Monsieur le président, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, chaque année, entre 30 000 et 60 000 personnes sont victimes d’une mort subite dans notre pays. Ces morts pourraient être évitées, si les bons gestes de premiers secours étaient prodigués avant l’intervention des secours médicaux. C’est précisément pendant ce laps de temps nécessaire à l’arrivée des secours que l’état d’une victime s’aggrave ou que le décès intervient. C’est donc pendant ce temps-là qu’il faut agir.
Toute personne témoin d’un arrêt cardiaque doit savoir initier la chaîne de survie. Cette chaîne, formée de quatre maillons, procure aux victimes d’urgences médicales les meilleures chances de survie : tout d’abord, l’appel rapide aux services de secours et de soins d’urgence ; puis le massage cardiaque, rapidement entrepris ; ensuite, une défibrillation précoce à l’aide d’un défibrillateur automatisé externe ; enfin, l’arrivée rapide de soins médicalisés, rendus possibles grâce à l’appel au SAMU.
Des efforts importants ont été mis en oeuvre ces dernières années pour former le public à cette chaîne de survie. La loi du 9 août 2004, relative à la politique de santé publique, a notamment prévu la délivrance d’un cours d’apprentissage sur les premiers gestes de secours aux élèves des collèges et des lycées. Par ailleurs, la loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile prévoit que chaque élève bénéficie, dans le cadre de sa scolarité obligatoire, d’une sensibilisation à la prévention des risques et aux missions des services de secours, ainsi que d’un apprentissage des gestes élémentaires de premiers secours. Enfin, le décret du 11 janvier 2006 prévoit qu’à l’issue du collège, au plus tard, les jeunes disposent de l’attestation de formation, qui inclut notamment l’usage d’un défibrillateur automatisé externe.
Malgré nos efforts, il reste du chemin à parcourir pour mieux former le public, et en particulier les jeunes, aux gestes élémentaires de premiers secours. C’est donc une priorité pour le Gouvernement. Si 49 % des Français ont suivi une formation aux premiers secours, seuls 29 % ont bénéficié du certificat de compétences de sécurité civile « Prévention et secours civiques de niveau 1 ». Nous sommes loin derrière nos voisins européens, puisque, à titre d’exemple, 80 % des Allemands et des Autrichiens sont formés. Pour améliorer la formation, le ministère de l’éducation nationale est pleinement mobilisé, puisque 7 000 formateurs en prévention et secours civiques de niveau 1 assurent actuellement la formation de 30 % d’élèves et de personnels de l’éducation. Afin d’augmenter ce pourcentage, il est envisagé de faire passer le nombre de formateurs à 10 000.
Par ailleurs, le cadre réglementaire de l’apprentissage des gestes de premiers secours existe. Grâce à nos efforts, le nombre de personnes formées augmente régulièrement, notamment chez les jeunes. Il faut continuer dans cette voie, en favorisant partout les initiatives visant à promouvoir l’appropriation de ces gestes par la population. La tendance est là : il nous faut amplifier nos efforts. L’ajout dans cette proposition de loi d’un article redondant, qui ne fait que rappeler des dispositions déjà en vigueur, ne nous semble pas utile. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement proposera tout à l’heure la suppression de l’article 2.
En revanche, s’agissant de l’utilisation du défibrillateur cardiaque, c’est un sujet sur lequel le Gouvernement et la ministre des affaires sociales et de la santé ont la conviction qu’il nous faut avancer. Depuis le décret du 4 mai 2007 relatif à l’utilisation des défibrillateurs automatisés externes par des personnes non médecins, « toute personne, même non médecin, est habilitée à utiliser un défibrillateur automatisé externe ». Il convient désormais d’encourager leur installation dans les lieux recevant du public.
Si des initiatives locales ont été prises pour installer des défibrillateurs, force est de constater qu’elles demeurent encore insuffisantes et manquent parfois de cohérence.
Nous proposons donc d’établir une obligation d’installation d’un défibrillateur automatisé externe ciblée sur certains établissements recevant du public, sans préjudice de la décision individuelle d’installation d’un DAE par toute personne le jugeant opportun.
L’installation des défibrillateurs automatisés externes au sein des établissements recevant du public présente un intérêt en termes de santé publique. Elle a également fait l’objet de recommandations par le Conseil Français de réanimation cardio-pulmonaire et par l’Académie de médecine, qui ont souligné l’intérêt de l’installation de ces dispositifs médicaux dans les lieux de passage fréquentés par une population importante, où statistiquement il se produira des arrêts cardiaques, et dans les lieux où le risque de mort subite est le plus important – je pense notamment aux stades ou aux équipements sportifs. L’objectif est non pas de mettre un défibrillateur à chaque coin de rue, mais de favoriser un maillage pertinent et une couverture optimale du territoire.
Par ailleurs, les défibrillateurs automatisés externes sont des dispositifs médicaux dont il convient d’assurer la maintenance. C’est un point que la proposition de loi n’abordait pas et sur lequel les débats en commission des affaires sociales ont été particulièrement intéressants. C’est la raison pour laquelle, à l’obligation d’installation d’un défibrillateur automatisé externe dans les établissements recevant du public, nous vous proposons de joindre une obligation de maintenance des appareils par les propriétaires des établissements. Ce dispositif d’urgence doit être en permanence en état de marche pour permettre de sauver des vies.
Enfin, mesdames, messieurs les députés, la question première qui se pose au moment de l’usage du défibrillateur, est celle de sa localisation précise. Pour pouvoir utiliser un défibrillateur, encore faut-il savoir où il se trouve. La constitution d’une base nationale de données relatives aux lieux d’implantation des défibrillateurs cardiaques automatisés externes sur l’ensemble du territoire est donc essentielle. Cette base doit permettre à tous de géolocaliser les défibrillateurs et de faciliter les opérations de maintenance de ces dispositifs médicaux. La base que nous vous proposons d’instaurer doit être accessible non seulement aux services de secours, mais aussi à d’autres opérateurs publics et privés, pour faciliter l’accès de la population à ces appareils en cas d’urgence. Un tel dispositif permettra de sauver des centaines de vies et de rattraper notre retard par rapport à nos voisins européens.
Mesdames, messieurs les députés, le Gouvernement apporte son soutien au texte présenté par l’opposition. Il s’agit d’un soutien certes critique, mais surtout constructif, car il concerne un problème de santé publique qui dépasse largement les clivages politiques. Je souhaite donc que nous puissions tous nous retrouver cet après-midi sur ce sujet.