Intervention de Jean-Pierre Decool

Séance en hémicycle du 13 octobre 2016 à 15h00
Défibrillateur cardiaque — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Decool, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État chargée des personnes âgées et de l’autonomie, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, pour l’année 2016, le Premier ministre a décidé d’attribuer le label « Grande cause nationale » au collectif d’associations « Adoptons les comportements qui sauvent ». Promouvoir ces comportements, ces gestes qui sauvent, c’est tout l’enjeu de la proposition de loi que j’ai l’honneur de défendre devant vous aujourd’hui.

Près de 50 000 personnes meurent chaque année inopinément, victimes d’un arrêt cardiaque. Ce chiffre n’est pas une fatalité. En effet, prises en charge dans les minutes qui suivent l’accident, ces personnes pourraient être sauvées. On estime le taux de survie à 35 % lorsque la victime est défibrillée. Chaque minute perdue, c’est 10 % de chances de survie en moins. C’est pourquoi il est nécessaire d’assurer une plus grande sensibilisation aux gestes de premier secours, ainsi qu’une plus grande implantation de défibrillateurs sur tout le territoire. C’est bien là un enjeu de santé publique. Mon collègue Alex Türk, sénateur du Nord, et moi-même avons donc déposé conjointement, dans nos assemblées respectives, cette proposition de loi relative au défibrillateur cardiaque.

Le texte adopté par la commission des affaires sociales mercredi dernier n’a retenu que l’une de nos propositions, celle figurant à l’article 2. Celui-ci prévoit la formation obligatoire des jeunes en milieu scolaire aux gestes de premier secours, en indiquant expressément que l’usage d’un défibrillateur y est inclus. Ce point est important, car il ne suffit pas de diffuser des appareils ; il faut également sensibiliser la population à leur maniement. En effet, bien que le défibrillateur cardiaque automatisé soit facile d’utilisation et employable par tous, dans l’urgence de la situation, certaines personnes peuvent perdre leurs moyens, et ce d’autant plus qu’elles n’ont jamais fait usage de ce matériel.

Depuis 1961, la Norvège enseigne à ses élèves de sept à seize ans les gestes élémentaires de survie. Le résultat est là, puisque 95 % de la population est formée aux gestes de premier secours ! Dans notre pays, seuls 40 % des Français seraient formés aux gestes qui sauvent, selon la Croix-Rouge. Notre marge de progression est donc considérable. L’exemple norvégien démontre qu’une formation précoce à la prise en charge de l’arrêt cardiaque permettrait une plus grande sensibilisation à l’âge adulte. Nous devons nous en inspirer.

La loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile précise déjà que « tout élève bénéficie, dans le cadre de sa scolarité obligatoire, d’une sensibilisation à la prévention des risques et aux missions des services de secours, ainsi que d’un apprentissage des gestes élémentaires de premier secours ». Cette ambition est certes louable, mais le format est contraignant, puisque la formation ne peut être assurée que par des organismes habilités ou des associations agréées. Toutes les personnes auditionnées nous ont confirmé que, dans les faits, l’objectif n’avait pas été atteint. Il est donc apparu qu’une initiation courte, d’une à deux heures environ, était suffisante pour faire acquérir aux enfants les gestes qui sauvent, sans remise de diplôme. Par conséquent, il faut parler non plus de formation, mais bien d’initiation – différence sémantique importante.

Cette initiation auprès des enfants est d’autant plus importante que ceux-ci peuvent, à leur tour, sensibiliser leur entourage. J’en veux pour preuve une évaluation récente menée auprès d’un groupe d’enfants de douze ans qui ont suivi une initiation d’une heure aux gestes qui sauvent. Trois mois après, les enfants avaient mémorisé les recommandations, et chacun d’entre eux avait sensibilisé huit à dix personnes autour de lui. Un organisme européen, le Conseil européen de réanimation, affirme que les enfants sont réceptifs aux instructions, qu’ils apprennent facilement à aider les autres, et qu’ « un enfant n’oubliera jamais comment sauver une vie »..

Nos concitoyens peuvent être les premiers à sauver des vies, avant même l’arrivée des secours. En moyenne, les pompiers arrivent sur les lieux dix minutes après l’accident cardiaque. Pour le SAMU ou le SMUR, il faut parfois attendre jusqu’à vingt minutes. Puisque nous savons que les cinq premières minutes sont cruciales pour la survie de la personne, nous ne devons pas hésiter à adopter cet article, qui vise à renforcer l’initiation de nos concitoyens aux gestes qui sauvent. Cependant, une meilleure gestion de l’arrêt cardiaque passe aussi par une action globale. La formation aux gestes qui sauvent est nécessaire, mais non suffisante, si l’équipement n’existe pas. Je propose donc de rétablir l’article 1er et l’article 3 de la proposition de loi initiale.

Un amendement vise ainsi à renforcer les sanctions en cas de vol et à créer un délit en cas d’acte de vandalisme contre des objets nécessaires à la sécurité ou à la santé des personnes et des lieux, notamment les défibrillateurs cardiaques automatisés. Rendre les défibrillateurs plus accessibles est le grand intérêt de notre dispositif, mais cela peut, malheureusement, entraîner des comportements répréhensibles.

La première rédaction proposée en commission des affaires sociales a suscité des discussions animées parmi nos collègues, qui trouvaient les sanctions très sévères. J’ai entendu les remarques des uns et des autres, et c’est pourquoi je vous présente aujourd’hui une rédaction corrigée.

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