Madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, « le XXIe siècle sera poétique ou ne sera pas », tels furent les mots du poète et philosophe Michel Deguy lors du colloque coorganisé le 7 novembre dernier par le ministère de la culture et le théâtre national de la Colline.
En matière d’art et de culture tant a déjà été inventé, tant s’est nourri au fil des siècles et tant reste encore à créer. Oui, la perspective d’un siècle poétique me réjouit. Car la poésie renaît inlassablement et nous élève. Si elle ne transfigure pas toujours, parfois dénonce même, elle porte en elle les aspirations des femmes et des hommes et révèle toute chose à la lumière des sensations et de l’émotion. En ces temps de déchirement, de drames, d’horreurs, elle peut conduire nos pas.
Samedi dernier, c’est par la musique et par la poésie que la soirée au Bataclan a créé ce temps suspendu de mémoire dans leur puissance rassembleuse.
La culture est avant tout un courant qui fédère, qui accompagne le citoyen vers une conscience collective. Sans compter – car il faut aussi savoir compter lorsqu’il s’agit de parler budget – que la culture est un vivier en termes d’emplois et qu’elle génère une économie florissante.
Aussi je me réjouis que les crédits de la mission « Culture » connaissent une hausse de ses crédits de plus de 5,5 %. Oui, mes chers collègues de l’opposition, je me réjouis !
Le programme 175 « Patrimoines » est en hausse de près de 33 millions d’euros. Son objectif : rendre accessibles au plus grand nombre nos patrimoines si divers. Une émancipation qui progresse à l’instar du budget. Ainsi, les crédits octroyés aux monuments historiques et aux musées ont été abondés de 7 %, ce qui permettra notamment à nos sites muséaux d’ouvrir sept jours sur sept.
Par ailleurs, le ministère de la culture a lancé la mission « Musées du XXIe siècle », destinée à ouvrir plusieurs réflexions parmi lesquelles : « le musée éthique et citoyen », « le musée comme écosystème professionnel créatif », ou encore « le musée inclusif et collaboratif ». Ce dernier thème est de toute première importance, en ce qu’il vise à favoriser une interaction entre les artistes, les musées et les personnes en situation de handicap. Un rapport sera remis en décembre prochain, rapport que nous attendons avec le plus vif intérêt.
Concernant la création, les crédits du programme 131 de la mission « Culture » sont en augmentation de près de 30 millions d’euros. J’applaudis ici l’entrée en vigueur, que vous avez annoncée le 9 septembre dernier, madame la ministre, du nouveau crédit d’impôt pour les entreprises du spectacle vivant musical ou de variété qui soutiennent les artistes émergents. Quelque 14 millions d’euros y seront consacrés d’ici à 2019. L’émergence doit avoir une place, sa place, pour passer le relais aux nouveaux émergents. L’État réaffirme ici sa volonté de soutenir le renouvellement et la vitalité de la carrière des artistes et leur offre une meilleure visibilité.
« La culture, c’est ce qui reste quand on a tout oublié », écrivait Émile Henriot. « Mais au contraire, ce qui reste à connaître quand on ne vous a rien enseigné », a complété plus tard Jean Vilar. En effet la mission « Culture » serait incomplète sans son programme consacré à sa démocratisation et à la transmission des savoirs. Déjà, le programme 224 atteignait, au titre du projet de loi de finances pour 2016, 1,13 milliard d’euros. Il constitue, pour 2017, le volet le plus important de la mission, avec quelque 95,5 millions d’euros supplémentaires.
Promouvoir la diversité culturelle et assurer sa transmission par une meilleure accessibilité à tous nécessitent la mise en oeuvre d’actions concrètes.
D’une part, il s’agit d’améliorer l’attractivité de l’enseignement supérieur dirigé vers les filières culturelles. Sur ce point, le taux d’insertion professionnelle des diplômés de l’enseignement supérieur artistique et culturel est un atout indéniable : en 2015, il oscillait entre 75,08 et 91,75 % pour les diplômés de l’architecture et du patrimoine, des arts plastiques, du spectacle vivant et du cinéma, et des établissements de recherche et d’enseignement supérieur artistique et culturel.
D’autre part, c’est par une éducation artistique renforcée au sein des établissements scolaires que l’on se place déjà dans une dynamique d’accès pour tous aux arts et à la culture. Le dispositif « Création en cours » est à ce titre remarquable. Il vise en effet à accentuer la présence artistique en milieu scolaire et à permettre aux enfants du cycle 3 de partager une expérience de création de longue durée avec un artiste. Quelque 100 jeunes artistes issus de toutes les disciplines devraient ainsi travailler en résidence dans les écoles et collèges moins privilégiés qui se trouvent en quartier prioritaire, sur certains territoires ruraux éloignés des offres culturelles, dans des territoires périurbains et, évidemment, dans les territoires ultramarins.
Par ailleurs, le Gouvernement a renouvelé les « Journées du 1 % artistique, de l’école à l’enseignement supérieur ». Il s’agit ici de soutenir la création en consacrant 1 % du montant des travaux des constructions publiques à la commande d’oeuvres d’artistes. De fait, depuis 1951, plus de 12 600 oeuvres ont été installées sur l’ensemble du territoire, en particulier dans les établissements d’enseignement scolaire ou supérieur. Les actions éducatives et culturelles à destination du grand public dans le cadre de ces journées permettent à celui-ci de se réapproprier un patrimoine commun, et aux élèves et étudiants d’être sensibilisés à la création contemporaine. Car il faut aussi apprécier ce qui se crée, maintenant.
Madame la ministre, le Gouvernement, vous-même, avez pris des engagements à la hauteur de l’attention que tout État démocratique doit à la culture. Le groupe RRDP votera avec conviction le budget de cette mission.