Intervention de Serge Bardy

Séance en hémicycle du 18 octobre 2016 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2017 — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Bardy, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure, chers collègues, pour la deuxième fois de son histoire, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est saisie pour avis de la première partie du projet de loi de finances. Ce projet est à la fois le dernier de la législature et le premier depuis l’accord de Paris de décembre 2015. Le président Jean-Paul Chanteguet a souhaité que cette saisine permette à nouveau à la commission de s’assurer de la cohérence du projet de loi de finances avec les engagements pris par le Gouvernement en matière de développement durable. L’accord de Paris et l’adoption des lois relatives à la transition énergétique et à la biodiversité rendent cet exercice plus que jamais pertinent.

Ce projet de loi de finances tranche avec celui de l’an dernier, lorsque mon prédécesseur, Jean-Yves Caullet, regrettait qu’« aucune disposition ne concerne le développement durable ». Il s’agit au contraire du budget le plus favorable au développement durable de ce quinquennat. Ainsi, le budget du ministère de l’environnement est en hausse de 7 % par rapport à l’an dernier, ce que la commission du développement durable a bien évidemment accueilli avec satisfaction.

Cette augmentation traduit la mise en oeuvre des lois environnementales votées par notre assemblée, ouvrant les crédits nécessaires à la naissance de l’Agence française pour la biodiversité, laquelle disposera de soixante créations d’emplois sur un total de 1 227 agents. Les crédits destinés à financer les actions en matière de biodiversité augmenteront de 4 millions d’euros.

En 2017, 60 % des investissements verts du troisième programme d’investissements d’avenir seront consacrés à la transition énergétique et seront financés par des obligations vertes d’État, ou green bonds, que la France sera le premier pays à émettre. Le fonds de financement de la transition énergétique et de la croissance verte, créé par la loi du même nom, sera abondé de 250 millions d’euros en 2017. Il concernera désormais 500 territoires à énergie positive.

Les énergies renouvelables bénéficieront d’un milliard d’euros supplémentaires, soit 7 milliards au total. Cette montée en puissance sera financée par l’augmentation du prix de la tonne de C02, qui passera de 22 euros en 2016 à 30,50 euros en 2017, conformément à la trajectoire que notre assemblée a fixée l’an dernier sur proposition de la commission du développement durable.

La loi pour l’économie bleue, adoptée au printemps, connaîtra également une traduction budgétaire. Les crédits destinés à accroître l’attractivité du pavillon français seront augmentés de 19 millions d’euros et ceux consacrés à la préservation de la sécurité et de la sûreté de la navigation de 3,7 millions d’euros.

Enfin, le ministère investit également dans la sûreté nucléaire en dotant l’Autorité de sûreté nucléaire et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire respectivement de trente et de vingt agents supplémentaires.

La commission du développement durable a concentré son action sur cinq articles de cette première partie du projet de loi de finances pour 2017. L’article 10 proroge d’une année le crédit d’impôt pour la transition énergétique, mis en oeuvre le 1er septembre 2014 et dont les dispositions devaient, à l’origine, s’éteindre au 31 décembre 2016. Ce dispositif fiscal, qui favorise des dizaines de milliers d’emplois non délocalisables, a pour objectif d’inciter les ménages à s’engager dans une démarche d’amélioration de la performance énergétique des logements : sa prorogation constitue donc une excellente nouvelle. Cet article supprime par ailleurs la condition de ressources pour le cumul du CITE et de l’éco-prêt à taux zéro, dans le but de favoriser l’accès de tous les ménages au dispositif.

L’article 11 donne la possibilité au Syndicat des transports d’Île-de-France de financer ses projets en augmentant de quelques centimes, s’il le souhaite, la TICPE – taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques – perçue sur les carburants essence et gazole commercialisés sur le territoire de la région Île-de-France. Je m’étonne toutefois que la majoration ne soit pas la même pour le gazole et pour les autres carburants : même si l’écart est faible et ne porte que sur un dixième de centime, cela me semble être un mauvais signal.

L’article 22 du projet de loi de finances vise à augmenter les recettes du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique ». L’objectif consiste à équilibrer le solde du compte en mettant à contribution les énergies carbonées pour un montant représentatif de la hausse du prix de la tonne carbone entre 2016 et 2017, selon la trajectoire adoptée en loi de finances rectificative pour 2015, adoptée à l’unanimité par la commission du développement durable avec le soutien remarqué de l’opposition. Cela doit nous permettre d’atteindre un prix de 56 euros en 2020.

Compte tenu des dispositions inscrites dans l’article 22, la contribution de la TICGN – taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel – sera portée en 2017 à 341 millions d’euros, celle de la TICC – taxe intérieure de consommation sur les houilles, lignites et cokes – sera réduite à 1 million d’euros et celle de la TICPE portée à 1 389 millions d’euros.

L’article 23 modifie et détaille le barème du malus automobile du compte d’affectation spéciale « Aide à l’acquisition de véhicules propres ». Le seuil d’application du barème est abaissé à 127 grammes d’émission de dioxyde de carbone – ou C02 – au kilomètre, les véhicules dont les émissions sont inférieures à ce seuil n’étant pas pénalisés. Par ailleurs, alors que l’ancien barème imposait un malus par tranches, le nouveau barème lisse, gramme par gramme, les pénalités qui sont infligées, de manière à éviter les effets de seuil induits par l’ancien dispositif.

Le bonus de 10 000 euros versé aux acheteurs de véhicules électriques est prorogé. Il est complété par un bonus de 1 000 euros versé aux acheteurs de scooters et de deux-roues électriques.

Concernant les transports, l’article 24 relève le niveau de la taxe d’aménagement du territoire affectée au compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » afin d’assurer l’équilibre de ce compte sans augmenter la fiscalité pesant sur le système ferroviaire.

La commission du développement durable a par ailleurs souhaité aborder la question du financement de la politique des transports au travers d’amendements visant à augmenter les recettes de l’AFITF – Agence de financement des infrastructures de transport de France – via une augmentation de la TICPE, ce qui sera indolore pour les ménages étant donné le faible montant des carburants actuellement. Le sujet est crucial, puisque nous devons nous donner les moyens d’une politique des transports ambitieuse pour l’avenir de notre pays.

Au-delà de ces cinq articles, un mot tout de même sur la réforme de la taxe additionnelle sur les activités polluantes, dite TGAP. Sur ce point, le cabinet de la ministre m’a indiqué que le Gouvernement avait fait le choix de reporter la réforme au projet de loi de finances rectificative. On peut évidemment le regretter. La commission du développement durable a toutefois souhaité déposer des amendements d’appel afin d’aborder dès maintenant la question de la gestion des déchets, qui ne doit pas être le parent pauvre de la fiscalité écologique.

Je me permets, dans le cadre du rôle qui m’est confié, d’apporter des idées nouvelles et de poser les jalons des débats de demain sur le verdissement de notre fiscalité. Dans cette optique, je réponds à l’engagement de la ministre Ségolène Royal, qui souhaite que Paris devienne la « capitale de la finance verte », en abordant un débat d’avenir : le fléchage de l’épargne des Français vers des investissements plus durables.

D’autres mesures relatives à l’environnement figurent également dans la seconde partie du PLF, notamment dans les articles non rattachés : ainsi l’article 52 relatif à la dématérialisation de la propagande électorale, exemple éloquent d’une authentique mesure d’économie budgétaire que l’on maquille derrière un argument écologique au détriment de la démocratie.

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