Intervention de Jean-Marie Beffara

Réunion du 8 novembre 2016 à 10h00
Commission élargie : finances - affaires culturelles - affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marie Beffara, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

Rapporteur spécial pour la cinquième fois, je me réjouis aujourd'hui du budget dédié à la Culture qui nous est proposé pour l'année 2017. La mission « Media, livre et industries culturelles »voit, en effet, ses crédits progresser de 4,1 % en autorisations d'engagement et de 1,8 % en crédits de paiement. Face à la multiplicité des sujets concernés par de ma mission, j'ai fait le choix de n'aborder devant vous que quelques points saillants qui me semblent essentiels.

Dans le domaine de la presse tout d'abord. Il s'agit d'un secteur en crise qui subit de plein fouet l'évolution des modes de consommation issue de la transition numérique et l'atonie du marché publicitaire. Face à cette situation, le soutien du Gouvernement a été constant. Je voudrais cependant m'arrêter sur la situation particulière de la presse spécialisée. Sans remettre en cause le rôle prépondérant de la presse d'information politique et générale (IPG), notamment en matière de contribution au pluralisme du débat public, il me semble important de reconnaître à la presse spécialisée son utilité sociale. La création réglementaire d'une sous-catégorie plus restreinte de « presse de la connaissance et du savoir », annoncée l'année dernière, et qui aurait pu permettre une application plus large des aides à la presse – notamment l'aide au transport postal, dont ce type de presse dépend à 95 % – a été abandonnée.

Madame la ministre, ce sera ma première question : pouvez-vous nous expliquer les raisons qui vous ont poussé à ne pas mener à terme cette réforme, alors même que les aides budgétaires et fiscales sont ciblées à 96 % sur les titres de presse IPG et que la presse spécialisée se trouve dans une situation économique critique – notamment du fait de tarifs postaux majorés ? Quelles sont donc les évolutions envisagées ?

Ma seconde question, en lien avec la presse, concerne les distributeurs de presse, dont la situation financière est également extrêmement fragile. Le Gouvernement a annoncé sa volonté d'exonérer les distributeurs de presse du paiement de la contribution économique territoriale. Cette disposition ne figurant pas actuellement dans le projet de loi de finances 2017, pouvez-vous nous indiquer comment elle sera introduite ?

Le deuxième volet que je souhaite aborder concerne l'industrie du jeu vidéo, rarement évoquée dans le cadre de la mission « Médias ». À l'occasion de la préparation de mon rapport spécial, j'ai visité l'entreprise Ubisoft, véritable fleuron national et n° 3 mondial du jeu vidéo. J'ai pu constater à quel point l'industrie du jeu vidéo nourrit des interactions toujours plus nombreuses avec la création, le cinéma, l'audiovisuel et bien entendu les techniques issues du numérique. C'est un secteur par essence mondialisé, et de ce fait hautement concurrentiel. C'est également un secteur pourvoyeur d'emplois, particulièrement chez les jeunes talents, la moyenne d'âge des salariés du secteur se situant autour de trente ans.

Afin de préserver l'excellence de l'industrie française du jeu vidéo, face aux régimes d'aides beaucoup plus favorables pratiqués dans d'autres pays, notamment les États-Unis, le Canada ou le Royaume-Uni, il m'apparait aujourd'hui indispensable de renforcer l'attractivité du crédit d'impôts « jeux vidéo ». C'est la raison pour laquelle, avec mes collègues Bruno Le Roux et Razzy Hammadi, j'ai déposé deux amendements au titre des articles non rattachés. À l'heure de la révolution technologique engendrée par l'apparition de la réalité virtuelle ou augmentée, cette amélioration du crédit d'impôts « jeux vidéo » ne peut pas être différée.

Ma question est donc la suivante : madame la ministre, le Gouvernement est-il prêt à mieux soutenir cette industrie d'avenir, à travers le renforcement de ce crédit d'impôts pour un coût somme toute modique et une efficacité assurée ?

Je terminerai mon propos en abordant le sujet de l'audiovisuel public, Le budget 2017 permettra la réalisation de projets novateurs : la chaîne en espagnol de France Médias Monde, le renouvellement de la programmation pour Arte, la mise en place d'une plateforme subscription video on demand (SVoD), mais également la poursuite de la nouvelle chaîne d'information en continu « Franceinfo: ».

Ce nouveau souffle de l'audiovisuel public est possible grâce à situation financière désormais assainie pour l'ensemble des opérateurs. En effet, au cours des quatre dernières années, alors que l'ensemble des acteurs étaient en 2012 profondément déstabilisé par les conséquences de la suppression de la publicité après 20 heures sur France TV, le Gouvernement et sa majorité se sont attachés à consolider un nouveau modèle économique pour l'audiovisuel public.

Faut-il rappeler qu'avant 2012, la perte de recettes due à la suppression de la publicité était compensée par une dotation du budget de l'État de plus de 400 millions d'euros – soit une dépense nouvelle, financée par la dette. Autrement dit, si certains français achètent parfois leur téléviseur à crédit, tous entre 2009 et 2012 ont regardé des programmes financés à crédit.

Depuis quatre ans, nous nous sommes attachés à rétablir un modèle économique compatible avec le redressement des finances publiques et la nécessaire indépendance, éditoriale et financière, du service public. Cela a été rendu possible tout d'abord par une hausse raisonnée de la CAP, mais le débat budgétaire de cette année montre que la limite de l'utilisation de ce levier semble atteinte.

Ensuite nous avons engagé la suppression de la dotation budgétaire remplacée par une affection d'une part de la taxe sur les opérateurs de communication électronique (TOCE) à France TV. Le PLF 2017 consolide cette décision en transformant la TOCE en une taxe affectée à France TV, garantissant ainsi la pérennité de la ressource. Nous avons aussi renforcé la capacité de l'audiovisuel public à générer des ressources propres hors publicité, notamment par une meilleure répartition entre producteurs et diffuseurs des produits générés par les productions de programmes.

Enfin, il reste une étape indispensable à accomplir pour sécuriser le financement de l'audiovisuel public, et ce sera ma dernière question, madame la ministre. L'évolution des usages et des contenus tendent à diversifier les modes de réception des émissions de télévision. N'y a-t-il pas, aujourd'hui, urgence à mener une réflexion approfondie sur la réforme de la CAP, tant sur son assiette désormais obsolète, que sur la fixation de son montant, comme je l'ai préconisé à maintes reprises préconisé ?

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