Intervention de Manuel Valls

Séance en hémicycle du 19 octobre 2016 à 15h00
Questions au gouvernement sur des sujets européens — Politique européenne de la france

Manuel Valls, Premier ministre :

Monsieur Lequiller, parce que vous connaissez bien ces sujets, pour les traiter régulièrement – j’ai déjà eu l’occasion de vous répondre –, mais aussi parce que vous êtes un Européen convaincu, je suis toujours étonné non pas du ton que vous employez mais du caractère caricatural de vos question concernant l’engagement et la politique du Président de la République ou du Gouvernement sur les questions européennes.

Nous pouvons nous mettre très vite d’accord sur le constat : oui, l’Europe est à la croisée des chemins et même menacée de se déliter, de disparaître de l’histoire. Brexit, menace terroriste, crise des réfugiés, tensions au sein même de l’Union européenne entre les anciens pays de l’Est et de l’Ouest, entre le Nord et le Sud : nous savons que ces crises existent et il convient en effet d’en appeler à un sursaut, mais pas en caricaturant.

Je vous répondrai de manière extrêmement précise.

La zone euro était en très grande tension en 2012 – je n’accuse d’ailleurs pas le précédent Président de la République d’en être responsable – et elle est aujourd’hui stabilisée. Si la Grèce en est restée membre, c’est grâce à l’initiative du Président de la République François Hollande, alors même que, comme vous le savez, des voix s’élevaient en Allemagne pour qu’elle en sorte.

Certains voudraient que les choses évoluent beaucoup plus vite. Mais la vision et la volonté de la France, quelles que soient les majorités, impliquent d’accroître les investissements d’avenir – je pense au plan Juncker –, de modifier la gouvernance de l’euro, de mettre en place une autre politique et de donner un autre rôle à la Banque centrale européenne, comme je l’ai dit, dans cet hémicycle, lors du discours de politique générale. Et si tout cela est au coeur des débats, si certaines de ces politiques sont mises en oeuvre, c’est parce que la voix de la France compte.

De même – nous aurons l’occasion d’y revenir –, si des solutions à la crise ukrainienne qui menace les frontières orientales de l’Europe peuvent être recherchées, malgré toutes les difficultés, c’est grâce à une initiative commune du Président de la République et de la chancelière Merkel, qui se retrouvent d’ailleurs ce soir avec les présidents russe et ukrainien à Berlin.

On ne règle pas non plus les problèmes liés aux réfugiés en caricaturant ou en posant une seule question, car la situation est particulièrement difficile, nous le savons. Il n’en reste pas moins que ce sont les positions de la France défendues par Bernard Cazeneuve sur le PNR – Passenger Name Record – ou sur les gardes-frontières qui sont aujourd’hui mises en oeuvre. Est-ce suffisant ? Non, il faut évidemment aller plus loin. Parce que l’Europe, à mon sens, est une question de frontières, les protections aux frontières extérieures sont nécessaires.

Vous m’interrogez sur la Turquie. Oui, je crois que des clarifications sont nécessaires à ce propos mais, enfin, ne soyez pas caricatural ! C’est sous la présidence de Nicolas Sarkozy que onze chapitres de négociation ont été ouverts. Je rappelle également que les positions parfois ambiguës vis-à-vis de la Turquie ne datent pas d’hier ; le Président Jacques Chirac les incarnait, je crois, avec un certain talent…

Sur tous ces risques majeurs, nous devons avancer. Et, Jean-Yves Le Drian aura l’occasion d’y revenir, si des initiatives existent en matière de défense, c’est précisément que l’Allemagne et la France, sous l’impulsion du ministre de la défense, avancent dans ce domaine.

Nous y reviendrons mais il faut un débat sérieux et précis parce que l’Europe est en danger. Bien des choses passeront par le couple franco-allemand. En tout cas, il faut sortir des caricatures : sur ces questions, j’en suis convaincu, si, les uns et les autres, nous oublions les primaires et les débats politiques primaires, nous pourrons avancer intelligemment ensemble.

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