Intervention de Bernard Accoyer

Séance en hémicycle du 25 octobre 2016 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Accoyer :

Mais arrêtons-nous un instant sur cette habitude de la gauche de multiplier des mécanismes de tiers payant intégral, qui sont inflationnistes et déresponsabilisants. Ainsi en est-il de la CMU et de l’aide médicale d’État qui, dans une prétendue générosité, exonèrent bien souvent du contrôle et entraînent des dérapages financiers ainsi que des fraudes trop fréquentes.

Certes, Mme la ministre juge plus confortable d’annoncer la gratuité généralisée que de gérer les situations au cas par cas : nous ne pouvons que partager ce jugement, mais condamner ce choix.

Créer des structures administratives multiples et coûteuses est une autre spécificité de la gauche. À l’article 42 du présent projet, après avoir créé et commencé à financer des structures pour la démocratie dite sanitaire, vous organisez son financement public et la formation de ses acteurs sur fonds publics. Au passage, cela permet de caser d’anciens collaborateurs de cabinet, nous en avions parlé ici même il y a deux ans : encore une étatisation… En la matière pourtant, le volontariat, le bénévolat, le mécénat, la générosité sont irremplaçables. Ce n’est pas la voie qu’a choisie le Gouvernement.

Si votre politique au fil de l’eau de l’hospitalisation est coûteuse et peu efficiente, elle pourra être, espérons-le, un jour corrigée. Probablement plus grave est votre politique purement tarifaire du médicament.

L’industrie pharmaceutique est, avec l’hospitalisation privée, la victime expiatoire de la ministre. Ce sont, en cinq ans, 7 milliards d’euros qui ont été prélevés sur cette filière – beaucoup plus avec l’effet noria.

Pourtant, l’industrie du médicament représente dans notre pays 100 000 emplois, pour un chiffre d’affaires de 53 milliards d’euros, dont 48 % à l’exportation, et un apport positif de 7,7 milliards à notre balance commerciale. D’ores et déjà, investissement, recherche, développement de nouvelles molécules et emploi régressent dans l’industrie pharmaceutique en France.

Mes chers collègues, s’il est vrai que l’industrie pharmaceutique est désormais dominée par des groupes gigantesques, il n’en est pas moins vrai que les succès de la recherche conduisent à des progrès exaltants, inimaginables il y a seulement quelques années.

Mais ces travaux de recherche sont d’une ampleur, d’une complexité et d’une durée considérables. Grâce aux thérapies ciblées, à l’immunothérapie, des malades atteints d’affections non contrôlables jusqu’alors – cancers, infections virales, maladies dégénératives, certaines maladies orphelines, pour ne citer que ces pathologies – ont vu et voient en quelques années leur pronostic fonctionnel ou vital transformé de façon spectaculaire.

Or, le Gouvernement, en raisonnant sur le court terme, ignore les économies majeures que ces innovations peuvent induire en matière d’hospitalisation, d’arrêts de travail, d’interventions lourdes, de transplantation, d’invalidité et de décès prématuré.

Ces médicaments innovants, de plus en plus développés, hélas, hors de France, sont à la fois une source d’espérance et la clef de profondes réformes structurelles, en particulier hospitalières.

Devant ces perspectives enthousiasmantes, vous n’avez su que couper aveuglément dans la dépense avec la régulation, les taux L et W, des mécanismes auxquels vous fixez encore cette année des objectifs punitifs qui auront à terme pour conséquences que l’innovation ne sera plus accessible en France comme elle a pu l’être, surtout quand vous vous en prenez comme vous le faites cette année aux autorisations temporaires d’utilisation – ATU –, aux post-ATU, aux médicaments de rétrocession hospitalière et à la liste en sus.

La carence du système français tient à son incapacité structurelle à opérer les réformes organisationnelles nécessaires pour transformer les gains d’efficience promis en économies. Alors que l’arrivée, il y a dix ans, des médicaments anti-TNF a permis à l’Allemagne, en transférant le traitement de la polyarthrite rhumatoïde de l’hôpital à la ville, de diminuer de 6 points l’évolution de son coût de prise en charge, la France, qui n’en a tiré aucune conséquence organisationnelle, n’a quasiment réalisé aucune économie.

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