Intervention de André Chassaigne

Séance en hémicycle du 19 octobre 2016 à 15h00
Débat sur les opérations extérieures de la france

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Quatorze mois à peine après la fin de la guerre en Libye, le Gouvernement français envoyait notre armée au Mali pour combattre les mêmes armées islamistes, dont l’intervention de la coalition avait permis l’émergence en Libye. Aujourd’hui, malheureusement, l’accord d’Alger pour la paix et la réconciliation au Mali du 20 juin 2015 n’a pas encore permis le retour de la paix dans le pays. Pire, l’expansion du terrorisme au centre du pays et la naissance de nouveaux groupes armés semblent rendre le processus de paix inextricable.

L’Histoire nous enseigne des leçons, qu’il convient de garder à l’esprit. Les guerres peuvent avoir des conséquences imprévisibles et trop souvent porter en elles les germes de nouveaux conflits. Si elles sont menées sans penser le jour d’après, sans envisager la construction de la paix, elles sont vouées à l’échec. Est-il besoin de se remémorer le bilan des interventions qui se sont multipliées depuis le 11 septembre 2001 : Afghanistan, Irak, Libye, Mali… ? Dans chacun de ces cas, dans chacun de ces pays, au-delà de la particularité de chacune de ces situations, le constat est cinglant : affaissement du rôle de l’État, négation de l’État de droit, exacerbation des antagonismes communautaires, règne des milices, extension internationale du djihad armé et populations exsangues.

Pour être efficace dans la lutte contre le terrorisme et ne pas répéter les erreurs du passé qui amplifient le chaos, les décisions militaires doivent procéder d’objectifs politiques clairement pensés et déterminés, en vue de relever le défi de la lutte contre le djihadisme.

Nous sommes les premiers à penser que face aux avancées des forces islamistes radicales, le silence et l’inaction ne peuvent être de mise. Face aux crimes et au sentiment d’impunité des djihadistes, la responsabilité de la communauté internationale est de protéger les civils quels qu’ils soient. Mais pas n’importe comment, pas sous commandement américain ni sous la tutelle de l’OTAN.

Ainsi, l’offensive menée à Mossoul depuis lundi ne pourra-t-elle prendre tout son sens que si elle est conçue comme une étape décisive dans les réponses apportées aux défis que représentent Daech et la construction d’un Irak uni. Or, hélas, il semblerait qu’entre les forces nombreuses – aux intérêts divergents voire contraires – qui mènent cette offensive, il n’y ait pas de plan politique préalable et nécessaire pour relever ces défis intimement liés. Dans ce cas, et malgré une victoire militaire, le terreau du djihadisme continuera de fleurir.

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