Intervention de Élisabeth Guigou

Réunion du 5 octobre 2016 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Guigou, présidente :

Nous recevons ce matin, pour une audition ouverte à la presse, Mme Dorothée Schmid, qui dirige le programme « Turquie contemporaine » à l'Institut français des relations internationales (IFRI), et M. Hamit Bozarslan, directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS). Je vous remercie, madame, monsieur, d'avoir accepté notre invitation. Nous allons traiter trois thèmes principaux : la situation intérieure en Turquie, sa politique régionale et la question kurde.

S'agissant de la situation intérieure, nous avons suivi attentivement ce qui s'est passé au moment de la tentative de coup d'État, le 15 juillet dernier. Celle-ci a fait l'objet d'interprétations différentes quant à son origine et à son déroulement. Le gouvernement turc met en cause le mouvement de Fethullah Gülen, qui a longtemps été un allié très proche du Parti de la justice et du développement (AKP), mais qui est aujourd'hui accusé d'être une organisation terroriste. Que pouvez-vous nous dire sur la nature de ce mouvement, qui est très actif et dispose de nombreuses représentations à l'étranger ? Qu'en est-il de l'ampleur de la répression ? Des dizaines de milliers de personnes ont été arrêtées, limogées, condamnées ; même si certaines ont été remises en liberté, cela reste très impressionnant. Nous venons d'apprendre que le gouvernement turc a décidé de prolonger de trois mois l'état d'urgence instauré après le putsch avorté. Une certaine unité nationale s'est manifestée, incluant l'opposition mais non le parti pro-kurde. Où en sont aujourd'hui les principaux partis ?

Les autorités turques ont reproché aux capitales européennes de ne pas avoir suffisamment réagi au moment de la tentative de coup d'État – j'en ai eu des témoignages directs. D'autres estiment, au contraire, que nous avons été un peu trop indulgents à l'égard d'Ankara et qu'il faudrait être plus ferme. Quel est votre point de vue à ce sujet ? Quels messages convient-il d'adresser aux autorités turques ? En tout cas, nous constatons que le fossé s'est creusé entre l'Union européenne et la Turquie. La question de la libéralisation des visas, qui fait partie de l'accord négocié par Mme Merkel et endossé par les Européens, constitue évidemment un point très délicat, pour ne pas dire plus. Comment voyez-vous les choses en la matière ?

D'autre part, nous avons bien noté le rapprochement entre Ankara et Moscou, après la crise très grave déclenchée par la destruction d'un avion russe par la chasse turque au-dessus de la frontière turco-syrienne. Comment analysez-vous ce rapprochement ? Jusqu'où pourrait-il aller ? Quelles pourraient en être les conséquences sur le dossier syrien ?

La question kurde se pose dans des termes très différents en Turquie et dans les pays voisins.

En Turquie, comment analysez-vous l'enchaînement qui a conduit à la reprise des hostilités ? Quelles pourraient être les perspectives ? Selon vous, les négociations pourraient-elles reprendre à terme, notamment dans l'hypothèse d'un affaiblissement durable du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et d'une consolidation de la situation interne en Turquie ?

En Syrie, la situation du Parti de l'union démocratique (PYD) est beaucoup moins favorable depuis le déclenchement de l'intervention militaire directe de la Turquie, à la fin du mois d'août. Cette opération, intitulée « Bouclier de l'Euphrate », visait à sécuriser la frontière turco-syrienne et à lutter contre Daech, mais surtout, du point de vue turc, à empêcher la jonction des trois enclaves kurdes et la formation d'un territoire kurde continu le long de la frontière turque. Nous sommes très intéressés par tout ce que vous pourrez nous dire sur ce point. Nous voyons bien que les Américains essaient de maintenir un équilibre délicat entre leur coopération avec le PYD dans la lutte contre Daech et leur soutien à l'opération militaire turque. Comment voyez-vous la suite ?

Enfin, nous pourrons aussi évoquer la question du gouvernement régional du Kurdistan irakien, avec lequel Ankara n'entretient pas du tout les mêmes relations, et dont les rapports avec Bagdad sont difficiles. La situation politique interne reste complexe au Kurdistan irakien.

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