Intervention de Sandrine Mazetier

Séance en hémicycle du 18 novembre 2016 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2017 — Après l'article 51

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandrine Mazetier :

Le fait de rémunérer les aviseurs fiscaux constitue un revirement doctrinal important, qui peut d’ailleurs se discuter. Jusqu’à présent, la France n’avait pas fait ce choix, ce qui n’empêche pas le Gouvernement d’avoir de très bons résultats, qu’il faut saluer, en matière de lutte contre la fraude fiscale et la délinquance économique et financière. L’amendement no 781 vise à permettre à l’administration fiscale d’acheter des fichiers vendus, souvent volés, à des gens qui les proposent au plus offrant. Pourquoi pas ? Cela traduit notre volonté d’aller plus vite et plus loin.

Il s’agit d’un revirement doctrinal car, dans le cadre du projet de loi Sapin 2, après un long combat mené en particulier par Yann Galut, nous venons juste de protéger les lanceurs d’alerte, dont nous avons précisé qu’ils devaient agir de manière désintéressée. Nous avons alors été à deux doigts d’exclure de cette protection les agents du fisc ! Heureusement, nous avons quand même prévu de les protéger, alors qu’ils ne l’étaient pas jusqu’à présent. Mais cela se discute…

Ce que je crains, c’est que cela ne compromette des procédures civiles et pénales importantes qui pourraient rapporter beaucoup d’argent à nos finances publiques.

Il me semble tout de même qu’une telle disposition, en dépit des sous-amendements du Gouvernement, viole le principe de loyauté que doit respecter l’administration, risque d’être considérée ultérieurement par des tribunaux comme une rupture d’égalité des armes et pose le problème de la légalité et de la recevabilité de la preuve. Je comprends que Mme Pires Beaune souhaite une expérimentation, mais imaginez qu’on expérimente pendant deux ans et qu’on soit privé, au final, de redressements fiscaux énormes ! Je vous invite à lire les avis du Conseil constitutionnel sur la loi de 2013, la décision par laquelle il censure certaines dispositions et la réserve qu’il a émise sur les articles 37 et 39 de cette loi.

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