Intervention de Christian Eckert

Séance en hémicycle du 21 octobre 2016 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2017 — Après l'article 11

Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget et des comptes publics :

Ce sont des sujets graves et extrêmement importants, mais l’analyse doit être précise. On ne réglera pas la question des GAFA avec cet amendement. Ces sujets doivent être traités séparément. Deux millions d’euros par an, c’est une mini-piqûre de moustique pour les géants dont nous parlons aujourd’hui ! J’ai dit que c’était une « taxe Dailymotion » mais, madame Berger, vous avez raison de dire que ce ne sera pas l’opérateur le plus concerné en volume, car il représente entre 10 et 15 % du marché. Je voulais simplement dire que le recouvrement sera facile sur les opérateurs français, mais compliqué sur les opérateurs localisés à l’étranger. Nous n’aurons pas de difficulté à traiter le cas de Dailymotion, qui mérite d’être traité à égalité avec les autres. En revanche, je suis plus pessimiste sur la possibilité de recouvrer cette taxe auprès des opérateurs qui représentent 90 % du marché.

Un mot sur les GAFA et les plateformes numériques : la question de la TVA applicable aux biens vendus par Amazon a été réglée en France depuis 2015, parce que le Parlement a pris un certain nombre de dispositions qui s’appliquent d’ailleurs à l’ensemble des biens livrés à partir de l’étranger. La TVA est payée selon les règles applicables dans le pays de livraison et est perçue dans les pays où les marchandises sont livrées. En volume, cela représente environ 200 millions d’euros de recettes pour le budget de l’État, un montant cent fois supérieur aux 2 millions que rapporterait la mesure proposée aujourd’hui.

S’agissant de l’imposition des profits, plusieurs procédures conduites par le Parquet national financier sont en cours. Je peux les évoquer d’autant plus aisément que tout le monde en a parlé, la presse comme les sociétés concernées. Des perquisitions ont eu lieu chez Google. Ces affaires représentent plus de 500 fois les 2 millions d’euros dont nous parlons actuellement. Je ne vous dis pas que c’est gagné, car il y aura des contentieux et des recours, mais nous traitons le sujet. Je rappelle également – tout le monde n’était pas là quand nous l’avons fait – qu’en 2015 notre administration, souvent en lien avec le Parquet national financier, a prononcé, dans cinq très gros dossiers qui concernent les sociétés couramment citées, plus de 3,4 milliards d’euros de redressement. On ne peut pas dire qu’ils ont été payés, car ces décisions ont évidemment été contestées et feront l’objet de procédures. On voit bien qui est concerné !

La solution se trouve bien sûr au niveau européen et international, mais surtout dans le cadre du projet Base Erosion and Profit Shifting – BEPS. Pour l’heure, les redressements sont fondés sur la notion d’établissement stable, qui n’est pas toujours facile à établir. Le projet BEPS se fonde, quant à lui, sur la notion de présence numérique des établissements, ce qui est évidemment la solution. C’est le principal axe de travail de la procédure prévue par le projet BEPS, qui progresse mais n’est pas complètement finalisée – c’est le moins que l’on puisse dire.

Je nous invite à continuer, bien entendu ! Je ne sous-estime pas la chose, ni ne la méprise. Pour autant, j’ai le regret de vous dire, madame Berger, que s’il est facile de transférer les bénéfices, déplacer le chiffre d’affaires l’est tout autant !

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