Intervention de Laurent Fabius

Réunion du 17 juillet 2012 à 16h30
Commission des affaires étrangères

Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères :

Encore quelques mots de réponse aux questions qui viennent d'être posées.

Monsieur Dupont-Aignan, il va de soi que notre outil de défense ne doit pas être démantelé, le Sahel en est un exemple. C'est cependant aux Africains qu'il appartient de traiter cette question, même si la France peut jouer un rôle d'appui.

Votre vision peu optimiste de l'état de l'Union européenne ne nous a pas surpris. Je ne crois pas être moi-même euro-béat, mais la réunion des 28 et 29 juin a été positive, à la différence de certaines réunions précédentes. Elle doit maintenant se traduire dans les faits, et les ministres compétents y travaillent.

On ne peut qualifier le pacte de croissance de « pacte de récession », sauf à avoir de la réalité une vision assez paradoxale. Je vous donne acte cependant que ces mesures doivent être appliquées, ce qui n'est pas si facile.

Monsieur Lellouche, me voilà devant vous comme Saint Sébastien percé de flèches. Si je vous ai paru trop flou, mettez cela sur le compte de mon manque d'éloquence, d'expérience et de capacité de synthèse. Vos conseils seront précieux en tout cas.

Il me semblait que, depuis deux mois, le Président de la République et son gouvernement ne démarraient pas si mal dans leurs rapports avec l'Union européenne, lorsqu'ils ont mis en avant le thème de la croissance. Il ne me semble pas que la Conférence des amis du peuple syrien, qui a réuni 107 pays à Paris, ait été perçue par le monde entier comme un échec cinglant. Nos rapports avec l'Italie étaient déjà bons, encore fallait-il les matérialiser. Dans nos rapports avec la Birmanie je n'ai pas le sentiment que la réception faite en France à Mme Aung San Suu Kyi soit à mettre au débit de la diplomatie française. Hier, en Algérie M. Bouteflika m'a fait un accueil particulièrement chaleureux – voyez la presse algérienne. Quant au voyage que j'ai effectué en Chine – qui contrastait, il est vrai, avec celui que j'avais fait avant les élections –, le fait sans précédent d'être reçu à la fois par le Premier ministre actuel et par celui qui lui succédera probablement après le xviiie Congrès ne constitue pas une marque d'infamie indélébile. Nous pouvons peut-être mieux faire, mais le démarrage aurait pu être plus catastrophique.

Pour ce qui est de l'Égypte, nous faisons tous la même analyse : deux pouvoirs se font face et tentent de se concilier tout en luttant l'un contre l'autre, sous le regard fatigué de la population. Vous aurez vu que les résultats de l'élection présidentielle diffèrent de ceux des élections législatives – 51 % contre 49 % dans un cas, 80 % contre 20 % dans l'autre.

L'un des juges de paix sera la situation de l'économie, aujourd'hui catastrophique – elle est maintenue par les États-Unis et, dans une moindre mesure, par l'Union européenne. Les recettes touristiques ont plongé, les recettes gazières et pétrolières sont modestes. L'inquiétude porte à la fois sur la capacité de conciliation entre les différents pouvoirs, sur la lassitude de l'opinion et sur la situation économique. Nous avons fait savoir que nous serions très attentifs au respect des droits, notamment de ceux des minorités.

Monsieur Guillet, les relations entre l'Iran et la Syrie mériteraient un long développement. Selon les informations dont nous disposons, les sanctions commencent à avoir un effet notable. Le secteur pétrolier est particulièrement affecté.

Certains pays, comme la Chine, n'appliquent pas les sanctions, qui représentent d'ailleurs un sacrifice pour les pays qui les acceptent, comme le Japon. La Grande-Bretagne, après avoir argué des difficultés que représenteraient ces sanctions pour les transactions de la City, s'est finalement rangée à nos arguments. Même si elles ne suffisent pas, les sanctions sont utiles. La France veut combiner sanctions et discussions. Pour l'heure, nous ne progressons guère, mais nous poursuivons la pression.

Monsieur Glavany, j'ai demandé à notre direction de la prospective d'apporter des éléments de réponse à votre question. Nous pouvons adopter une position de principe générale, fondée sur les droits, et l'ajuster à la situation – laquelle est différente en Tunisie, en Syrie, en Libye et en Égypte.

Monsieur Vauzelle, j'ai demandé à M. André Laignel, en tant que secrétaire général de l'Association des maires de France, d'examiner l'ensemble de la coopération décentralisée. Il convient d'opérer un double mouvement : le ministère des affaires étrangères doit jouer un rôle de proposition beaucoup plus marqué pour indiquer aux collectivités ce qu'elles peuvent faire et, symétriquement, les collectivités doivent pouvoir s'appuyer sur le ministère. Certaines régions, qui interviennent dans des pays lointains, disposent d'équipes qui sont à la fois coûteuses et trop peu nombreuses pour être efficaces. À l'inverse, au Japon, les responsables d'Ubifrance – l'organisme qui intervient pour les petites et moyennes entreprises – m'ont donné des exemples de régions qui mettent à disposition des personnels abrités dans la structure d'Ubifrance, ce qui permet une synergie au profit tant de la région concernée que de l'ensemble de notre pays. Il faut avancer dans ce domaine qui intéresse beaucoup les collectivités et les élus, et représente des montants considérables.

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