Intervention de Patrick Bloche

Réunion du 8 novembre 2016 à 10h00
Commission élargie : finances - affaires culturelles - affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche, président :

Avec la mission « Médias, livre et industries culturelles », nous abordons la partie « communication » de la présente réunion, et qui concerne des secteurs auxquels la majorité s'est attachée, durant cette législature, à assurer plus d'indépendance, d'équité et d'efficacité. J'en profite pour rappeler le bilan législatif très important de ces dernières années. Nous avons voté six lois dont quatre d'initiative parlementaire : loi du 15 novembre 2013 relative à l'indépendance de l'audiovisuel public ; loi du 27 février 2014 harmonisant les taux de la TVA applicables à la presse imprimée et à la presse en ligne ; loi du 17 avril 2015 portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse ; loi du 14 octobre 2015 relative au deuxième dividende numérique et à la poursuite de la modernisation de la télévision numérique terrestre (TNT) ; loi relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine du 7 juillet 2016. Plus récemment, le 6 octobre dernier, l'Assemblée a définitivement adopté le projet de loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias ; nous attendons donc avec impatience la décision du Conseil constitutionnel, désormais imminente.

Cette dernière loi est d'une actualité brûlante – je pense à la grève des personnels d'i-Télé, pour le vingt-quatrième jour consécutif, soit la plus longue dans le secteur audiovisuel privé ; nous sommes nombreux ici à apporter notre soutien aux journalistes grévistes en les invitant à tenir, à résister. Les conséquences de cette grève, pour le pluralisme de l'information, sont évidentes : nous allons vivre cette nuit l'élection de la future présidente ou du futur président des États-Unis et nous allons suivre cette « nuit américaine » sans les commentaires de Laurence Haïm – je ressens, comme vous, j'imagine, qu'il nous manquera donc quelque chose… Laurence Haïm qui, d'ailleurs, pas plus tard que ce matin, déclarait : « J'aurais tellement aimé faire cette "nuit américaine" avec I-Télé ; c'est terrible d'être journaliste et de ne pas pouvoir travailler ; nous nous trouvons dans une détresse morale et psychologique. »

J'évoque cette actualité parce que la loi que nous avons votée définitivement le 6 octobre dernier, avec votre soutien actif, madame la ministre et, plus largement, avec le soutien du Président de la République et du Gouvernement, aura des conséquences directes pour les salariés et en particulier les journalistes d'i-Télé. Tout d'abord, ils vont pouvoir bénéficier du droit d'opposition dont seuls jouissaient les journalistes de l'audiovisuel public. Ensuite, chaque média devra adopter une charte déontologique. Or i-Télé n'en a pas actuellement. Une négociation devra donc être engagée avant le 1er juillet 2017 entre les représentants des journalistes et la direction d'i-Télé. Par ailleurs, i-Télé et le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) devront renégocier la convention liant la chaîne à l'autorité administrative indépendante, afin d'intégrer le droit d'opposition et les principes de liberté, d'indépendance et de pluralisme que nous avons renforcés. Enfin, un comité pour l'indépendance des médias sera mis en place au sein de la chaîne d'information en continu.

Plus largement, pour ce qui est des crédits inscrits au projet de loi de finances pour 2017, qui concernent l'audiovisuel public, les aides à la presse – écrites et en ligne – mais également le livre et les industries culturelles, je ne reviens pas sur les débats que nous avons eus en première partie du projet de loi de finances. Vous savez qu'a été malencontreusement voté un amendement réduisant l'augmentation de la contribution à l'audiovisuel public à un seul euro, somme correspondant à l'inflation. Cela a conduit le Gouvernement à compenser, par voie d'amendement, les 25,5 millions d'euros manquants par une mobilisation d'une plus grande part de la taxe sur les opérateurs de communications électroniques (TOCE).

Je tiens toutefois à signaler que, si le montant des financements est assuré pour l'année à venir, la nature et la dynamique des ressources sollicitées ne sont pas comparables et posent donc des questions pour les années à venir. Je tiens également à rappeler avec insistance que ce qu'on appelle communément la redevance est la première – je dis bien : la première – garantie de l'indépendance de l'audiovisuel public, indépendance que nous avons souhaité restaurer en 2013. Le sujet n'en est que plus sensible au moment même où l'État renouvelle ses engagements d'actionnaire dans le cadre de contrats d'objectifs et de moyens – avec l'équilibre des comptes à la clef – avec plusieurs sociétés de l'audiovisuel public : Radio France en 2015, France Télévisions, France Médias Monde et Arte France cette année.

Par ailleurs, je tiens à signaler que France Télévisions, qui nous occupe toujours beaucoup, a fait l'objet de la part de la Cour des comptes d'un rapport sur sa gestion pour les années 2011-2015, période pendant laquelle Rémy Pfimlin était à la tête du groupe. Celui-ci a pu, comme cela est prévu dans le cadre d'une procédure contradictoire, répondre aux arguments les plus critiques avancés dans le rapport. Au-delà de la présente réunion de la commission élargie, nous reparlerons bientôt de France Télévisions à l'occasion de l'audition de sa présidente, Mme Delphine Ernotte, conjointement avec la commission des finances, sur l'exécution du contrat d'objectifs et de moyens et sur l'actualité du groupe.

Pour appréhender avec suffisamment de précision les actions financées par ces crédits et les enjeux des politiques publiques ainsi mises en oeuvre, la commission des affaires culturelles et de l'éducation a nommé trois rapporteurs pour avis qui ont chacun, au-delà de l'examen des crédits, centré leur rapport sur une thématique particulière : Michel Pouzol, rapporteur pour avis sur les crédits de l'audiovisuel public pour 2017, a porté son attention sur la nouvelle offre d'information en continu du service public ; Virginie Duby-Muller, rapporteure pour avis sur la presse écrite, s'est quant à elle consacrée aux stratégies de soutien à la presse en ligne ; enfin Marie-George Buffet, rapporteure pour avis sur les crédits relatifs au livre et aux industries culturelles, s'est intéressée au renouvellement des politiques en faveur de la lecture publique.

Je tiens à les remercier chaleureusement tous les trois – nous avons pu les entendre, déjà, en commission des affaires culturelles et de l'éducation – pour leur investissement, pour le nombre et la qualité des auditions qu'ils ont conduites, ainsi que pour l'important travail qu'ils ont réalisé.

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