Intervention de Harlem Désir

Réunion du 4 octobre 2016 à 16h45
Commission des affaires étrangères

Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des Affaires étrangères et du Développement international, chargé des Affaires européennes, sur les suites du référendum britannique :

Vous avez raison, madame la présidente, il s'agissait du sommet de Zagreb, en 2000, sous présidence française – le Président de la République était alors Jacques Chirac et le Premier ministre Lionel Jospin –, au cours duquel nous avons soutenu la perspective européenne des pays occidentaux des Balkans. Et nous avons eu raison : c'est parce que nous avons fixé cette perspective qu'aujourd'hui, malgré des tensions qui doivent nous pousser à la vigilance, nous nous trouvons dans un contexte de coopération. La Bosnie-Herzégovine a évidemment un long chemin à parcourir et de nombreuses étapes devront encore être franchies avant d'envisager l'ouverture de négociations sur son éventuelle adhésion à l'Union européenne.

J'en viens à l'Ukraine. Désormais, aux Pays-Bas, après avoir réuni un certain nombre de signatures, on peut obtenir l'organisation d'un référendum, y compris sur des sujets dont on peut se demander s'il est judicieux de les soumettre ainsi au vote populaire, ainsi de la signature de l'accord d'association avec l'Ukraine – accord que, par cette voie, les Néerlandais ont rejeté. Constitutionnellement, toutefois, le résultat du référendum ne lie pas les mains du gouvernement qui n'en doit pas moins, d'un point de vue politique, en tenir compte malgré une très faible participation.

Lors du conseil européen des 28 et 29 juin, le premier ministre néerlandais, Mark Rutte, a fait valoir que les Pays Bas souhaitaient trouver une solution à Vingt-Huit qui soit juridiquement contraignante et qui laisse le texte de l'accord avec l'Ukraine intact – lancer un nouveau processus de ratification poserait d'énormes problèmes à l'Ukraine – ; mais, pour une durée indéterminée, il a exclu l'hypothèse d'une application provisoire de l'accord en question. Afin d'éviter la tenue d'un second référendum, il doit être clair que l'accord d'association n'est pas une première étape vers l'élargissement, clair que l'ambiguïté doit être levée sur l'article relatif à la coopération en matière militaire qui ne doit pas équivaloir à une clause de sécurité collective, clair enfin que l'accord d'association ne doit pas engager l'Union européenne à un soutien financier sans fin. Voilà donc qui devrait permettre au gouvernement néerlandais d'arguer de ce qu'il a été tenu compte du résultat du référendum mais sans remettre en cause l'accord d'association. Et le premier ministre Rutte souhaite annoncer rapidement la solution afin d'éviter une notification de non-ratification. Les consultations se poursuivent entre Mark Rutte et Donald Tusk afin que le Conseil européen adopte une déclaration interprétative. Jean-Claude Junker, de son côté, s'est engagé à présenter des propositions au Conseil le plus rapidement possible, si bien que le sujet pourrait être abordé lors du Conseil européen des 20 et 21 octobre.

Michel Vauzelle a évoqué en particulier les suites qui seront données au référendum britannique. J'ai déjà tâché de répondre.

Pierre Lequiller s'est interrogé sur le fait de savoir si le Royaume-Uni allait garder ou non le passeport financier. La réponse est non. Si l'on s'en tient à la logique de la déclaration du Premier ministre britannique le week-end dernier, le Royaume-Uni ne pourra pas participer pleinement au marché intérieur – la configuration à envisager ne sera donc pas celle de la Norvège – et il n'y a donc aucune de raison de lui conserver le passeport financier. C'est mon interprétation et ce sera notre position. Reste, encore une fois, que c'est l'Union européenne qui va négocier.

N'est-ce pas l'occasion de renforcer la zone euro ? La réponse est, ici, affirmative et c'est bien l'idée sur laquelle Élisabeth Guigou a insisté. Le Brexit est l'occasion de renforcer l'union à Vingt-Sept autour des grandes priorités communes mais aussi de renforcer l'union économique et monétaire. Le débat que nous aurons à cette occasion ne sera pas celui de Bratislava mais un débat entre pays membres de la zone euro et qui devra nous mener au-delà des conclusions du rapport des cinq présidents. On constate que l'appréciation de la situation sépare les pays du Nord et ceux du Sud, les premiers voulant davantage de discipline dans le respect des règles et les seconds plus de solidarité, une meilleure convergence et posant la question d'une Union de transferts bancaires – sujet quasi tabou en Allemagne. Si l'on veut renforcer le respect des règles, il faut renforcer la convergence économique, fiscale et sociale, définir un projet commun. C'est dans l'intérêt des Vingt-Sept que d'avoir à coeur une zone euro qui fonctionne mieux. Avant que de nous préoccuper de gouvernance, avec, en particulier, une présidence stable, nous devons définir nos grands objectifs dès lors que nous considérons, comme vous l'avez souligné, madame la présidente, que la zone euro ne se réduit pas à une union monétaire. Une union monétaire ne saurait être viable, en effet, si elle n'est pas d'abord une union économique – nous avons toujours soutenu cette idée et les faits en confirment la validité. Nous avons tenté d'apporter des réponses partielles aux lacunes de l'Union économique et monétaire, notamment après la crise en instaurant des instruments de stabilité à l'efficacité d'ailleurs éprouvée : l'union bancaire, le mécanisme européen de stabilité… Eh bien, il faut aller beaucoup plus loin dans la définition d'outils de convergence économique et sociale.

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