Les élus effectivement, je vous l'accorde…
Pour remédier à cette situation, nous avons mis en oeuvre les préconisations du rapport de Denis Piveteau dans une démarche intitulée « une réponse accompagnée pour tous ». Ainsi, un article de la loi santé, appliqué maintenant dans 24 départements expérimentateurs, avant d'être généralisé le 1er janvier 2018, prévoit désormais qu'une personne dont la solution n'est pas adaptée à l'orientation fournie par la MDPH peut retourner à la MDPH et réclamer un plan d'accompagnement global. Ainsi, la MDPH peut réunir autour de la table l'ensemble des acteurs du handicap – gestionnaires d'établissement, Éducation nationale, services de l'État, ARS, etc. – pour réfléchir à une solution adaptée, quitte à prévoir un financement complémentaire fléché. Parce qu'on a beau ouvrir 4 000 nouvelles places, enfants et adultes confondus, chaque année dans le secteur médico-social – et ce quels que soient les gouvernements en place –, le nombre de personnes qui partent en Belgique continue d'augmenter : il est de plus de 6 000 actuellement. Ce n'est d'ailleurs pas le nombre d'enfants qui augmente, c'est le nombre d'adultes, dont une proportion significative est adressée par les départements sans même que l'assurance maladie en soit informée. En effet, des adultes sont orientés en maison d'accueil spécialisée ou en foyer d'accueil médicalisé, avec un financement assurance maladie ou un cofinancement ; mais beaucoup sont dans des établissements entièrement financés par les conseils départementaux. Les choses sont ainsi bien plus complexes qu'un simple « robinet » de l'assurance maladie à fermer. Le nombre d'enfants en revanche n'augmente plus, puisque Marisol Touraine et moi-même étions déterminées à stopper ce flux de départs contraints vers la Belgique.
Pour permettre aux MDPH d'accompagner correctement les familles, il faut simplifier leur travail administratif. Actuellement, en effet, le dossier de la personne handicapée est rempli à la main, y compris par le médecin, avant d'être apporté avec les pièces jointes à un agent administratif de la MDPH qui entre alors dans l'ordinateur les informations contenues dans ce dossier papier. Or la plupart des MDPH ne disposent pas d'un système informatique permettant les échanges de données entre administrations, y compris avec la commission départementale qui décide de l'orientation.
Certes, étant donné leur jeunesse – dix ans –, les MDPH fonctionnent bien : la France est un des rares pays à avoir mis en place un guichet unique pour les personnes handicapées. Mais lors de leur mise en place, les MDPH, constituées en GIP, n'ont pas souhaité se doter d'un système d'information commun, si bien qu'elles utilisent aujourd'hui des logiciels différents, parfois même des systèmes maison. Par conséquent, il n'est pas possible aujourd'hui de transmettre les informations d'une MDPH à l'autre, ni de les faire remonter à la CNSA, ni d'assurer un suivi efficace des orientations des personnes.
Nous sommes donc en train de réformer ce fonctionnement, en lien avec la CNSA. D'où les moyens supplémentaires annoncés par le Président de la République lors de la conférence nationale du handicap pour les systèmes d'information des MDPH. Une fois le travail administratif des MDHP simplifié, les agents disposeront de plus de temps pour s'occuper des familles et des enfants.
Ajoutons qu'un certain nombre de mesures de simplification ont été mises en place ces dernières années : l'allongement de la durée de validité du certificat médical, mais aussi l'allongement de la durée d'attribution de l'AAH – de deux à cinq ans pour l'AAH2, de dix à vingt ans pour l'AAH1. En outre, la carte mobilité inclusion remplacera les cartes papier de priorité, d'invalidité et de stationnement. Cette nouvelle carte unique, au format carte bleue, sera infalsifiable, car fabriquée par l'Imprimerie nationale, alors que les cartes papier actuelles étaient imprimées dans les MDPH et poinçonnées à la main. En cas de perte de leur carte mobilité inclusion, les personnes pourront en obtenir une autre rapidement auprès de l'Imprimerie nationale, alors que les MDPH sont, vous le savez tous, totalement débordées par ces tâches. Cette mesure sera opérationnelle, grâce à la loi numérique, au 1er janvier 2017 : les MDPH auront six mois pour se mettre en ordre de marche, celles qui le souhaitent pourront mettre en place la carte dès le 1er janvier, les autres le feront au fur et à mesure, en étant accompagnées par la CNSA. Ces avancées ont été obtenues avec l'accord de l'Association des directeurs des MDPH, mais aussi de l'ADF.
Un mot sur le plan autisme, évoqué par plusieurs d'entre vous.
L'autisme ne fait pas exception au sein du handicap en France : des enfants mais aussi des adultes peuvent être sans solution, et ces situations sont extrêmement douloureuses pour les familles. Le troisième plan autisme, piloté au démarrage par Marie-Arlette Carlotti, mettait l'accent sur le dépistage précoce et les interventions précoces. Il est en cours d'évaluation. Le Président de la République a annoncé dès le mois de mai un quatrième plan, que nous sommes en train de préparer avec les associations. Dans ce quatrième plan, seront pris en compte les adultes autistes pour lesquels jusqu'à présent aucune solution n'était apportée, non seulement en termes d'accès à l'emploi – beaucoup de gens pourraient travailler –, mais aussi en termes d'accompagnement adapté, à la fois dans les établissements et par des services d'accompagnement qui leur permettent de vivre en société.
Le troisième plan autisme avait mis en place des moyens considérables, à hauteur de 205 millions d'euros, avec notamment l'ouverture d'unités d'enseignement en école maternelle dans tous les départements et l'ouverture d'établissements pour enfants ou adultes. Comme le député Habib, je pense que l'ouverture d'établissements prend trop de temps. C'est pourquoi, depuis deux ans et demi, je ne cesse de dire aux agences régionales de santé qu'il faut procéder par extension de places, car cette méthode permet d'aller vite, sans passer par de longues procédures.
En tout état de cause, je partage l'avis de M. le député Habib : l'ouverture de nouvelles structures prend beaucoup trop de temps. Depuis deux ans et demi, je ne cesse de dire aux agences régionales de santé qu'il faut procéder par extension de places : cela va vite et cela évite toute une série de procédures longues. Mais il arrive de devoir ouvrir de nouvelles structures ; or, au-delà de l'aspect législatif, il y a souvent des recours une fois les choix opérés à la suite des appels à projet. Ainsi, un projet s'étale sur trois, quatre, voire cinq ans, d'où un décalage entre la volonté politique et la réalité telle que la vivent les gens au quotidien. Ce problème, que nous rapportent régulièrement nos concitoyens, n'a rien à voir avec la couleur politique : c'est une réalité et nous devons y remédier.
Enfin, l'un de vous m'a parlé de l'allocation adulte handicapée et de l'existence d'un plafond de ressources. C'est en effet le cas, dans la mesure où l'AAH est un minimum social et non une allocation destinée à compenser le handicap. Pour cela, il y a la prestation de compensation du handicap. Vous le savez tous ici, mais je l'indique dans un but pédagogique, à l'intention de ceux qui nous écoutent.
Je rappelle tout de même que le système de l'AAH est très favorable : le plafond de ressources pris en compte notamment est plus élevé que pour les autres minima sociaux, notamment pour les couples. Par exemple, un couple peut continuer à recevoir l'AAH avec des revenus très supérieurs à ce qui est autorisé pour les autres minima sociaux – j'entends par là des revenus d'environ 2 500 euros par mois.
En outre, je me suis battue aux côtés de Mme Marisol Touraine pour que la prime d'activité soit cumulable avec l'AAH. En toute logique, l'AAH étant une aide différentielle, le montant de la prime d'activité aurait dû être réduit d'autant. Or nous avons souhaité que les personnes en situation de handicap qui travaillent bénéficient intégralement de la prime d'activité. Cela nous a conduits à compliquer encore le dispositif : comme cela arrive souvent, pour prendre en compte les problèmes de nos citoyens, on est amené à mettre en oeuvre des règles de calcul très complexes.
Je crois avoir fait le tour des questions qui m'ont été posées. Mais je me suis engagée auprès de Mme Laurence Rossignol à vous faire part, en son nom, de certaines de ses réponses concernant l'égalité femmes-hommes. Les voici.
Madame la présidente de la Délégation aux droits des femmes, madame Coutelle, nous partageons votre souci de donner davantage de visibilité aux budgets qui, dans les politiques publiques, sont consacrés à l'égalité entre les femmes et les hommes. C'est pour cette raison que Laurence Rossignol a ouvert voici quelques semaines un nouveau cycle de conférences sur l'égalité avec chaque ministère. Ces conférences permettent de faire le bilan des actions engagées et d'ouvrir des perspectives pour avancer encore vers l'égalité entre les femmes et les hommes ; elles sont aussi l'occasion d'insister auprès de chaque ministre sur la nécessité d'établir des budgets mettant en lumière les actions dédiées à l'égalité entre les femmes et les hommes.
Mme Laurence Rossignol tient à préciser à Mme Dominique Orliac que l'article 7 de la loi prostitution prévoyait la création d'un fonds abondé notamment par les recettes issues de la confiscation et de la saisie des biens liés au proxénétisme. Ce fonds s'est révélé techniquement inopérant. Le projet de loi de finances abroge donc cet article pour le remplacer par un dispositif valide qui assurera le même rendement, et qui sera toujours assis sur la confiscation des biens liés à des affaires de proxénétisme.
Pour ce qui est de l'accompagnement et de la prévention sanitaire, il convient de signaler que le parcours de sortie assurera concrètement : le versement d'une aide spécifique, l'aide financière à l'insertion sociale ; une autorisation provisoire de séjour de six mois ; et le bénéfice des dispositifs de droit commun – hébergement, logement, soins, actions d'insertion sociale. Ces dispositifs d'accompagnement vers la sortie du système prostitutionnel contribueront ainsi à la lutte contre la traite des êtres humains.
S'agissant de la place des Maisons des adolescents et des associations dans le cadre de la lutte contre la radicalisation, question posée par M. Cavard, ma collègue indique que la lutte contre la radicalisation s'appuie effectivement, dans les territoires, sur le tissu associatif spécialisé dans la prise en charge des jeunes en difficulté. Les préfectures s'appuient de plus en plus sur les MDA, la prévention spécialisée et les PAEJ pour accompagner les jeunes et leurs familles. Il faut souligner l'engagement de ces structures dans ce combat.
Ainsi que vous le savez, le Gouvernement a adopté le 9 mai dernier un ambitieux plan de lutte contre la radicalisation et le terrorisme. Ce plan prévoit un abondement de 40 millions sur deux ans pour financer ces actions. Et une partie de ses fonds seront consacrés au financement d'actions portées par les associations.
Par ailleurs, des conventions sur ce sujet ont été conclues ou vont être conclues avec les ministères concernés pour améliorer la visibilité de ces structures au niveau local. La convention avec les PAEJ et la prévention spécialisée notamment est signée ; celle avec les MDA le sera avant la fin de l'année.
Enfin, la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfant et de la famille a réaffirmé la place de la prévention spécialisée. Le budget qui lui est alloué représente plus de 500 millions d'euros, essentiellement supportés par les conseils départementaux. Dans certains départements, les montants sont en baisse. Or nous sommes tous d'accord pour dire que la prévention spécialisée ne doit pas devenir une variable d'ajustement. Mme Laurence Rossignol a signé avec M. Patrick Kanner une convention nationale de partenariat sur la prévention spécialisée. Cette convention, très large, rassemble à la fois l'AMF, l'ADF et France Urbaine ; les métropoles peuvent se voir déléguer la prévention spécialisée et les têtes de réseau dans ce domaine. Elle permettra de renforcer les financements de la prévention spécialisée. Chacun saura ce qu'il a à faire dans son domaine.