Je voudrais essayer de rétablir la vérité sur l’AME. N’oublions pas que ce dispositif a été créé pour disposer d’une estimation de l’aide apportée par la France à des immigrés clandestins. L’intention était louable, mais, comme le montrent les six rapports que j’ai réalisés sur la question, le dérapage est constant. L’AME est un ovni sur le plan comptable : son montant ne correspond absolument pas à la réalité des coûts. Le dispositif est largement sous-estimé, ce qui est fréquent mais qui conduit aussi, et c’est beaucoup plus grave, s’agissant d’un sujet aussi politique, à ce que la vérité n’apparaisse pas. Il a fallu attendre que la Cour des comptes juge les comptes de l’AME insincères – ce qui, pour un comptable, est pire que tout.
En réalité, l’aide aux immigrés clandestins dépasse largement le budget de l’AME, comme en témoignent les quelques exemples que j’ai donnés dans le rapport, malgré certaines difficultés d’obtention des éléments chiffrés, le ministère n’étant pas très prompt à éclairer ce sujet. Je pense notamment à la pratique habituelle de la loi de finances rectificative, ou aux 250 millions pris sur le budget de la Sécurité sociale et alloués aux hôpitaux – certains sont beaucoup plus concernés que d’autres. Je pense également au budget de Mayotte : on m’a répliqué que ce département n’était pas encore éligible à l’AME, mais ce budget est quand même consacré aux immigrés clandestins ! D’après les chiffres que j’ai obtenus, j’estime que 100 millions d’euros sont consacrés aux immigrés clandestins. Et les chiffres sur la Guyane sont contredits en permanence par la chambre régionale des comptes… En réalité, le coût global de l’AME a largement dépassé le milliard d’euros.
Au reste, il existe un nouveau sujet, qui est formidable : les demandeurs d’asile. Tant qu’ils n’ont pas été déboutés, les demandeurs d’asile sont en situation régulière. Ils relèvent donc du budget de la CMU. Le jour où ils sont déboutés, que deviennent-ils ? Si vous avez la réponse, donnez-la moi, parce que je n’arrive toujours pas à le savoir ! S’ils restent sur le territoire, ils devraient, conformément au droit en vigueur, être éligibles à l’AME. Ils n’ont en tout cas aucune possibilité de rester à la CMU, puisqu’ils ne sont plus en situation régulière. Par conséquent, nous faisons face de toute évidence à un nouveau problème : celui des immigrés clandestins venant de la procédure du droit d’asile dans la CMU.
Les chiffres sont donc totalement sous-évalués, et l’AME est morte : quel que soit le prochain gouvernement, l’AME n’est plus gérable. C’est une fiction, et c’est une catastrophe, pour la politique comme pour la comptabilité.
La commission n’a pas examiné cet amendement. À titre personnel, j’émets un avis favorable.