La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui institue des funérailles républicaines et gratuites pour les familles désirant rendre un dernier hommage à un être cher disparu.
Cette ambition est louable, mais dénuée de pragmatisme.
En effet, la proposition de loi prévoyait, dans sa rédaction initiale, d’obliger les maires à mettre à disposition des familles une « salle municipale adaptée » pour l’organisation d’une cérémonie non religieuse. Les maires ont déjà cette possibilité, mais ce n’est pas une obligation. La démarche actuelle est volontariste et je souhaite qu’elle ne soit pas coercitive, pour plusieurs raisons.
Le terme de « salle municipale adaptée » employé dans la proposition de loi ne me semble pas adéquat. Parler de salle « adaptée » signifierait en effet qu’elle doit être spécifiquement aménagée, donc dédiée, pour accueillir des funérailles républicaines. Or, dans les petites communes, nous le savons, certains maires n’ont même pas de bureau. Mettre en place une salle adaptée aux cérémonies funéraires relève donc, pour eux, de l’illusoire. Je préfère pour ma part, et je l’ai proposé en commission, le terme « adaptable » qui apporterait un peu de souplesse à l’organisation conférée aux communes, notamment celles de taille modeste.
Cette nouvelle mesure me paraît également peu envisageable au vu du contexte financier actuel des communes, qui croulent littéralement sous les obligations et les contraintes. On demande aux maires de faire toujours plus avec des moyens qui se réduisent comme peau de chagrin. Créer ou aménager une salle dite « adaptée » à seule fin de funérailles républicaines n’est donc pas judicieux.
Il faut faire confiance aux élus locaux et à leur bon sens pour mettre à disposition des familles endeuillées une salle adaptable aux cérémonies funéraires. Je préfère pour ma part une incitation plutôt qu’une obligation qui, par ailleurs, pourrait être accompagnée financièrement par l’État. Nous aurons l’occasion d’y revenir puisque j’ai déposé un amendement commun avec le rapporteur et mon collègue Pierre Morel-A-L’Huissier afin de modifier cette disposition.
Je relève par ailleurs que le caractère gratuit de la mise à disposition de la salle contrevient aux règles de la domanialité publique. En effet, l’occupation ou l’utilisation du domaine public doit donner lieu au paiement d’une redevance, même minime. Celle-ci pourrait être fixée par délibération du conseil municipal. Je propose donc un amendement donnant la possibilité aux maires d’exiger le paiement de cette redevance.
Cette proposition de loi dispose enfin qu’un représentant de la commune ou un officier d’état civil procède à la cérémonie civile.
J’ai déjà eu l’occasion de le dire en commission, cette proposition de loi impose aux maires des prérogatives qui ne leur appartiennent pas. Pour le dire très simplement, chacun son métier ! Préparer et présider une cérémonie funéraire ne s’improvise pas. Cela nécessite, au contraire, une expérience et une expertise indispensables pour accompagner au mieux les familles qui traversent une période très douloureuse. Les sociétés de pompes funèbres sont spécialisées en la matière.
Mes chers collègues, plusieurs d’entre vous sont également élus locaux. Mieux que quiconque, vous savez que les maires ont déjà suffisamment de travail, surtout dans les petites communes où ils s’impliquent dans de nombreuses tâches qu’ils ne peuvent, faute de personnel, déléguer. Ne leur imposons pas une nouvelle charge, laissons-les s’occuper uniquement de leurs missions traditionnelles.
Pour conclure, cette proposition de loi laisse encore beaucoup de questions en suspens, notamment pour ce qui est de sa mise en application. À quelles sanctions s’exposent les maires qui refuseraient de se soumettre à la nouvelle obligation ? À quels critères et normes devra répondre la salle municipale adaptée – ou adaptable ? Autant de questions auxquelles ne répond pas la proposition de loi, qui ne fait, à mon avis, qu’effleurer la problématique des funérailles républicaines.