Voilà presque un an jour pour jour, les vingt-huit États membres de l’OTAN invitaient le Monténégro à rejoindre l’Alliance. Le 19 mai dernier, un protocole d’accord a été signé et nous sommes aujourd’hui appelés à le ratifier.
Le Monténégro est en passe de devenir le vingt-neuvième membre de l’OTAN, sous réserve de ratification de l’accord par les parlements des États membres. Cette adhésion à l’OTAN suscite des interrogations. Et j’ai bien entendu vos propos en commission et dans l’hémicycle, monsieur Poniatowski. Un pays qui adhère à l’OTAN doit remplir un certain nombre de critères – tant géographique que politiques et stratégiques – qui prennent en compte les principes fondamentaux de l’alliance, c’est-à-dire la démocratie, les libertés individuelles, l’état de Droit et le renforcement de la sécurité.
Sur le plan militaire, un contingent monténégrin participe d’ores et déjà à la mission de l’OTAN en Afghanistan. Pour ma part, je ne pense pas que les capacités militaires du Monténégro, une petite armée qui compte environ 2 000 hommes, soient la raison principale de l’invitation à adhérer à l’OTAN. Dès lors, que peut-on attendre de cette adhésion ?
Tout le monde s’accorde à dire qu’il reste encore à cet État beaucoup de chemin à parcourir avant d’être considéré comme un État de droit. À l’échelle du Monténégro, cette intégration, qui intervient alors que ce pays mène en parallèle des négociations d’adhésion avec l’Union européenne, va inciter le Monténégro à se réformer plus rapidement, non seulement militairement, mais aussi sur le plan de l’état de droit. Auparavant, le Monténégro, peut-être du fait de sa petite taille, n’était pas vraiment observé par la communauté internationale, ce qui lui a permis de passer à travers les gouttes, vous l’avez dit, M. Poniatowski : il est dirigé depuis 25 ans par des responsables politiques notoirement impliqués dans des affaires plus que douteuses.
Nous avons par le passé validé les adhésions à l’Alliance atlantique et à l’Union européenne de l’Albanie, de la Bulgarie et de la Roumanie. On ne peut pas dire qu’à l’époque ces États correspondaient exactement à notre conception de l’état de droit. Nous les avons pourtant accueillis, car ils s’engageaient à réformer en profondeur leur système national ; leurs intentions avaient finalement commencé à se traduire dans les faits. C’était donc à mes yeux de bonnes décisions.
Le cas du Monténégro est identique aujourd’hui. L’État monténégrin a présenté sa demande par la voix d’un gouvernement démocratique, qui vient de bénéficier du soutien renouvelé des électeurs. Vous dites, monsieur Poniatowski, que selon un rapport du Sénat les partisans de l’adhésion à l’OTAN représentent entre 40 et 41 % de la population : les sondages du Sénat sont sans doute faux, comme beaucoup de sondages, car le parti qui demandait l’intégration à l’Alliance a récolté 60 % des voix, tandis que celui qui y était opposé n’en a obtenu que 20 %.
Pendant toute cette période d’approbation, celles et ceux qui, au sein de l’OTAN et de l’Union européenne, sont chargés d’évaluer les progrès de ce pays, ont montré que des efforts avaient été faits. Doit-on donc rejeter la demande d’adhésion d’un pays qui souhaite prendre le chemin d’un État de droit et consolider son projet démocratique par une intégration dans l’OTAN ? Je ne le crois pas.
Le contexte géopolitique actuel nous oblige aussi à regarder du côté de la Russie, qui s’inquiète évidemment de l’expansion de l’OTAN. La Russie est un pays ami, mais les réticences qu’elle exprime ne peuvent avoir pour seul motif sa volonté de déployer stratégiquement son pouvoir territorial. À nos yeux, réduire la possibilité d’un nouveau conflit dans la région est un argument déterminant : cette intégration permettrait à l’OTAN de jouer son rôle et de montrer une nouvelle fois son utilité. Nous nourrissons d’ailleurs les mêmes espoirs pour la Serbie, qui participe elle aussi au programme du Partenariat pour la paix, mais n’envisage pas pour le moment d’intégrer l’OTAN. Bien qu’un conflit soit aujourd’hui très improbable, du moins je l’espère, on regarde avec inquiétude la Croatie, qui se réarme sous l’égide de l’OTAN, pendant que la Serbie se fournit en armements du côté de la Russie afin de maintenir un équilibre des forces.
Nos questionnements quant à l’adhésion du Monténégro sont tout à fait légitimes, mais ils ne peuvent remettre en cause le soutien que nous devons y apporter. Nous devons établir la confiance nécessaire avec ce pays et dépasser nos inquiétudes. C’est ainsi que nous parviendrons, ensemble, à créer et à maintenir des relations stables, fondamentales pour notre avenir à tous. C’est pour cela que l’OTAN et l’Union européenne ont été créées.
Pour toutes ces raisons, à l’instar des députés de mon groupe et de tous ceux qui souhaitent voir la démocratie triompher partout, je voterai pour la ratification de ce protocole.