Intervention de Sergio Coronado

Réunion du 5 octobre 2016 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSergio Coronado :

Depuis le début du quinquennat, notre assemblée a adopté cinq textes de lutte contre le terrorisme : je ne suis pas sûr que l'on puisse parler de modération législative. Ce serait plutôt une prolifération. Certes, des évaluations ont eu lieu, mais elles ont parfois été défaillantes et n'ont pas eu de conséquences déterminantes sur le comportement législatif de l'Assemblée. Je rappelle par exemple que, le 13 janvier dernier, Jean-Jacques Urvoas – devenu depuis ministre de la justice – avait présenté une évaluation de la mise en place de l'état d'urgence, qui concluait que ce régime n'était efficace qu'une dizaine, voire une quinzaine de jours. Or nous sommes toujours en état d'urgence. Les textes prolifèrent donc, sans que leur efficacité soit réellement étudiée.

Nous examinons ce matin une proposition de loi du groupe Les Républicains. Au-delà du phénomène de compilation, je constate que les propositions régulières de l'opposition en matière de lutte contre le terrorisme visent à la fois à alimenter une forme de populisme pénal et à préparer la primaire de la droite et du centre. Mais elles sont aussi l'esquisse de ce que pourrait être un projet pénal, si l'opposition venait à remporter les élections. Depuis une vingtaine d'années, en effet, nous avons entrepris de basculer d'un droit pénal qui punit la commission de faits à un droit pénal prédictif, avec les dangers que cela implique. Si, dans notre assemblée où de trop rares voix s'élèvent contre cette tendance, l'opposition à ce mouvement de privation de libertés et de contournement du juge judiciaire est très minoritaire, elle existe bel et bien, tant dans la société civile que dans les instances internationales, très inquiètes de la dérive française.

J'espère qu'il se trouvera une majorité dans cette commission pour s'opposer aux propositions de l'opposition. Sans esprit polémique, j'ai pourtant l'impression que, depuis plusieurs mois, la majorité a parfois cédé très facilement aux propositions pour le moins contradictoires ou répressives de M. Ciotti. Je rappellerai la proposition qui avait été faite, lors du débat sur la première prorogation de l'état d'urgence, d'un état d'urgence élargi et prorogé à six mois : le Gouvernement s'y était opposé. Or nous sommes toujours en état d'urgence.

La meilleure façon de s'opposer aux propositions démagogiques de l'opposition est de camper fermement sur une ligne de crête. Je ne suis pas sûr que la privation et la restriction de nos libertés garantissent notre sécurité. Je crois même que les Français sont conscients que ce n'est pas le cas.

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