autorisation ont constaté au cours de ce travail que, dans le cadre de certaines procédures applicables aux entreprises, l’application du principe selon lequel le silence vaut accord devait s’accompagner de mesures complémentaires d’allégement des contraintes administratives.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a sollicité, en 2014, une habilitation à prendre par ordonnance des mesures législatives, afin de donner toute sa portée et son effectivité à ce principe nouveau selon lequel c’est l’acceptation, et non plus le rejet, qui est la règle. Avec la ratification qui vous est proposée de l’ordonnance du 17 décembre 2015 portant simplification de certains régimes, il nous faut aujourd’hui conforter l’important travail accompli.
L’article 1er du projet de loi a donc pour objet de ratifier expressément cette ordonnance. Cette ratification porte certes sur des mesures qui visent certaines activités professionnelles bien éloignées des préoccupations quotidiennes de la commission, mais elle met aussi fin, comme vient de le rappeler M. le secrétaire d’État, à l’obligation de déclaration auprès de l’autorité administrative de toute compétition, rencontre, démonstration ou manifestation publique de quelque nature que ce soit, dans une discipline sportive, qui n’est pas organisée ou autorisée par une fédération sportive agréée. Il s’agit là d’un domaine complexe dans lequel les élus locaux et les organisateurs – les associations – sont quelque peu perdus. L’autorité administrative compétente conservera néanmoins la possibilité d’interdire la tenue d’une manifestation sportive lorsque celle-ci présente – ce qui est parfois le cas avec les activités nouvelles – des risques d’atteinte à la dignité, à l’intégrité physique ou à la santé des participants. L’autorité doit, sur ces points, garder pleinement la main sur l’organisation de ces manifestations.
Cependant, la suppression des dispositions prévoyant cette obligation de déclaration a, par contrecoup, retiré à l’AFLD la compétence, qu’elle tenait de l’ordonnance du 30 septembre 2015 adaptant notre législation au code mondial antidopage, de diligenter des contrôles pendant les manifestations sportives soumises à une procédure de déclaration prévue par le code du sport. Si donc l’on s’en tenait au texte de l’ordonnance du 17 décembre 2015, l’AFLD ne pourrait plus effectuer de contrôles pendant les manifestations sportives qui ne sont pas organisées par une fédération sportive agréée ou autorisées par une fédération sportive délégataire. Au vu de l’élargissement des activités et de la prolifération d’activités nouvelles, on mesure le risque qu’il y aurait à enlever à l’AFLD la capacité de vérifier ce qui se passe lors de ces manifestations. C’est la raison pour laquelle l’article 2 du projet de loi vise à corriger cette malfaçon en permettant à l’AFLD de réaliser des contrôles pendant les manifestations sportives que je viens d’évoquer.
En complément du rétablissement de ce pouvoir de contrôle des sportifs, l’article 2 élargit – ce qui est dans l’ordre des choses – le panel de sanctions dont dispose l’AFLD. Aux sportifs qui auraient détenu ou utilisé, sans raison médicale dûment justifiée, une ou des substances ou méthodes interdites, ou qui auraient refusé de se soumettre à des contrôles ou de fournir des renseignements précis et actualisés sur leur localisation permettant la réalisation de contrôles, l’AFLD pourra interdire de participer aux manifestations sportives donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature, quand bien même elles ne seraient pas autorisées par une fédération délégataire ou organisées par une fédération agréée, ainsi que de prendre part à leur organisation ou à leur déroulement.
Pour prendre en compte, autant que les sportifs, l’éventail de leur environnement, il est prévu que l’AFLD pourra également interdire la participation à l’organisation ou au déroulement de ces manifestations aux personnes autres que des sportifs, qui ont prescrit, administré, acquis, fabriqué ou cédé des produits dopants ou qui se sont opposées à un contrôle.
En somme, l’article 2 tend à mettre en place un dispositif cohérent visant à éviter que ne se développent, en dehors du cadre des fédérations, des manifestations sportives qui ne feraient pas l’objet de contrôles antidopage et des comportements répréhensibles qui ne feraient pas l’objet de sanctions.
En complément de ce dispositif qui rétablit les compétences de l’AFLD telles qu’antérieurement, et en lien avec lui – et, bien entendu, en plein accord avec l’AFLD –, la commission a adopté, sur ma proposition, un amendement visant à ce que le profilage biologique ne soit pas réservé aux sportifs qui participent à des compétitions fédérales. Il s’agit donc d’élargir la capacité de l’AFLD à effectuer des contrôles sur la base de profilages biologiques à l’ensemble des sportifs, c’est-à-dire d’étendre le champ d’application du suivi longitudinal du profil biologique au-delà des sportifs de haut niveau, des sportifs « Espoir » et des sportifs professionnels licenciés des fédérations, listés aujourd’hui à ce titre.
Je précise que notre assemblée avait déjà adopté ce dispositif en juin dernier, à mon initiative, ainsi qu’à celle de Régis Juanico et de Brigitte Bourguignon – certes à l’article 13 bis du projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté. La commission spéciale du Sénat chargée d’examiner ce texte a ensuite jugé que ce n’était pas le lieu approprié pour introduire cette disposition, tout en convenant cependant que cette modification administrative apparaissait à la fois « utile et nécessaire » pour notre cohérence avec l’Agence mondiale antidopage. Elle a du reste été officiellement demandée par cette dernière au gouvernement français et l’AFLD est en plein accord avec nous à ce propos.
Je tiens à souligner que ce dispositif d’élargissement du champ des sportifs soumis au profil biologique présente un lien étroit et direct avec le présent projet de loi. Tout d’abord, en effet, comme son intitulé l’indique, l’objet de ce texte est non seulement de ratifier l’ordonnance du 17 décembre 2015, mais aussi de modifier le code du sport.
D’autre part – je le souligne à l’intention de nos collègues de l’opposition –, la disposition du code du sport modifiée par l’article 2 figure dans le même chapitre du même titre du même livre du code du sport que les dispositions modifiées par cet article 2 et l’ensemble de ces dispositions ont trait à la lutte contre le dopage.
Enfin, je ne m’attarderai pas sur l’article 3 du projet de loi, bien éloigné de nos préoccupations, qui rétablit l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution dans sa capacité de nommer un commissaire aux comptes supplémentaire dans les organismes de contrôle de l’assurance.
Étant donné que nous avons introduit dans ce texte, lors de son examen en commission, les dispositions qui nous semblaient utiles, je vous invite, mes chers collègues, sur tous les bancs – conformément à notre vote en première lecture sur les questions relatives au dopage –, à confirmer le vote de la commission et à adopter ce projet de loi qui consacre l’ambitieuse entreprise de simplification du Gouvernement et de la majorité, tout y apportant les ajustements techniques que j’ai tenu à préciser.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Pierre Allossery, premier orateur inscrit.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour débattre d’un texte technique, dont la cohérence globale peut être difficilement perceptible à la première lecture mais qui apporte des corrections indispensables à une ordonnance relative à la simplification de la vie des Français. Cette ordonnance du 17 décembre 2015, qui portait sur le régime d’autorisation préalable et de déclaration des entreprises et des professionnels, découle de la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives, que nous avons collectivement adoptée après un accord en commission mixte paritaire. Il est donc essentiel de pouvoir assurer l’application définitive de cette grande loi par la ratification de l’ordonnance du 17 décembre 2015, proposée par l’article 1erdu texte.
Il s’agit surtout de poursuivre l’ambition de simplifier la vie des entreprises et des particuliers en France, notamment au moyen du régime de simples déclarations ou d’autorisations préalables de la part de l’administration. Ces déclarations peuvent avoir trait à la possession d’animaux comme à l’organisation d’événements, dont des compétitions ou challenges sportifs.
À ce titre, l’article 2 rétablit l’autorité et le pouvoir de l’Agence française de lutte contre le dopage sur le contrôle des événements sportifs donnant lieu à remise de prix mais non organisés sous l’égide d’une fédération sportive agréée. Cet article corrige ainsi une conséquence involontaire de l’ordonnance qui privait l’AFLD de la possibilité d’effectuer des opérations de contrôle lors d’événements où la prise de produits anabolisants est parfois courante, à savoir dans le monde sportif amateur.
L’examen de cet article doit être en effet l’occasion de rappeler ici une réalité du sport moderne : le dopage ne se réduit malheureusement pas strictement aux compétitions organisées par des fédérations et disputées par des sportifs de haut niveau ou professionnels. La réalité de la pratique dopante en France est malheureusement plus large, et ainsi plus inquiétante. Elle concerne aussi des sportifs du dimanche, amateurs qui souhaitent améliorer leurs résultats, briller dans des compétitions locales donnant lieu à remise de prix ou, plus simplement, accélérer les effets physiques de la pratique sportive sur leur corps. C’est donc à cette autre réalité que l’AFLD doit également s’attaquer au moyen du contrôle, permis par cet article 2, des manifestations sportives donnant lieu à la remise de prix.
L’article 2 élargit également, en cohérence, le champ des sanctions prises par l’Agence afin de lui permettre de prononcer des peines d’interdiction de participer à ces manifestations amateurs, mais aussi de viser, outre les sportifs, les personnes qui auront prescrit, administré ou cédé des produits dopants.
Enfin, je me réjouis de l’amendement, présenté par le rapporteur et adopté en commission, relatif à l’extension des dispositions de contrôle du passeport biologique à l’ensemble des sportifs, afin de rapprocher la France des exigences de l’Agence mondiale antidopage et de donner suite à un amendement présenté précédemment dans le cadre du projet de loi « Égalité et citoyenneté ».
L’article 3 du projet de loi corrige également une disposition figurant à l’article 18 de l’ordonnance du 17 décembre 2015, qui privait l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution de la possibilité de désigner un commissaire aux comptes pour tout organisme intervenant dans le secteur de l’assurance.
La correction de cette restriction involontaire, qui s’expliquait par une rédaction limitative de l’article L. 612-43 du code monétaire et financier, ne visait, pour ce qui concerne la possibilité de désigner un commissaire aux comptes, que le secteur bancaire. Cette correction permettra de renforcer le contrôle du secteur assurantiel, qui joue un rôle déterminant dans un grand nombre d’activités économiques en France, parmi lesquelles l’organisation de manifestations sportives.
Pour toutes ces raisons, la ratification de l’ordonnance du 17 décembre 2015 et des dispositions correctives décrites est nécessaire et urgente. Le groupe socialiste, écologiste et républicain votera donc ce projet de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’ordonnance proposée ce jour à la ratification du Parlement est fondée sur l’article 10 de la loi de simplification de la vie des entreprises.
Elle comporte trois articles : l’article 1er, ratifiant l’ordonnance portant simplification de certains régimes d’autorisation préalable et de déclaration des entreprises et des professionnels ; l’article 2, portant rétablissement du champ de compétence de l’Agence française de lutte contre le dopage – l’AFLD – à l’ensemble des manifestations sportives plutôt qu’aux seules manifestations organisées ou autorisées par une fédération agréée ; l’article 3, portant sur le rétablissement de la possibilité pour l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution de nommer un commissaire aux comptes supplémentaire dans les organismes intervenant dans le secteur de l’assurance – ce dernier article ne nécessitera pas de commentaire particulier de ma part, contrairement aux deux articles précédents.
Je sais que vous en êtes désolé, monsieur le secrétaire d’État, et je comprends votre déception ! En revanche, s’agissant de l’article 1er de l’ordonnance portant simplification de certains régimes d’autorisation préalable, tout ce qui favorise la simplification de la vie des entreprises est par principe une bonne chose.
En tant que députée du Mont-Blanc, j’entends quotidiennement les TPE et les PME appartenant au tissu industriel de ma circonscription dire à quel point il est compliqué de vivre dans ce monde de contraintes et de formalités administratives. Dès lors, tout ce qui va dans le sens de la simplification est appréciable ! Les entreprises en ont besoin car elles doivent vivre dans un monde allégé de contraintes et de charges.
Au terme de cette simplification, le silence de l’administration vaudra décision implicite, revenant ainsi sur le principe de notre droit selon lequel le silence de l’administration ne vaut jamais acceptation. Le champ d’application de cette disposition méritera d’être largement précisé : il faudra ainsi prendre garde à ce que ce gain de célérité, puisque c’est de cela qu’il s’agit, ne s’accompagne pas d’une diminution de la qualité des décisions qui seront rendues. Les administrations concernées devront en effet faire preuve de vigilance dans leur choix du silence car, comme le disait le doyen Carbonnier, il y a des silences qui parlent beaucoup et d’autres qui parlent moins. Il faudra donc veiller à éviter de présenter des requêtes légalement discutables.
Deuxième disposition : l’article 2 de l’ordonnance portant rétablissement du champ de compétence de l’AFLD à l’ensemble des manifestations sportives plutôt qu’aux seules manifestations organisées ou autorisées par une fédération agréée. Ainsi que vous l’avez indiqué, mes chers collègues, l’article L. 232-5 du code du sport dispose que « l’Agence française de lutte contre le dopage (…) définit et met en oeuvre les actions de lutte contre le dopage ».
Conformément au code mondial antidopage, la loi offrait à l’Agence française une compétence très large pour réaliser sa mission. Malheureusement, une mauvaise rédaction de l’article 17 de l’ordonnance du 17 décembre 2015 a eu pour conséquence de restreindre le champ de compétence de l’AFLD. Sa mission s’en est trouvée limitée, sa compétence ne couvrant plus les manifestations non organisées par des fédérations sportives agréées ou non autorisées par des fédérations délégataires.
En pratique, cette restriction a engendré des conséquences directes néfastes en matière de lutte antidopage. Ainsi, l’Agence ayant effectué des contrôles lors de manifestations de culturisme, des infractions ont été relevées mais n’ont pu être poursuivies jusqu’à leur terme parce que cela n’entrait pas dans le champ de la légalité. Le présent article 2 permettra par conséquent à l’Agence française de retrouver compétence sur toute manifestation sportive donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature, organisée ou non par une fédération agréée et autorisée ou non par une fédération délégataire. Naturellement, tout ce qui va dans le sens de la lutte antidopage est une bonne chose!
Deux amendements ont été déposés sur cet article. Je ne sais pas si le premier de ces amendements, déposé par le député Premat, sera maintenu. Il vise à la modification de l’article L. 230-3.
Apparemment il est retiré. Il soulevait en effet un certain nombre de questions, en particulier sur la compétence territoriale de l’Agence : celle-ci a-t-elle compétence pour organiser des contrôles à l’extérieur du territoire français ? Il s’agit d’une question de fond, même si l’on sait que cela est tout à fait possible dans certains cas.
Concernant l’unique amendement à l’article 2, puisque le premier n’a pas été maintenu, émanant du rapporteur, il vise à prévoir des prélèvements biologiques pour l’ensemble des « sportifs », au sens large. Là encore, c’est évidemment positif.
L’établissement du profil du sportif permet de mettre en évidence l’utilisation d’une substance ou d’une méthode interdite, les paramètres recherchés contribuant à révéler les variations « anormales » du profil et, par conséquent, à déceler l’usage interdit. Ainsi, l’établissement et l’analyse du profil via des paramètres pertinents permettent non seulement de lutter contre le dopage mais également de protéger la santé de l’athlète. Toutefois, si notre pays est depuis fort longtemps à l’avant-garde de la lutte antidopage, peut-être devrions-nous, à l’avenir, nous tourner davantage vers un suivi sur le long terme du profil des athlètes, visant en particulier la santé et le bien-être des athlètes.
L’extension du champ d’application du profil biologique aurait toutefois mérité un vrai débat de fond. Une proposition de loi relative à l’éthique du sport a été déposée sur le bureau du Sénat et sera examinée dans les jours prochains : nous aurions sans doute dû traiter cette question dans ce texte, dont le champ d’application couvre précisément ce sujet. C’était l’occasion de reparler de cette politique de lutte antidopage qui nous est chère, sur tous les bancs de cette assemblée. Qu’il soit de droite ou de gauche, notre pays est depuis fort longtemps à l’avant-garde de cette lutte antidopage ; cela méritait d’être rappelé. Nous aurons une discussion plus large sur l’éthique du sport dans le texte qui sera examiné prochainement à l’Assemblée nationale.
Cela étant, ce ne sont que quelques remarques et je m’empresse de vous dire que, naturellement, l’ensemble du groupe Les Républicains votera ce texte.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’ordonnance que le Gouvernement nous propose de ratifier pourrait s’apparenter à un catalogue de mesures hétéroclites concernant tant le code général des collectivités territoriales que le code général des impôts, le code de la santé publique, le code forestier, le code de la route, le code du sport, le code du travail ou encore le code monétaire et financier.
Sur la forme, les députés du groupe de l’Union des démocrates et indépendants sont toujours, par principe, assez réticents lorsque le Gouvernement souhaite recourir aux ordonnances, dans la mesure où le législateur se trouve dessaisi de sa compétence. Dans le même temps, la qualité comme la lisibilité de la norme juridique ayant un effet direct sur la compétitivité et l’attractivité de notre pays, notre groupe ne peut que soutenir tout effort de simplification à destination des entreprises.
Ce projet de loi s’inscrit ainsi dans la continuité d’une longue démarche de simplification, amorcée dans les années 1970 et à laquelle les députés centristes ont toujours adhéré. La politique de simplification, guidée par le principe de proportionnalité, a nécessité d’évaluer les différentes procédures administratives pesant sur les entreprises, afin de recentrer les efforts des services sur les enjeux principaux et d’améliorer l’efficacité et la qualité du service. Il apparaît en effet que dans un certain nombre de domaines, l’autorisation administrative préalable à l’exercice d’une activité professionnelle ne se justifie plus.
Cette ordonnance clarifie, à juste titre, les régimes applicables. Nous veillerons néanmoins à ce qu’une telle orientation ne conduise pas à une dégradation de la professionnalisation dans certains secteurs. Je pense ainsi aux activités relevant du domaine culturel et touristique et à l’exercice de la profession d’agent de voyages. Alors que la fréquentation touristique à Paris et en Île-de-France a connu au premier semestre une baisse sans précédent depuis 2010, il ne faudrait pas que la qualité du secteur pâtisse de ces nouvelles réglementations.
Sur la deuxième partie de l’ordonnance, à savoir la lutte contre le dopage, nous sommes satisfaits de la mobilisation des pouvoirs publics devant cet enjeu sanitaire et sportif majeur. Le dopage est un désastre en termes de santé publique, mais également un fléau moral puisqu’il attaque la crédibilité de la valeur du sport, de l’effort et du dépassement de soi.
Depuis plusieurs années, notre arsenal législatif et réglementaire a été renforcé. Le groupe de l’Union des démocrates et indépendants a largement soutenu les avancées introduites par le nouveau code mondial antidopage et particulièrement les dispositions permettant de favoriser le renseignement et le partage d’informations.
Aujourd’hui, le rétablissement du contrôle de l’Agence française de lutte contre le dopage aux compétitions qui ne sont pas organisées par les fédérations mais par des entreprises ou des particuliers, est une mesure à nos yeux essentielle car elle permet un suivi de la pratique sportive et une sensibilisation accrue des pratiquants, fussent-ils occasionnels.
Les risques que le dopage fait courir dans le sport professionnel se retrouvent malheureusement dans la pratique amatrice ou semi-professionnelle. Les produits utilisés sont souvent les mêmes que chez les professionnels mais ils le sont de manière anarchique et en quantité impressionnante. Aussi est-il essentiel de mieux contrôler l’ensemble des compétitions.
Enfin, en ce qui concerne la possibilité pour l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution de nommer un commissaire aux comptes supplémentaire dans les organismes intervenant dans le secteur de l’assurance, le groupe de l’Union des démocrates et indépendants n’aura aucune difficulté à voter cette disposition et approuve ainsi l’ensemble du projet de loi.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État – quel plaisir de vous retrouver ici ! –,…
Plaisir partagé !
…monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous étudions en première lecture aujourd’hui un projet de loi portant ratification de l’ordonnance du 17 décembre 2015, ordonnance qui vise trois objectifs.
Il s’agit tout d’abord de supprimer des régimes d’autorisation et de déclaration qui peuvent retarder l’exercice d’une activité professionnelle, puis d’alléger les régimes d’autorisation préalable et de déclaration, enfin, de substituer des régimes déclaratifs à des régimes d’autorisation préalable. En résumé, cette ordonnance, de caractère essentiellement technique, permettra d’améliorer les relations entre le public et l’administration en simplifiant les procédures administratives.
Nous ne pouvons que nous réjouir de l’objectif visé par ce texte, qui couvre des champs aussi variés que les secteurs agricole, financier, funéraire ou encore la situation des débits de boissons. L’ordonnance englobe fort à propos toute une série de mesures relatives aux manifestations sportives et à la lutte contre le dopage.
Je sais que nombre de mes collègues sont sensibles à ces enjeux, particulièrement notre rapporteur et notre secrétaire d’État.
Ainsi, l’article 2 de ce texte rétablit le champ de compétence de l’Agence française de lutte contre le dopage en matière de contrôle des sportifs.
Cet article est fondamental. Le monde du sport est régulièrement pollué par les affaires de dopage. Qu’elles soient ou non relayées par les médias, il s’agit d’une question de santé publique à laquelle trop de sportifs professionnels ou amateurs sont confrontés. Les produits dopants écornent régulièrement l’image du sport et jettent le doute, souvent à tort, sur l’ensemble de la communauté des sportifs.
L’ordonnance consacre donc et même étend l’action de l’AFLD. Celle-ci pourra opérer les contrôles nécessaires lors des manifestations sportives donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature, même si elles ne sont pas organisées ou agrées par les fédérations. Les contrôles antidopage pourront également être opérés lors des entraînements – ce point est important.
Enfin, parce que les sportifs sont aussi parfois victimes de dopage à leur insu, l’Agence pourra également cibler toute personne qui administre des produits dopants ou qui s’oppose à un contrôle et leur interdire d’exercer lors de manifestations sportives.
Le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste ne peut que se féliciter de ces prérogatives. Je me demande si ces mesures ne pourraient pas être étendues aux manifestations sportives organisées en-dehors des fédérations et n’aboutissant pas à des remises de prix en argent ou en nature, de manière préventive. On le sait, les avantages récoltés en cas de victoire ne sont pas toujours le motif qui pousse au dopage. Je pense en particulier à certaines compétitions locales ou liées à des sports amateurs en marge de pratiques suivies par les médias. Il me semble qu’un encadrement spécifique serait raisonnable et nécessaire sur ce point qui concerne la vie et la santé de nos sportifs, y compris dans le cadre du sport amateur et non récompensé. On sait que la jeunesse est parfois inconsciente des dangers de ses enthousiasmes.
Concernant toujours le problème du dopage, le contrôle des tiers par l’AFLD constitue une prérogative des plus intéressantes, en tout cas extrêmement sécurisante.
L’article 3 du projet de loi traite d’un autre sujet. Il corrige des modifications sur le champ de compétence de l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution pour la désignation de commissaires aux comptes au sein des organismes soumis à son contrôle. L’ACPR avait perdu une faculté importante, que ce projet de loi rétablit. Il semble qu’il s’agisse d’une erreur formelle de l’ordonnance du 17 décembre 2015, que le Gouvernement propose aux parlementaires de réparer.
Cette restriction n’avait en effet pas lieu d’être. Le maintien de la possibilité de désignation d’un commissaire aux comptes supplémentaire dans les organismes du secteur de l’assurance était une contrepartie indispensable à la suppression de la procédure d’avis préalable. Compte tenu de la complexité et de la technicité du secteur de l’assurance, un commissaire aux comptes supplémentaire pour garantir un contrôle prudentiel efficace est particulièrement bienvenu. Le groupe RRDP se félicite donc du rétablissement d’un commissaire aux comptes supplémentaire dans le cadre des contrôles prudentiels dans le secteur de l’assurance.
Considérant que le projet de loi constitue en ces trois points un progrès certain, considérant que la simplification des procédures administratives est toujours une avancée bienvenue, considérant que les mesures de lutte contre le dopage des sportifs professionnels ou amateurs est conforme à l’esprit même du sport et salutaire pour les athlètes, c’est avec conviction que nous voterons en sa faveur.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le Président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi que nous étudions ce matin vise à ratifier l’ordonnance du 17 décembre 2015 portant sur le régime d’autorisation préalable et de déclaration des entreprises et des professionnels. Elle répondait à une volonté de simplification et de modernisation de nombreuses exigences réglementaires favorisant l’activité économique et le quotidien des particuliers.
La loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises portait cette ambition d’allégement des procédures. Aujourd’hui, ce projet de loi offre l’occasion d’adopter des dispositions corrigeant certains aspects de l’ordonnance.
En effet, l’article 2 rétablit notamment le champ de compétence de l’Agence française de lutte contre le dopage en matière de contrôle de sportifs et de sanction de l’utilisation de produits dopants pour les manifestations à vocation sportive concernées par l’ordonnance de décembre 2015 ayant fait l’objet d’un régime d’autorisation préalable ou de déclaration. Ces événements sportifs, organisés par des entreprises, des particuliers ou des structures associatives, ne sont pas programmés sous l’égide et le contrôle d’une fédération sportive agréée, champ d’intervention traditionnel de l’AFLD.
Cet article 2 constitue donc une correction de bon sens confortant l’autorité et l’efficacité de la mission de l’Agence et reconnaît que le dopage ne se réduit pas aux compétitions organisées par les fédérations et disputées par des sportifs de haut niveau ou des professionnels.
On l’a dit, en France, la pratique dopante s’avère malheureusement plus répandue et donc beaucoup plus inquiétante. Elle touche en effet de trop nombreux sportifs du quotidien qui souhaitent obtenir des prix dans des compétitions locales ou améliorer au maximum leurs performances physiques et sportives. Selon l’Académie nationale de médecine, entre 5 et 15 % des sportifs amateurs ont recours au dopage.
L’article 2 élargit également de manière cohérente le champ des sanctions prises par l’AFLD en lui donnant la possibilité d’interdire à des sportifs de participer à des manifestations d’amateurs et de viser les personnes prescrivant, administrant ou cédant des produits dopants.
Je me réjouis également de l’amendement, déposé lors du débat sur le projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté et repris par notre rapporteur, qui vise à étendre les dispositions de contrôle du passeport biologique à l’ensemble des sportifs, afin de rapprocher la France des exigences de l’Agence mondiale antidopage.
L’article 3 quant à lui corrige une disposition de l’article 18 de l’ordonnance du 17 décembre 2015 qui privait l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution de la possibilité de désigner un commissaire aux comptes supplémentaire pour tout organisme intervenant dans le secteur de l’assurance. Il fallait corriger la rédaction limitative de l’article L. 612-43 du code monétaire et financier, qui réservait cette faculté au domaine bancaire. L’adoption de cet article permettra donc de renforcer le contrôle du secteur assurantiel, qui joue un rôle déterminant dans de nombreuses activités économiques en France, parmi lesquelles figure l’organisation de manifestations sportives.
Pour toutes ces raisons, la ratification de l’ordonnance du 17 décembre 2015 s’avère nécessaire et urgente. Avec tous les collègues des groupes, je voterai en faveur de ce projet de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons vise à ratifier l’ordonnance no 2015-1682 du 17 décembre 2015 portant simplification de certains régimes d’autorisation préalable et de déclaration des entreprises et des professionnels et modifiant le code du sport. Cette ordonnance, publiée en décembre 2015, procède à trois séries de simplification et à l’ajustement de deux dispositions.
Il me semble important de revenir sur l’article 2, qui doit permettre de rétablir le champ de compétence de l’Agence française de lutte contre le dopage en matière de contrôle des sportifs.
Au lendemain des Jeux olympiques de Rio, et surtout à la suite de la révélation des errements de pays comme la Russie, nous devons redoubler de vigilance en matière de dopage. Or, on le sait, le dopage ne touche pas seulement le monde professionnel, il sévit aussi dans le monde amateur.
L’AFLD, comme vous le savez, est une autorité publique indépendante chargée de lutter contre le dopage depuis maintenant dix ans. Assurant des missions très larges de conseil, de contrôle et de réglementation, elle s’est vue dotée de nouveaux moyens depuis le 15 novembre 2013, suite à la transposition, aux plans législatif et réglementaire, de la version du code mondial antidopage par le Conseil de fondation de l’AMA, qui est entrée en vigueur au sein du mouvement sportif depuis le 1er janvier 2015.
Les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer le respect des principes du code mondial antidopage figurent dans l’ordonnance du 30 septembre 2016 de modernisation de notre système de santé. Elles confèrent aux acteurs de la lutte contre le dopage des moyens accrus, notamment à l’AFLD. Elle a vu ses possibilités de sanction renforcées et ses possibilités de contrôle pendant les manifestations sportives étendues.
Dès l’entrée en vigueur de cette ordonnance, l’Agence a eu la possibilité de lutter contre les réseaux par une sanction d’interdiction d’organisation de manifestations sportives pour toute personne qui aurait prescrit, administré ou fabriqué des produits dopants ou qui se seraient opposées à un contrôle.
L’agence doit ainsi pouvoir assurer ses contrôles, même lorsqu’il s’agit de manifestations qui ne sont pas organisées par des fédérations sportives agréées. C’est ce que l’article 2 entend rétablir, suite à la suppression, par l’article 17 de l’ordonnance no 2015-1682, du régime de déclaration préalable de toute compétition, rencontre, démonstration ou manifestation publique, non organisées par des fédérations sportives agréées.
Cet article est fondamental parce qu’il faut encourager l’AFLD à continuer son action en lui donnant des moyens juridiques adaptés. Le panel de sanctions étendu dont disposera l’Agence permettra une prise de conscience efficace des dangers encourus par les sportifs, j’en suis convaincu. Un amateur de base, coureur, cycliste, pratiquant de sport collectif, pourra ainsi être désigné et convoqué pour se soumettre à un contrôle antidopage à partir du moment où il participera à une organisation fédérale inscrite sur un calendrier officiel. Il faut prendre conscience des dégâts du dopage chez les amateurs, qui est un vrai sujet de préoccupation. Je le dis d’autant plus que je suis moi-même un sportif et que j’ai pu le constater.
Aujourd’hui on reste confronté à des comportements très dangereux qui présentent de vrais risques sanitaires car si les sportifs professionnels peuvent être encadrés et suivis de près médicalement, ce n’est pas le cas des sportifs amateurs. C’est donc un problème de santé publique.
Chez les cyclistes notamment, l’usage du Tramadol, un antidouleur, ou l’usage détourné des corticoïdes sont légion. Les sportifs mettent leur santé en danger. Une étude menée par l’AFLD en mars dernier dans le peloton guadeloupéen du Tour de France a révélé, parmi les coureurs qui se sont avérés positifs, l’usage de saignées pour éviter les contre-indications à la pratique sportive. Nous ne devons donc pas sous-estimer cette question.
Et c’est pourquoi la prévention est nécessaire. Elle doit se faire en amont de la carrière professionnelle, au moment de l’adolescence, avant d’atteindre les compétitions de haut niveau.
La prévention, comme le rappelle l’AFLD, n’est pas contradictoire avec la répression. Elle va de pair avec des sanctions cohérentes. Elle doit être une priorité car l’éducation des sportifs relève aussi de l’action du service public. C’est également le rôle des fédérations, qui doivent agir davantage dans ce domaine. Il est urgent de traiter le dopage comme un problème de santé, au même titre que le cancer ou le sida.
Plus largement, le dopage pose aussi une question culturelle, lui qui associe le sport à l’aide médicamenteuse pour l’exploit surhumain. La surconsommation de produits de confort autorisés par les règlements devient la norme et influence forcément la psychologie du sportif. En outre, cette pratique renforce l’existence des trafics de produit dopants. Nous nous devons de réagir et de comprendre ce qui pousse nos sportifs à tricher.
Il faut donc continuer la lutte contre le dopage car nous avons pour devoir de protéger tous les sportifs. Il faut renforcer encore plus la prévention en matière de dopage, dans le domaine professionnel ou amateur. Il faut amener une véritable prise de conscience chez les sportifs des risques encourus et ne pas fermer les yeux sur ce fléau qui mine les valeurs et l’image du monde sportif.
Enfin, donner à l’AFLD les moyens de faire face à ces enjeux, c’est faire en sorte que le dopage devienne une affaire de santé publique. C’est pourquoi je voterai avec conviction, comme mes collègues, ce projet de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le projet de loi tendant à ratifier l’ordonnance du 17 décembre 2015 portant simplification de certains régimes d’autorisation préalable et de déclaration des entreprises et des professionnels et modifiant le code du sport, et plus précisément son article 2, qui vise à rétablir le champ de compétence de l’Agence française de lutte contre le dopage.
Dans un souci de simplification administrative, le Gouvernement, à travers l’article 17 de ladite ordonnance, a supprimé le régime de déclaration préalable à l’autorité administrative, ce qui a eu pour conséquence de priver l’Agence de la possibilité de diligenter des contrôles pendant des manifestations sportives autres que celles organisées ou autorisées par une fédération sportive. Un résultat allant à l’encontre de l’objectif premier : le respect des principes du code mondial antidopage transposé dans notre droit interne.
L’AFLD ayant été amputée d’une partie de ses compétences, il était primordial de les rétablir afin de respecter nos principes français de lutte contre le dopage et les principes du code mondial antidopage.
L’objectif de cet article est donc de rectifier cette malfaçon en redonnant à l’Agence la possibilité de réaliser des contrôles pendant les manifestations sportives qui ne sont pas organisées par une fédération agréée ni autorisées par une fédération délégataire, dès lors qu’elles donnent lieu à une remise de prix en argent ou en nature.
De plus, sur le fondement des recommandations de l’Agence mondiale antidopage, ce présent projet de loi permet aussi d’élargir le champ de compétence résultant de l’ordonnance du 30 septembre 2015. L’AFLD pourra interdire à des personnes autres que des sportifs, qui auront prescrit, administré, acquis, fabriqué ou cédé des produits dopants ou qui se seront opposées à un contrôle, de participer à l’organisation ou au déroulement de ces manifestations.
Cet article 2 permet d’endiguer le développement du dopage et d’éviter sa banalisation, en dehors du cadre des fédérations et des manifestations sportives qui ne feraient pas l’objet de contrôles antidopage. Il conforte aussi la philosophie sportive française de l’objectif du « zéro tolérance » qui inspire la politique du Gouvernement – comme en témoigne le climat aux Jeux olympiques de Rio, en 2016, marqués par un ras-le-bol général des athlètes propres…
…qui n’ont pas hésité à critiquer, voire à dénoncer et à condamner sur les réseaux sociaux, des athlètes dopés. C’est bien la première fois qu’un tel mouvement de libération de la parole est engagé contre le dopage par les sportifs eux-mêmes. Un réel agacement des athlètes face à cette pratique a entaché cet événement mondial.
Aujourd’hui le dopage est certes un problème de santé publique : les substances dopantes, dangereuses pour la santé, provoquent, nous le savons tous, des dysfonctionnements très sérieux – comme les troubles hépatiques, hypertension, troubles psychiques – qui peuvent être préjudiciables à la performance et surtout à la santé.
Pour finir, monsieur le secrétaire d’État, le dopage pollue l’éthique du sport. Ainsi, dans un objectif de transparence, les nouveaux outils juridiques dont sera dotée l’AFLD lui permettront de lutter plus efficacement pour préserver les valeurs du sport – ces valeurs culturelles et économiques auxquelles la France est très attachée –, mais aussi de protéger la santé du sportif, de combattre les trafics de produits interdits, et de protéger l’image du sport et des sportifs.
D’ailleurs, je tiens à saluer l’initiative de mon collègue Pascal Deguilhem, rapporteur du présent texte, qui a réintroduit par un amendement l’extension du champ d’application du passeport biologique pour nous mettre en conformité avec le code mondial antidopage. Ce dispositif améliorera la traçabilité des sportifs puisqu’il est fondé sur le suivi au fil du temps de variables biologiques sélectionnées qui révèlent indirectement les effets du dopage, par opposition à sa traditionnelle détection directe. Le principe est d’identifier et de cibler les sportifs devant se soumettre à des contrôles antidopage à travers une interprétation intelligente et opportune des données du passeport.
Enfin, en tant que sportif, chef d’une entreprise sportive et judoka, je ne peux que me féliciter de ce projet. Et je veux dire, monsieur le secrétaire d’État, qu’aujourd’hui, dans les salles de remise en forme, dans certains arts martiaux – et je suis ravi de mener pour vous une mission sur les combats libres et les arts martiaux mixtes –, trop de charlatans, trop de guignols, ont oublié l’éducation, se contentant de combats de coqs et de pitbulls.
Notre volonté, au contraire, est de construire un monde dans lequel le sport, comme la culture, seront des outils pour permettre à nos enfants, demain, de vivre dans une République apaisée.
Je vous remercie et voterai ce texte avec enthousiasme.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La discussion générale est close.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
Je veux remercier les orateurs du soutien apporté à ce texte : j’ai cru comprendre qu’il faisait l’unanimité, il est toujours bon de le signaler.
Lutter contre le dopage c’est bien, si on donne aussi à l’AFLD les moyens de le faire. Dans le projet de loi de finances que vous allez examiner, le Gouvernement a décidé d’augmenter de 700 000 euros le budget de cette agence, soit une hausse de presque 10 % : je tenais à vous le signaler.
Sophie Dion est partie, sinon je lui aurais répondu, en la remerciant de bien vouloir voter ce projet, que nous examinions le texte de la commission et qu’il n’y avait plus d’amendements.
Je voudrais aussi rassurer M. le ministre, qui a évoqué le XV parlementaire : celui-ci échappe bien entendu aux nouvelles dispositions, puisqu’il n’y a pas de distribution d’argent ni de lot en nature…
Sourires.
Dans notre ancrage historique, dans la tradition des matches avec les équipes britanniques comme celui qui aura lieu en février prochain avec l’équipe anglaise, l’éthique prévaut sur tout – et néanmoins nous gagnerons ce match.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
Les articles 1er, 2, 2 bis et 3 sont successivement adoptés.
Le projet de loi est adopté.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi ratifiant les ordonnances no 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation et no 2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation et simplifiant le dispositif de mise en oeuvre des obligations en matière de conformité et de sécurité des produits et services (nos 3814, 4047).
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire.
Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, sous l’impulsion du Président de la République, le Gouvernement et sa majorité ont fait le choix, dès 2012, de renforcer les droits et la confiance des consommateurs, pour en faire un levier essentiel de la relance de la croissance française. Ce choix, nous le constatons avec les dernières prévisions, est sur le point d’être récompensé.
Pour arriver à ce résultat, il a d’abord fallu apporter des garanties supplémentaires et de nouveaux droits aux consommateurs. C’était chose faite dès 2014 avec la loi défendue par Benoît Hamon, qui est venue renforcer les droits de consommateurs trop souvent malmenés. Quelques exemples concrets : les élèves des auto-écoles ne sont plus obligés de payer des frais à la restitution de leur dossier ; les achats de lunettes de vue sur internet sont encadrés ; les comparateurs en ligne sont obligés de proposer une information claire, transparente et loyale.
Cette loi sur la consommation est même allée plus loin. De nouveaux droits ont été créés : le droit de s’opposer au démarchage téléphonique abusif avec Bloctel ; le droit de résilier à tout moment, après un an de contrat, son assurance automobile ou multirisque habitation ; ou encore le droit d’obtenir réparation des dommages matériels subis à l’occasion d’un acte de consommation, avec l’action de groupe.
Aujourd’hui, après le renforcement de ces fondations et l’instauration de nouvelles règles, nous achevons le toit de cette grande maison du droit du consommateur. Vous l’aurez compris, ce toit c’est la recodification du code de la consommation, soumise à votre ratification à travers l’ordonnance du 14 mars 2016 relative à la partie législative du nouveau code de la consommation.
La loi a permis des avancées historiques en matière de droit du consommateur. Pourtant, un écueil reste à déplorer : les consommateurs ignorent le plus souvent leurs droits, nouveaux ou plus anciens, ce qui les empêche d’en bénéficier pleinement.
Un droit ou une liberté ne valent que si l’on peut en jouir pleinement. Sinon, ils ne restent que de beaux principes connus d’une poignée d’experts et ignorés du reste de la population.
Or, l’accès à l’information, autrement dit la lisibilité du code de la consommation, relevait de la chasse au trésor pour ceux qui trouvaient la patience de s’informer de leurs droits.
Certains d’entre vous savent de quoi je parle. Erreurs rédactionnelles, manque d’harmonisation des rédactions en matière de sanction notamment, ou même oublis : une refonte de ce code était nécessaire.
Cette recodification, entrée en vigueur le 1er juillet dernier, vient simplifier les dispositions et éclairer les utilisateurs que sont le consommateur, le professionnel, mais aussi l’administration, sur les règles et les droits en matière de consommation.
À travers une modernisation de l’organisation du code que les services de l’État préparent depuis déjà une dizaine d’années – je remercie vivement celles et ceux qui ont beaucoup travaillé sur cette question – les consommateurs ont enfin accès à une meilleure lisibilité de leurs droits et bénéficient donc d’une garantie supplémentaire quant à leur effectivité. La confiance à l’égard des professionnels est ainsi renforcée et le pouvoir d’achat des ménages protégé, nos concitoyens étant désormais mieux informés.
Les entreprises, quant à elles, peuvent d’ores et déjà profiter de cette nouvelle organisation pour dénicher de bonnes pratiques commerciales et s’accorder une plus forte sécurité juridique.
Enfin, les services de l’État disposeront de procédures et de pouvoirs d’enquête simplifiés, sécurisés et regroupés dans un livre dédié. La DGCCRF, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, peut en particulier jouir d’un nouveau dispositif de sanctions administratives et de nouveaux pouvoirs pour conduire encore plus efficacement ses enquêtes, de façon « masquée » ou en sollicitant des agents externes.
Madame la rapporteure, je tiens à vous donner des précisions sur la question que vous avez soulevée s’agissant des non-professionnels. Le non-professionnel s’apprécie au cas par cas lorsqu’une personne morale n’agit pas à des fins artisanales, commerciales ou encore industrielles. Cette définition, jusqu’ici jurisprudentielle, permet de préciser dans le code les protections dont bénéficient ces non-professionnels notamment, par exemple, en matière de clauses abusives. Ces dispositions peuvent alors bénéficier à des associations à but non lucratif, à des comités d’entreprise ou à des syndicats de copropriétaires qui ont recours à des prestations auprès d’autres professionnels hors de leur champ d’activité. Par exemple, une association se verrait protégée par le code de la consommation si elle dispose d’un abonnement téléphonique et que, lorsqu’elle souhaite le résilier, il lui est demandé de respecter un préavis alors que l’opérateur n’en a pas. Néanmoins – je tiens à vous rassurer sur ce point – cette définition est placée dans le code à droit constant et en permet simplement une plus grande lisibilité.
À ce jour, la jurisprudence n’a pas retenu le cas de l’application de la notion de non-professionnel aux collectivités locales, cependant, on ne peut pas exclure qu’à titre exceptionnel les juridictions puissent retenir cette qualification. Cela pourrait par exemple être envisageable pour une collectivité qui n’interviendrait pas en tant que prestataire, sous forme de régie ou de délégation de service public, et pourrait être déclarée victime d’une clause abusive dans un contrat ou d’une pratique commerciale trompeuse.
Mesdames et messieurs les députés, notre action pour protéger les consommateurs français ne s’arrête pas là, vous vous en doutez.
Nous avons été contraints tout au long de ce mandat par un contexte de crise économique dépassant largement nos frontières – je veux parler de la crise des « subprimes » venue d’outre-Atlantique qui a affecté directement la distribution du crédit immobilier en France.
Avec la directive européenne du 4 février 2014, nous avons mis en place un cadre juridique harmonisé du crédit hypothécaire à l’échelle européenne et nous avons facilité l’avènement d’un marché intérieur du crédit immobilier responsable et protecteur du consommateur. C’est l’objet de l’ordonnance du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation qui transpose cette directive. Ces nouvelles dispositions sont appliquées aux contrats dont l’offre aura été émise après leur entrée en vigueur soit, pour l’essentiel, depuis 1er juillet 2016.
De nouvelles obligations ont été introduites dans le droit français, applicables aux établissements de crédit et aux intermédiaires de crédit – comme la remise d’une fiche d’information standardisée –, à l’évaluation de solvabilité, aux règles de conduite et de rémunération ainsi qu’aux règles de compétence.
De toute évidence, compte tenu de l’encadrement juridique robuste d’ores et déjà applicable au crédit immobilier en France, certaines dispositions ne nécessiteront qu’une simple adaptation du droit français aux exigences posées par la directive.
Je souhaite souligner que l’élaboration de cette ordonnance a donné lieu à une abondante concertation avec les organisations professionnelles et les associations de consommateurs. Je me réjouis de cette démarche constructive dans l’intérêt de tous.
Mesdames et messieurs les députés, le texte qui vous est soumis aujourd’hui a encore été amélioré sur le plan rédactionnel à l’occasion de l’examen en commission. À cet égard, je tiens à remercier la rapporteure pour la qualité de son travail. Je vous proposerai trois modifications afin d’aboutir à un texte qui apportera à nos concitoyens, à nos entreprises et aux services de l’État un cadre juridique modernisé au service de la protection des consommateurs et, in fine, du renforcement de l’économie française.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à Mme Audrey Linkenheld, rapporteure de la commission des affaires économiques.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires économiques, chers collègues, nous sommes aujourd’hui réunis pour examiner le projet de loi no 4047 qui tend à ratifier deux ordonnances récentes, l’une du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation, l’autre du 25 mars sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation.
Si les projets de loi de ratification d’ordonnances sont quasi systématiquement déposés dans le délai imparti lors de la loi d’habilitation – l’ordonnance, sinon, est caduque –, il est plus rare que ces projets de loi soient inscrits à l’ordre du jour et examinés comme c’est le cas ce matin. Pour les ordonnances dont nous discutons aujourd’hui, cela s’est révélé nécessaire afin, comme vous l’avez dit madame la secrétaire d’État, de sécuriser le dispositif juridique et, ainsi, de parachever un long travail.
En effet, la volonté de refonder le code de la consommation est ancienne puisque, malgré une codification relativement récente issue de la loi du 26 juillet 1993, l’architecture du code de la consommation est apparue inadaptée et peu accessible pour ses utilisateurs en raison des nombreuses réformes intervenues dans le domaine du droit de la consommation et, aussi, de l’important mouvement de transposition d’un certain nombre de normes européennes.
Par deux fois, en 2008 et en 2010, le Parlement avait ainsi habilité le Gouvernement à procéder à cette refonte par voie d’ordonnance sans toutefois que ces deux habilitations, pour des raisons diverses et variées, puissent aboutir.
Au cours de cette législature, c’est donc à l’occasion de l’examen de la loi « consommation » que le Parlement a de nouveau habilité le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour procéder à cette recodification du code de la consommation dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la promulgation de la loi – elle a été promulguée le 17 mars 2014 et l’ordonnance a été quant à elle publiée, nous l’avons dit, le 14 mars 2016 : les délais ont donc été respectés.
Conformément à cette habilitation parlementaire, la recodification de la partie législative a été opérée à droit constant, sous la réserve de modifications rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, pour harmoniser l’état du droit, remédier aux éventuelles erreurs – cela peut arriver – ou insuffisances de codification et pour abroger les dispositions, codifiées ou non, devenues depuis sans objet.
Le projet vise donc principalement à aménager le plan du code et à déterminer une clé de répartition plus rationnelle entre les différents livres. Ce sont 1 113 articles législatifs qui ont ainsi été redistribués dans huit nouveaux livres, lesquels se substituent aux cinq livres anciens. Chaque livre comporte désormais les règles, les dispositifs de contrôle et les sanctions administratives, civiles et pénales en cas de non-respect.
Pour ajouter encore à l’ampleur de la tâche, on précisera que parallèlement à ce volet législatif, le même travail a été conduit sur le plan réglementaire aboutissant au décret du 29 juin 2016 permettant au nouveau code d’entrer en vigueur au 1er juillet 2016 comme vous l’avez dit, madame la secrétaire d’État.
Si ce travail de clarification était évidemment nécessaire et permettra sans aucun doute un meilleur accès au droit, il impliquera inévitablement une période transitoire – toujours un petit peu compliquée – au cours de laquelle chacun cherchera à retrouver dans le nouveau code les articles avec lesquels il avait l’habitude de travailler dans l’ancien. Je précise donc que, pour faciliter cette transition, le ministère a mis en ligne une table de concordance permettant de faire plus facilement l’aller-retour entre l’ancienne et la nouvelle numérotation du code.
La deuxième ordonnance qu’il nous est demandé de ratifier concerne, vous l’avez dit, les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation, ordonnance qui a été prise cette fois en application de l’article 14 de la loi du 30 décembre 2014 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière.
Le délai d’habilitation, cette fois, était de quinze mois à compter de la promulgation de la loi, soit le 30 mars 2016, et le projet de loi de ratification devait être déposé devant le Parlement dans un délai de cinq mois à compter de la publication de l’ordonnance. Pour faire écho à quelques interrogations de collègues formulées en commission des affaires économiques, je précise donc que, là aussi, les délais ont été parfaitement respectés puisque l’ordonnance a été publiée le 25 mars 2016 et le projet de loi de ratification déposé le 8 juin 2016.
Cette deuxième ordonnance vise donc à transposer une directive du Parlement européen et du Conseil du 4 février 2014 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel. Cela a été souligné : cette directive a été élaborée sur le plan européen suite à la crise des« subprimes » et compte tenu de la prépondérance – dans certains pays européens en tout cas – d’un système de crédit hypothécaire où le crédit est accordé d’abord en référence au prix du bien et non aux capacités de remboursement de l’emprunteur.
Je tiens à rappeler que la France est plutôt une exception en la matière. D’ailleurs, dans la résolution proposée à mon initiative ainsi que celle de quelques collègues adoptée par la représentation nationale à l’unanimité le 13 juin dernier, nous avons bien souligné que nous voulions protéger, dans le cadre des négociations en cours au comité de Bâle, ce système français de crédit immobilier qui, contrairement à d’autres, fonctionne peu sur l’hypothèque et sur les taux variables mais… qui fonctionne bien – il a notamment prouvé sa grande résilience face à cette crise de 2008.
C’est pourquoi, si la transposition de la directive de 2014 a nécessité des ajustements techniques et, en effet, des consultations répétées auprès des acteurs du marché, elle n’a pas bouleversé le droit français du crédit immobilier à usage d’habitation.
Un exemple : la directive prévoit la professionnalisation de l’activité d’évaluation du prix des biens immobiliers dans le cadre de l’octroi de crédits hypothécaires, or, en France, l’impact de cette mesure sera en fait très marginal : les crédits hypothécaires étant minoritaires, l’activité d’évaluation des biens l’est également.
Je souhaite toutefois souligner à mon tour deux nouveautés entrées en vigueur le 1er octobre 2016 : d’une part, vous l’avez dit, la fiche d’information standardisée européenne qui permet à l’emprunteur de mieux déterminer si le contrat de crédit proposé correspond bien à ses besoins et de comparer les différentes offres entre elles ; d’autre part, le taux annuel effectif global – TAEG –, déjà en vigueur pour le calcul des crédits à la consommation, qui remplacera désormais partout notre actuel taux effectif global – TEG –, l’objectif étant encore de permettre à l’emprunteur de comparer plus facilement les offres et, surtout, de mesurer leur impact réel sur sa situation financière personnelle.
Vous l’avez compris, le projet de loi qui nous est soumis ce matin ne se contente pas d’une ratification sèche des deux ordonnances : des modifications rédactionnelles sont proposées afin de corriger telle ou telle erreur de référence ou de tirer ici ou là dans un autre code une conséquence qui avait été initialement omise.
Comme souvent, le travail s’est poursuivi après le dépôt du projet de loi le 8 juin dernier et sont apparus, ici ou là, d’autres oublis, parfois de petites erreurs dans la codification, ce qui entre nous soit dit n’est guère étonnant compte tenu de l’ampleur du travail accompli.
Sur mon initiative et après quelques auditions que j’ai menées, la commission des affaires économiques a donc pu adopter un certain nombre d’amendements visant à corriger ces quelques imprécisions et erreurs de référence sans que pour autant, je le répète, le droit existant n’en soit modifié. Le travail de toilettage s’est encore un peu poursuivi après l’examen en commission, le Gouvernement ayant déposé quelques amendements de précision – un peu tardivement ! – mais ils ne soulèvent de mon point de vue aucune difficulté.
Avec la commission des affaires économiques, je vous appelle donc à adopter ce projet de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, mes chers collègues, la publication, il y a deux semaines, du rapport annuel du Conseil d’État consacré, une nouvelle fois, à la simplification et à la qualité du droit exige que nous, parlementaires, oeuvrions encore plus ardemment à la clarté de la loi.
Ce sujet, quelque ardu et austère qu’il puisse paraître, est pourtant essentiel pour assurer le maintien du pacte social, la sécurité de tous, comme le dynamisme des entreprises. « Nul n’est censé ignorer la loi » : nous devrions avoir en tête cet adage à chaque fois que nous sommes amenés à voter.
Aujourd’hui, les députés du groupe de l’Union des démocrates et indépendants saluent ce projet de loi de ratification, qui s’inscrit aussi bien dans le processus de codification que dans celui de simplification entamé depuis de longues années par les gouvernements et les majorités successifs.
Toutefois, en tant qu’élue de Nouvelle-Calédonie, je regrette que le travail de recodification mené n’ait pas encore abouti en ce qui concerne les dispositions du code de la consommation relatives à l’outre-mer. J’espère que cette lacune sera vite comblée.
Car il s’agit d’une faiblesse récurrente des ordonnances prises par le Gouvernement que d’omettre les dispositions relatives aux collectivités d’outre-mer. J’ai d’ailleurs eu l’occasion d’alerter le Gouvernement et la représentation nationale à ce sujet lors de l’examen du projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer, pas plus tard qu’hier soir. Je ne m’étendrai donc pas davantage sur ce point.
Sur le fond, le texte technique sur lequel nous sommes appelés à nous prononcer n’appelle pas de commentaire politique particulier. Il vise, d’une part, à simplifier notre droit, et, d’autre part, à transposer des normes européennes dans l’ordre juridique interne. Le groupe UDI adhère à ces deux initiatives.
Ainsi, la première ordonnance que nous sommes appelés à ratifier vise à rendre le droit de la consommation plus clair et intelligible pour l’ensemble de nos concitoyens en présentant, dans le code rénové, les dispositions applicables à chaque étape de l’acte d’achat.
Pour les professionnels aussi, cette mise à jour est bénéfique. Ils pourront avoir une meilleure lisibilité de leurs obligations. Ils pourront identifier plus aisément les règles applicables et les conditions dans lesquelles ils sont susceptibles d’être contrôlés, ainsi que les sanctions qu’ils encourent en cas de non-respect des obligations qui leur incombent.
La deuxième ordonnance dont la ratification est prévue par ce projet de loi transpose dans notre droit interne la directive 201417UE du Parlement européen et du Conseil sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel. Cette dernière avait été conçue afin d’éviter toute éventualité d’une crise des subprimes sur le continent européen. En effet, la prépondérance, dans certains pays européens, d’un système de crédit hypothécaire où le crédit est accordé en référence au prix du bien et non aux capacités de remboursement de l’emprunteur, constitue un risque potentiel qu’il convient de maîtriser par un meilleur encadrement de ce marché.
Même s’il est vrai que les consommateurs français ne vont être que marginalement touchés par ces nouvelles dispositions, il convient de souligner qu’elles vont dans le bon sens, notamment car elles renforcent l’information des consommateurs. À ce sujet, nous tenons à rappeler notre attachement au système de crédit français, qui pourrait se voir menacé par les négociations en cours au sein du comité de Bâle.
Nous avons adopté le 13 juin dernier, à l’unanimité, une résolution afin de protéger notre système de crédit immobilier, qui, contrairement à d’autres, fonctionne correctement et a démontré sa résilience lors de la crise de 2008. Il convient que nous restions attentifs à ce sujet alors que se poursuivent les travaux du comité de Bâle.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, le groupe UDI votera ce projet de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le projet de loi ratifiant les ordonnances du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation et du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation et simplifiant le dispositif de mise en oeuvre des obligations en matière de conformité et de sécurité des produits et services.
Ce projet de loi vient parachever un long travail, commencé dès 2013 avec les débats, ici même, sur la loi relative à la consommation, adoptée le 17 mars 2014. Ce texte fait partie des lois de ce quinquennat qui ont permis de nombreuses avancées pour les consommateurs comme pour les professionnels, qui bien souvent ne s’y retrouvaient pas. Les ordonnances qui en découlent, et que nous examinons, ne posent donc pas de problème politique, puisqu’elles visent à simplifier et à clarifier le code de la consommation à droit constant, et à retranscrire dans notre droit, comme le veut la loi, une directive européenne en matière de droit de la consommation et de crédit immobilier.
L’examen de ce projet de loi par la commission des affaires économiques n’a soulevé aucun problème majeur. Reprenant les propos que j’y ai tenus, j’affirme que ce projet de loi, qui est indispensable, permettra aux consommateurs de mieux s’y retrouver et de mieux appréhender leurs droits en matière de consommation. En effet, ils pourront se référer à une loi plus claire, moins complexe, et ordonnée selon les étapes de l’acte d’achat.
De même, les professionnels du secteur, qui auront une meilleure visibilité de leurs obligations, pourront désormais identifier plus facilement les règles qui leur sont applicables et le cadre dans lequel ils sont susceptibles d’être contrôlés, voire sanctionnés en cas de manquement.
S’agissant de l’administration de contrôle, elle disposera de procédures et de pouvoirs d’enquête simplifiés et sécurisés, regroupés dans un livre – une simplification réclamée par tous.
La seconde ordonnance a pour objet de transposer une directive européenne sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel. Cette directive, qui institue un cadre juridique harmonisé à l’échelle européenne pour la distribution du crédit immobilier et du crédit hypothécaire, crée un statut européen pour les intermédiaires en crédit immobilier.
Cette ordonnance renforce également la protection du consommateur et comporte des dispositions applicables aux prêteurs et aux intermédiaires de crédit, non seulement dans le domaine de l’offre et de la distribution de crédit, mais aussi en matière de règles de bonne conduite et de rémunération, telle que l’exigence de compétences professionnelles, imposée aux personnels des prêteurs et des intermédiaires à leur entrée dans la profession et tout au long de leur activité professionnelle. L’activité d’intermédiaire, qui peut être exercée en libre prestation de services ou en libre établissement sur le territoire de l’Union européenne, est désormais organisée en matière de crédit immobilier.
Enfin, ce projet de loi comprend une mesure nouvelle, qui tend à simplifier le dispositif légal de mise en oeuvre des obligations en matière de conformité et de sécurité des produits et services.
Ce projet de loi est donc l’aboutissement d’un travail législatif qui donne les outils de rééquilibrage des pouvoirs non seulement entre consommateurs et professionnels mais aussi entre les entreprises, dans leurs relations de clients à fournisseurs. Au vu de ces éléments, le groupe socialiste, écologiste et républicain votera pour le projet de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
Les articles 1er, 2, 2 bis, 2 ter sont successivement adoptés.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 2 portant article additionnel après l’article 2 ter.
Avant de soutenir cet amendement, je souhaiterais répondre à l’inquiétude de Mme Lagarde s’agissant de la transcription des ordonnances en outre-mer. Une habilitation de douze mois supplémentaires a été prévue pour mettre en place les extensions et adaptations nécessaires aux collectivités d’outre-mer. Tous les travaux n’ont certes pas pu être menés, mais ils le seront dans les délais impartis.
Cet amendement du Gouvernement vise à étendre aux non-professionnels les règles de protection contre les pratiques commerciales trompeuses, qui protègent d’ores et déjà les consommateurs et les professionnels, et à appliquer aux professionnels comme aux non-professionnels l’ensemble des dispositions prohibant les pratiques commerciales trompeuses.
Il s’agit donc de tirer les conséquences de l’introduction dans le code de la consommation de la définition des non-professionnels, en étendant à ceux-ci les règles de protection contre les pratiques commerciales trompeuses, déjà applicables aux consommateurs et aux professionnels. En outre, pour des raisons de cohérence juridique, l’amendement vise à appliquer aux professionnels et aux non-professionnels l’ensemble des dispositions prohibant les pratiques commerciales trompeuses, notamment les omissions trompeuses.
À ce jour, en effet, seuls les consommateurs, personnes physiques, sont protégés contre les pratiques d’omissions trompeuses visées à l’article L. 121-3 du code de la consommation.
Avis favorable. Cet amendement est une bonne nouvelle pour les non-professionnels, notamment les associations, les comités d’entreprise, les syndicats de copropriétaires, qui pourront bénéficier de la protection offerte aux consommateurs.
Nous nous étions également interrogés sur les collectivités territoriales, dont le statut peut être un peu hybride. Sur ce sujet, madame la secrétaire d’État, vous avez bien voulu apporter un début de réponse dans votre propos liminaire, ce dont je vous remercie.
L’amendement no 2 est adopté.
L’article 3 est adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 3 rectifié .
Cet amendement vise à octroyer un délai de mise en conformité de trois mois à compter de la publication de la présente loi, aux établissements prêteurs pour mettre en oeuvre au sein de leurs systèmes d’information la correction rédactionnelle apportée au b du 1° de l’article 4 de la présente loi.
La loi vient en effet corriger une erreur matérielle introduite dans la définition du coût total du crédit qui, dans sa rédaction actuelle, est sujette à des interprétations divergentes, pouvant entraîner une non-conformité à la directive 201417UE relative au crédit immobilier. Il s’agit de clarifier le fait que les frais d’acte notarié liés à la constitution d’une hypothèque sont bien inclus dans le coût total du crédit car ils constituent une condition pour obtenir ce crédit.
Tous les établissements n’ayant pas retenu la même interprétation de la définition du coût total, la clarification apportée par la présente loi pourra impliquer pour certains d’entre eux une mise en conformité de leurs systèmes d’information afin d’intégrer ces frais dans le coût total.
Un délai pouvant s’avérer nécessaire pour cette mise en conformité, je propose ce dispositif transitoire permettant de garantir un délai de trois mois pour les établissements qui ne seraient pas encore conformes.
La commission n’a pas eu l’occasion d’examiner cet amendement. À titre personnel, cependant, j’y suis favorable, pour les raisons qui viennent d’être explicitées. Ce dispositif est dans l’intérêt non seulement des établissements de crédit – du moins ceux d’entre eux qui n’avaient pas opéré, entre guillemets, le « bon choix » –, auxquels il laisse un temps un peu plus long pour s’adapter, mais surtout des emprunteurs en tant qu’il intègre les frais de notaire dans le coût global du crédit hypothécaire. Même si les hypothèques ne sont pas si nombreuses dans notre pays, il convient de protéger jusqu’au bout ceux qui y ont recours.
L’amendement no 3 rectifié est adopté.
L’article 4, amendé, est adopté.
L’article 5 est adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 1 .
L’objet de cet amendement est de supprimer les dispositions relatives aux modalités de l’expertise contradictoire mise en oeuvre par le procureur de la République ou le juge d’instruction en ce qui concerne les prélèvements réalisés dans le cadre du contrôle bactériologique.
En effet, dans le cadre de la recherche d’infractions en matière bactériologique, une procédure particulière prévoyait depuis 1972 des modalités de prélèvement particulièrement contraignantes et irréalistes s’agissant de produits très périssables. Cette procédure n’est plus mise en oeuvre dans la pratique, la preuve des infractions étant désormais apportée par des constatations directes, souvent complétées par des photos de l’état des locaux. C’est pourquoi cette procédure a été supprimée dans la partie réglementaire du code de la consommation à l’occasion de la recodification de ce dernier.
Cet amendement matériel tend à supprimer les modalités de contestation de cette procédure, qui n’existe plus.
L’amendement no 1 est adopté.
L’article 6, amendé, est adopté.
Les articles 7, 8, 9, 10, 11 et 12 sont successivement adoptés.
Le projet de loi est adopté.
Prochaine séance, lundi 10 octobre 2016, à seize heures :
Discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures quinze.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly