Intervention de Gabriel Serville

Séance en hémicycle du 10 novembre 2016 à 15h10
Projet de loi de finances pour 2017 — Économie

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGabriel Serville :

Monsieur le secrétaire d’État, en ces temps de chasse aux déficits acharnée, les crédits alloués au ministère de l’économie sont, une fois de plus, parmi les plus touchés par les efforts de restriction budgétaire engagés par votre gouvernement.

Si les fonds alloués à la Guyane avaient jusqu’ici échappé aux coupes budgétaires, je ne peux que déplorer que ce projet de budget pour 2017 marque un coup d’arrêt à cette dynamique en affichant une baisse de 8 % en crédits de paiement par rapport à 2016 pour le territoire que j’ai l’honneur de représenter sur ces bancs.

La bonne nouvelle, s’il en est une, c’est que les crédits du programme 220 « Statistiques et études économiques » sont à peu près préservés. Mais il s’agit d’une bonne nouvelle qui n’en est en réalité une que très partiellement, et je m’en explique : voyez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous avons rendu ce matin à votre collègue de la rue Oudinot le rapport biennal de la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer, dont j’ai l’honneur d’être le rapporteur, et qui fait l’état des lieux des politiques publiques dans nos territoires, dans des domaines aussi variés que ceux de la culture, de la formation, de la prise en charge de la dépendance ou encore du logement et de la lutte contre l’habitat insalubre.

Or, si ces travaux se sont révélés d’une grande qualité et nous ont permis de formuler des propositions pertinentes qui, je l’espère, seront suivies d’effets, notre volonté d’exhaustivité et de rigueur d’analyse s’est rapidement heurtée au manque de données disponibles, notamment statistiques, ce qui n’a pas permis de dresser des bilans complets pour chacune des thématiques abordées. En effet, il n’a pas toujours été possible d’obtenir un état des lieux à jour sur l’ensemble des territoires d’outre-mer, faute des ressources nécessaires. Cela a été particulièrement vrai pour la Guyane, pour Mayotte et pour les collectivités du Pacifique. Il ne s’agit pas là d’un problème nouveau, et le projet de loi « Égalité réelle », adopté en première lecture par notre assemblée, aborde la question de la difficulté de disposer de données statistiques fiables et pertinentes pour les territoires d’outre-mer à son article 6, qui prévoit que le Gouvernement remettra au Parlement, « dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi, un rapport présentant la situation des populations d’outre-mer par rapport à celles de la France hexagonale ainsi que les moyens nécessaires pour leur garantir l’effectivité des mêmes droits dans le domaine des connaissances statistiques ». Vous conviendrez donc qu’il soit fort dommage qu’un effort particulier n’ait pas été consenti dans le cadre du programme 220 pour la Guyane, dont la dynamique démographique rend pourtant particulièrement nécessaire la disponibilité de données statistiques exhaustives et pertinentes.

J’en viens maintenant à la mauvaise nouvelle, c’est-à-dire au point le plus inquiétant : la chute de 27 % des crédits de paiement du programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme ». Permettez que je m’étonne de cet arbitrage très défavorable alors même que ce programme intervenait dans le cadre de la lutte contre la vie chère en outre-mer, objectif qui figure parmi les trente engagements du Président de la République pour les territoires ultramarins, par le biais du financement des actions de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

Les missions de la DGCCRF ont été accrues dans nos territoires depuis l’entrée en vigueur de la loi no 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer, loi qui a introduit le dispositif dit du « bouclier-prix ». L’objectif de celui-ci est de redonner rapidement du pouvoir d’achat aux ménages outre-mer par la mise en place d’accords annuels de modération des prix, mais son efficacité est remise en cause en Guyane par le taux d’indisponibilité élevé de certains produits constaté tant en grande surface qu’en moyenne surface. Les professionnels l’expliquent par des difficultés d’approvisionnement régulier. Cette situation nécessite, pour assurer la pérennité du dispositif et l’efficacité de cette mesure en faveur des ménages guyanais, une action beaucoup plus marquée de la DGCCRF, qui envisage d’accentuer ses contrôles : ils se feront désormais tous les trois à quatre mois et seront élargis à l’ensemble des communes. Mais ces contrôles sont actuellement déjà rarement suivis d’effets à cause du manque de moyens financiers et humains. On voit donc mal comment la baisse de près d’un tiers des crédits du programme 134 pourrait être susceptible d’améliorer cette situation qui nous est totalement défavorable.

Au regard de ces éléments et de ces appréciations, dans un élan solidaire avec les outre-mer, notre groupe se voit dans l’obligation d’émettre un vote défavorable sur cette mission.

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