Intervention de Manuel Valls

Séance en hémicycle du 19 octobre 2016 à 15h00
Débat sur les opérations extérieures de la france

Manuel Valls, Premier ministre :

Sur tous les théâtres d’opérations, au Levant, dans la bande sahélo-saharienne, en Centrafrique, des militaires français sont morts pour le France ces trois dernières années ; d’autres ont été blessés ; certains sont encore sur leur lit de douleur car quand la France répond présent militairement, ce sont nos soldats qui en assument les risques.

Avec le Président de la République, avec Jean-Yves Le Drian, nous mesurons la gravité de ce que nous demandons aux jeunes Français qui s’engagent. Quand la France se bat pour les valeurs démocratiques et universelles, ce sont eux qui sont en première ligne.

En Jordanie, au Niger, au Tchad, au Mali, au Sénégal, j’ai pu, en compagnie du ministre de la défense, leur dire, comme il le fait régulièrement, combien la Nation comptait sur eux, combien elle était fière d’eux et des différentes opérations extérieures qu’ils mènent.

À trois reprises au cours des trois dernières années, votre assemblée a approuvé le déploiement des forces françaises. En avril 2013, par votre vote, vous avez confirmé la décision du chef de l’État de déployer la force Serval au Mali. Après les attaques terroristes de janvier 2015, vous avez également autorisé nos armées à poursuivre leur intervention en Irak contre l’État islamique – une intervention décidée en septembre 2014 par le Président de la République, à la demande du gouvernement irakien, je veux le rappeler. Enfin, en novembre dernier, au lendemain des attentats de Saint-Denis et de Paris, vous avez approuvé l’extension de nos opérations aériennes à la Syrie.

Avec, mesdames et messieurs les députés, à chaque fois le même objectif, à chaque fois la même détermination : combattre les groupes djihadistes qui depuis leurs sanctuaires nous ont déclaré la guerre, une guerre rampante, lâche, sournoise, qui frappe de manière aveugle, là-bas et sur notre sol. La France – elle n’est bien sûr pas la seule – est visée parce qu’elle est la France ! Parce qu’elle incarne aux yeux de monde cette part d’universel !

L’ennemi que nous devons affronter, nous ne le découvrons pas. C’est un ennemi redoutable. Il frappe depuis plusieurs décennies dans le monde arabo-musulman et en Afrique. Il s’est organisé au Levant sous la forme d’un proto-État, capable de mobiliser des ressources financières, de lever une armée de terroristes, d’étendre son emprise barbare.

Il recrute y compris jusqu’au coeur de notre société. Il ne connaît pas de frontières, et encore moins dans le cyberespace, devenu un vaste terrain d’embrigadement, de recrutement et de préparation des attaques.

Nous avons changé d’époque. Notre monde n’a plus le même visage. Depuis le 11 septembre 2001, depuis ce jour terrible que personne n’avait vu venir, la terreur djihadiste s’est diffusée partout, depuis l’Europe jusqu’en Asie. Elle est aujourd’hui, sans aucun doute, le plus grand péril pour nos démocraties.

L’inaction n’est pas une option. Et donc, la France agit. Contre les groupes djihadistes, elle marque des points, elle agit efficacement, et d’abord au Mali.

Au Mali, coude à coude avec l’armée malienne, à la demande des autorités maliennes, à la demande du président intérimaire Traoré, avec le soutien de l’Union africaine et des Nations unies, nous avons empêché le basculement dans le chaos de ce pays avec lequel nous entretenons des liens si privilégiés. La décision audacieuse et courageuse du Président de la République a évité la création d’un bastion djihadiste.

Nous savons que le chemin de la stabilité du pays est encore long. La sécurisation du Nord est lente à intervenir. Le processus de réconciliation nationale tarde à se concrétiser même si des progrès sont intervenus récemment – et nous connaissons l’engagement du président Ibrahim Boubacar Keïta. Nous savons cependant que les groupes terroristes continuent de déstabiliser la région du Sahel et portent leurs menaces au-delà. Tous ces groupes qui se financent grâce à des trafics divers et aux filières clandestines de migrants peuvent encore frapper violemment.

La France restera engagée tant que la menace djihadiste continuera de peser sur le destin de ce pays et de cette région car quel message enverrions-nous si nous envisagions un départ ou même une réduction de notre effort ? Nous n’avons pas le droit d’abandonner nos frères africains au moment où précisément ils ont le plus besoin de nous pour consolider des équilibres encore fragiles. Le Président de la République aura l’occasion à Bamako, en janvier prochain, lors du sommet Afrique-France, de redire notre solidarité à l’Afrique.

Mesdames et messieurs les députés, avec l’opération Barkhane – 4 000 hommes déployés au Sahel sur un territoire aussi vaste que le continent européen –, nous voulons empêcher les groupes terroristes de reconstituer un sanctuaire. Nous aidons les forces régionales, celles des pays du G5 Sahel, à remonter en puissance. Tous les jours, nos soldats patrouillent avec leurs camarades africains, au Mali et au Niger en particulier. Nous accompagnons également nos partenaires internationaux – je pense à la mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies, la MINUSMA, comme à celle de l’Union européenne, l’European Training Mission, l’EUTM Mali.

Au Cameroun, au Nigeria, au Tchad, les crimes de Boko Haram font planer un risque de déstabilisation qui appelle notre très grande vigilance.

En République Centrafricaine, l’engagement de la France a permis de mettre un terme à des violences qui menaçaient de dégénérer en une guerre civile confessionnelle, avec son cortège d’atrocités. Trois ans après le lancement de l’opération Sangaris dont nous savons qu’elle fut difficile et éprouvante pour nos soldats, et à quelques jours de sa clôture officielle, nous passons le témoin aux Nations unies et à l’Union européenne. Mais nous resterons engagés à leurs côtés pour oeuvrer dans la durée à la stabilité de la RCA.

N’oublions pas l’action de notre marine nationale dans le Golfe de Guinée pour lutter contre la piraterie maritime, cet autre fléau contre lequel la France s’engage.

Je veux le dire avec force ici : sans l’action de la France, une partie du continent africain aurait complètement basculé,…

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