Intervention de Franck Reynier

Séance en hémicycle du 7 novembre 2016 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2017 — Recherche et enseignement supérieur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFranck Reynier :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, messieurs les rapporteurs spéciaux, madame la rapporteure pour avis, chers collègues, la mission « Recherche et enseignement supérieur » est au coeur de l’avenir de notre pays comme de notre jeunesse.

La recherche comme l’enseignement supérieur constituent en effet des facteurs de compétitivité et participent tous deux au rayonnement de la France à l’étranger. À ce titre, ils nécessitent une vision méthodique et prospective.

L’augmentation des crédits alloués à cette mission, soit près de 850 millions d’euros par rapport à 2016, constitue certes, à première vue, un signal positif.

Pour autant, depuis le premier budget de la mandature, celui de 2013, jusqu’à celui voté fin 2015, les crédits de paiement de la mission « Recherche et enseignement supérieur » ont subi une baisse de 0,3 % pour atteindre 25,887 milliards d’euros.

Les critiques récurrentes pointant la dégradation des moyens humains et financiers des laboratoires comme des universités en témoignent : le quinquennat de François Hollande n’aura nullement interrompu les progrès de la précarisation dans l’enseignement supérieur comme dans la recherche.

En mai dernier, une tribune rédigée par huit chercheurs, dont cinq prix Nobel, dénonçait un « suicide scientifique et industriel » de la part du Gouvernement : des annulations de crédits auraient sensiblement affecté les programmes de recherche scientifique.

Selon eux, le projet de décret portant sur les budgets du Centre national de la recherche scientifique, le CNRS, du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, le CEA, de l’Institut national de la recherche agronomique, l’INRA et de l’Institut national de recherche en informatique et en automatique, l’Inria, prévoyait 134 millions d’euros d’annulations de crédits.

Les annonces successives du Gouvernement ont considérablement décrédibilisé sa politique en matière de recherche : cela nous amène aujourd’hui à être particulièrement vigilants afin que la hausse prévue en 2017 ne se traduise pas in fine par une augmentation de la réserve de précaution.

Plus largement, nous déplorons l’absence de vision stratégique à long terme de ce Gouvernement, comme en témoigne le sort réservé au secteur de la recherche spatiale.

Ce secteur vit une triple révolution, marquée par une réduction des coûts des lanceurs et des satellites, par l’accélération du numérique – les acteurs de la Silicon Valley ayant identifié le spatial comme un pourvoyeur de données – et par une concurrence des pays émergents, qui voient le spatial tant comme un enjeu de souveraineté que comme un levier de développement économique.

Or, comme j’ai pu le constater à l’occasion de mon avis budgétaire portant sur les grands organismes de recherche, la hausse des ressources budgétaire du Centre national d’études spatiales, le CNES, est un leurre. Il doit en effet assumer en plus de ses missions, et comme l’ensemble des autres organismes, des mesures gouvernementales comme le relèvement du point d’indice et la mise en oeuvre de la gestion budgétaire et comptable publique.

Il ne faut plus perdre de temps pour relever le niveau des investissements annuels dans notre recherche : à terme en effet, seule cette recherche fondamentale et ses applications permettront d’accompagner les projets d’un État stratège.

À chaque rentrée universitaire, le manque de places prend une nouvelle ampleur. Si les présidents d’universités, comme les professeurs et les étudiants, alertent les pouvoirs publics sur ce problème, la situation ne semble guère évoluer.

En 2017, les moyens supplémentaires alloués à l’enseignement supérieur devraient seulement financer le gel des droits d’inscription et permettre de faire face à l’augmentation du nombre d’étudiants.

Cette année encore, ce sont 32 400 étudiants de plus qui font leur entrée dans l’enseignement supérieur. Depuis 2009, les universités ont accueilli 180 000 étudiants supplémentaires et cette tendance ne s’essoufflera pas puisque le Gouvernement a pour objectif d’amener 60 % d’une classe d’âge à un diplôme de l’enseignement supérieur.

Si le nombre d’universités en déficit est en baisse – onze sur 74 en 2015, contre quinze en 2013 –, certaines d’entre elles se trouvent au bord de la faillite et devront encore faire face d’une part à l’augmentation du point d’indice et d’autre part au parcours professionnel, carrière et rémunération, dit « PPCR », dont le coût est d’environ 35 millions d’euros.

Le modèle de financement de l’enseignement supérieur semble avoir atteint ses limites. Au-delà des discussions budgétaires, il convient de s’interroger sur notre modèle d’enseignement supérieur.

Les ajustements à la marge du processus Admission post-bac – APB – comme la sélection en master occultent un véritable débat qui doit avoir lieu sur les conditions d’entrée dans l’enseignement supérieur, dans un contexte dans lequel le taux d’échec en licence, comme le chômage des jeunes, demeurent trop élevés.

Face aux problèmes d’orientation en première année, face aux difficultés rencontrées par les diplômés pour s’insérer sur le marché du travail et face à la surpopulation des universités, nous appelons à une vraie stratégie de long terme qui passera notamment par une plus grande perméabilité entre les universités et le monde de l’entreprise.

En conclusion, et au regard de ces différents éléments, le groupe de l’Union des démocrates et indépendants votera contre les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion